Je fais partie de ceux qui, lorsqu'ils ont la possibilité de passer une soirée en compagnie de Jean Pierre Bacri, ne peuvent  refuser l'aubaine sous aucun prétexte.

En effet, depuis une bonne vingtaine d'années - depuis que j'ai vu Mes meilleurs copains me semble t-il- je suis un fan absolu de Bacri, de son jeu d'acteur tout en nuance, des ses talents d'observateur du quotidien (qu'il déploie  évidemment évidemment sa compagne Jaoui), de son  sens de la répartie, de son regard bourru mais tellement plein d'humanité sur la société.

Et lorsque j'avais pu dialoguer un peu avec Raphael Jacoulot, mon président du jury à Annonay, et le dernier réalisateur (à l'époque) à l'avoir fait tourner, je n'avais pas manqué de lui poser plein de questions sur son acteur principal, pour savoir s'il était conforme à l'image qu'il donnait à l'écran.

Bref, lundi dernier, grâce à UGC, et dans le cadre de la semaine de la comédie dont j'ai parlé ici meme, j'ai eu l'immense privilège d'être invité à l'avant première du film Cherchez Hortense, sorti hier sur nos écrans, et dont Bacri tient le rôle principal. Ce rôle, c'est celui de Damien,  un professeur de civilisation chinoise, qui va être  poussé par sa femme ( jouée par la toujours formidable Kristin Scott Thomas), metteur en scène de théâtre, à contacter son père, haut fonctionnaire, pour aider une certaine Zaria Velickovic à obtenir des papiers.

Et non seulement, Bacri est pratiquement de toutes les scènes du film, mais en plus, il était présent  à cette avant première pour répondre à toutes les questions gratinées des spectateurs.

 Si ce moment de la rencontre avec JP fut aussi délicieux qu'attendu, le film en lui même m'a un peu laissé sur ma faim, même s'il possède  cependant un grand nombre de quallités.

L'auteur du film,  Pascal Bonitzer, cinéaste et scénariste qui a connu un certain succès au début des années 2000 avec notamment son film avec Lucchini, Rien sur Robert est un de ces metteurs en scène reconnus et estimés par la critique établie, mais dont le cinéma a toujours eu pour moi comme un gout d'inachevé (un peu comme le cinéma de Bruno Poladylès dont j'ai chroniqué récemment Adieu Berthe): des bons mots, de l'esprit, des acteurs de qualités, mais à l'arrivée, pas grand chose de transcendant, ni qui s'inscrit durablement dans les esprits .

Et je dois dire que je n'ai pas vraiment changé d'avis à la fin de ce cherchez Hortense (titre énigmatique dont la solution nous est donnée vers la fin du film, si on y prete bien attention) qui m'a laissé la même impression de bon film, mais pas aussi fort qu'il pouvait l'être sur le papier.

Partant d’une histoire qui m'a un peu rappelé l'avant dernier film d’Anne Le Ny Les invités de mon père (Anne le Ny dont je reparle- hélas- très bientôt),  Cherchez Hortense n'a pas le même mordant et la même maitrise.

Mais, soyons juste, sans doute le  réalisateur n'avait pas, au départ du projet, la même volonté  que Le Ny de dénoncer la situation des sans papier. Sa finalité était plutot de tracer le portrait de ce bourgeois de gauche, joué par Bacri, confronté malgré lui au sort des sans papiers, et qui va vraiment bouger une fois qu'il sera personnellement touché par cette situation. Même si certains passages sont vraiment extrêmement délectables (notamment cette scène fort savoureuse dans le restaurant japonais), l'ensemble, assez bavard, ne révolutionne pas assez le cinéma français traditionnel, celui de Claude Sautet à Arnaud Desplechin.

Une fois cela dit, il faut quand même insister sur le fait que Bacri est toujours aussi extraordinaire dans un rôle d’homme blasé , rôle qui pourrait,certes, aux premiers abords, ressembler à certaines de ses prestations antérieures, mais il faut dire que son jeu sied parfaitement au personnage, indécis et peu habile dans les mots, et son débit habituel, entre balbutiements et logorrhée  retranscrit parfaitement ce sentiment.

En outre, Bacri va plus loin que son personnage habituel déjà génialissisme, car le film lui permet  de dévoiler une autre facette de son jeu, plus nuancée, plus tendre même ( notamment avec son fils de 12ans), et qui  le rend parfois extrêmement touchant et mélancolique. Mais Bonitzer n'oublie pas pour autant de lui offrir une partition parfois tordante, comme lorsqu'il se retrouve après une nuit d'ivresse, nu avec un jeune japonais dans le lit, et qu'il va chercher par tous les moyens à deviner ce qui a bien pu se passer!!

Et ses retrouvailles avec Isabelle Carré (après leur première belle rencontre dans Les sentiments de Noémie Lvovsky) offrent également de bien jolies scènes, où leurs maladresses respectives sont confondantes de naturel et de plaisir.

Bref, Cherchez Hortense n'est pas un chef d'oeuvre du genre, mais reste un fort bon film que vous pouvez aller voir sans trop d'hésitation.

La salle, lors de l'avant première en question, semblait d'ailleurs plutot conquise, excepté un olibrius de fort mauvaise humeur, qui a détesté le film et la prestation de Bacri (selon lui pas crédible pour un sou en fils de Claude Rich), et n'a pas manqué de le faire savoir à Bacri qui l'a vertement remis à sa place, à la grande joie des spectacteurs...

Mais à part cet intermède, Bacri, portant une fine monture au nez, s'est montré d'une excellente humeur, voire  même très gentleman lorsqu'il montait lui même dans la salle pour apporter le micro aux spectacteurs qui levaient la main et ne semblaient pas en revenir...

Car évidemment, une grande majorité du public était là pour voir Monsieur Bacri dans ses oeuvres, et en cela, ils n'ont pas perdu leur soirée, loin de là...

Et un grand merci à Raphael d'UGC de m'avoir invité (une nouvelle fois) à cette avant première!!!