On redouble tous avec Camille!!!
J'entretiens un rapport particulièrement ambivalent avec mon adolescence : ce n'était pas forcément une période facile à vivre pour moi (comme pour tant d'autres je pense) tellement j'étais mal dans ma peau et peu sociable, mais parrallèlement, lorsque je repense à cette époque, c'est très souvent avec beaucoup de nostalgie et de tendresse.
Ainsi, je me suis souvent fait la réflexion qu'avec un peu du recul et du détachement que j'ai pu acquérir au fil des ans, j'arriverais certainement à aborder différement cette période charnière.
Ainsi, il ne me déplairait pas forcément de vivre la même expérience que Camille, l'héroine du film Camille Redouble de Noémie Lvovsky, persuadé qu'avec la maturité que j'ai acquis au fil de ma vie, je m'en sortirais quand même un peu mieux que je n'ai pu le faire à l'époque.
Ce qui est certain, c'est que cette idée de départ de ce film, que j'ai vu le week end de sa sortie, m'a énormément parlé même si elle n'est pas forcément nouvelle, surtout dans le cinéma américain. On a en effet beaucoup parlé de Peggy sue s'est marié, ou de Big mais, plus généralement, le retour dans le temps est évidemment un thème récurrent, surtout du cinéma des années 80, décennie où se déroule la partie enfance du film.
Pour le cinéma français, en revanche, il est plus rare qu'il s'attache à ce genre de projet assez audacieux, même si cette année, un film français dont on a moins parlé que celui ci, et qui m'a énormément touché aborde le même sujet que ce Camille Redouble.
Il s'agit du film réalisé par un autre acteur réalisateur, Jean Pierre Rouve, Quand je serais petit, qui comporte, à mes yeux, énormément de similitudes avec Camille Redouble.
Comme le héros du film de Rouve, la Camille jouée par une Noémie Lvovsky , qui du coup s'est donné un premier rôle comme le cinéma français n'osait pas lui confier, a l'occasion de vivre son adolescence en mode "repeat", en arpentant le passé avec sa conscience du présent.
L'idée aurait pu n'être que mal exploitée comme souvent avec ce genre de pitch explosif, or, ce n'est pas le cas tant la cinéaste va utiliser cette perspective à plusieurs degrès différents, notamment en visitant d'une autre manière sa relation avec sa mère (très touchantes scènes avec Yolande Moreau), tout en tentant de réécrire également son histoire d'amour., au vu de sa pathétique fin, 25 ans après.
Vu sous cet angle, la comédie, toujours plein de peps et de fantaisie, garde toujours en elle une vraie mélancolie, amie fidèle du temps qui passe. Le film joue continuellement sur ce double registre, c'est à la fois bouleversant et à la fois léger, avec un équilibre parfois précaire mais toujours tenu sans que jamais le coté comédie empiete sur le coté émouvant (ou vice versa). Par exemple, la scène où Camille enregistre la voix de sa mère est en même temps amusante et très touchante.
Et le film réfute aussi le piège trop évident de l'idéalisation du passé : Camille revient certes se poser dans une époque où elle n'avait pas encore tous ses problèmes contemporains, mais sa vie était pour autant loin d'être idyllique.
Cela dit, il est évident que le coté "années 80", avec les petites madeleines de proust inhérentes (magnétoscopes, chansons de Blondie, jupettes à carreaux) ne pourront que toucher tous les trentenaires et quadragénaires cinéphiles, même ceux pour qui 16 ans n'était pas le plus bel âge de leur vie.
Bref, Camille Redouble est un excellent film, une des très bonnes surprises de cette rentrée cinématographique, et pour une fois, je suis totalement d'accord avec la presse intello qui l'a portée aux nues depuis sa présentation en sélection parralèle à Cannes.
Je ne me fais guère d'illusion, dès le prochain film, on sera totalement opposés, eux et moi, mais sur le coup, ca fait quand même un peu plaisir, je le reconnais, n'est ce pas, Monsieur Jean Marc Lalanne?...