Baz'art  : Des films, des livres...
29 octobre 2012

Mon week end avec Ken Loach( 2) :"LA" conférence de presse

conf Il est désormais plus que temps, une semaine après mon premier billet sur la cérémonie du Prix lumière de vous raconter le lendemain de cette soirée, lorsque j'ai eu l'immense privilège d'assister à ma toute première conférence de presse autour d'une personnalité du cinéma (la précédente que j'avais faite était liée à l'inauguration de l'UGC Confluence),

Et ce n'était pas n'importe quelle conférence de presse, puisque, comme je l'ai déja dit, Ken Loach fait figure à mes yeux, d'un des plus grands cinéastes mondiaux qui soient.

Bref, lorsque le service com' du festival m'a envoyé le mail d'invitation à cette conférence de presse de Monsieur Loach, je n'ai pas hésité une seule seconde avant d'accepter, en me disant que les places étaient forcément limitées et qu'il ne fallait pas tergiverser trop longtemps... Dommage pour mon loulou et l'avant première du jour des corneilles prévu au programme à la même heure, mais il existe, vous le concédererais également, dans la vie des priorités  :o)

De fait, le dimanche en question, j'étais levé aux aurores direction le Vieux Lyon et un des hôtels les plus beaux de la Ville, la Villa Florentine (dans laquelle j'ai eu une fois l'occasion de faire un diner  gastronomique forcément mémorable), où se tenait la conférence de presse, avec, dans ma sacoche, mon petit carnet du moment, sur lequel  totalement pret à vaincre ma timidité, j'avais préparé une question à Ken....  c'était bien la première, et peut -etre dernière fois de ma vie,  l'occasion d'approcher un si grand réalisateur, quand même!!!

Ah , la Villa Florentine....je ne sais pas si vous connaissez cet hôtel situé en plein vieux Lyon, mais sachez que pour y accéder, lorsqu'on a juste ses pieds comme moyen de transport, et qu'on a la condition physique d'un poulpe, il faut monter des rues tres escarpées... c'est donc complétement rouge et hors d'haleine que je me suis pointé devant l'hôtel en question, et juste à ce moment là, s'arrete un taxi d'où est descendu l'immense.....Aurélien Ferenczi!!!

Je sais que vous allez tous ou presque vous demander qui est Aurélien Ferenczi, mais pour moi ce type n'est pas n'importe qui, et surtout je vois sa bobine à la télévision pratiquement toutes les semaines...

Ferenczi est en effet un journaliste de télérama, chroniqueur régulier à l'émission de cinéma le Cercle, et également  l'auteur d'un blog sur le site de Télérama intitulé "cinécure".  Même si je partage pas tous ses goûts (il est plus fan du cinéma d'horreur et de Tim Burton que je ne  le suis), j'apprécie beaucoup le bonhomme et le voir comme cela juste devant moi à l'entrée de cet hôtel de grand luxe (endroit que je ne fréquente pas tous les jours non plus), ca pose déjà le décor...

Bon,évidemment, il ne s'est pas jeté vers moi en me disant  :" Filou 49, blog baz'art, toi ici?".(nous ne sommes pas dans un film hollywoodien), mais quand même, lorsque je suis passé au contrôle et qu'on a décliné tous les deux notre identité quasi en même temps, j'étais pas peu fier...

Pas peu fier, mais quand même un peu mal à l'aise, avec le sentiment diffus d'être un imposteur, vu que, lorsqu'une jeune employée de l'hotel m'a mené jusqu'à la terrasse où se trouvait les autres (avec une vue absolument superbe sur Lyon), j'ai découvert que l'on ne serait pas beaucoup et que la plupart semblaient bien se connaitre...  et  d'ailleurs tellement peu à l'aise que je n'ai jamais réussi à faire couler le café de la machine (ce genre de machine où il faut appuyer en même temps qu'on verse, la plaie pour les types dotés de deux mains gauches comme moi), alors même que mon palais en avait rudement besoin, de café...

 Du coup, la gorge sèche, je suis allé m'asseoir dans la petite salle où devait avoir lieu la "conf'"(comme on dit dans le jargon),  là j'ai vu qu'il y avait très peu de places de prévues et que lorsque j'ai demandé à un journaliste si la place à coté de lui était prise,j'ai eu droit à un mutisme assez étonnant...j'ai su aprés que le type travaillait dans un journal moscovite, doncce n'était pas forcément de l'impolistesse de sa part..

Car oui, vous avez bien lu, moi, le petit blogueur inconnu, j'étais entouré de journalistes russes, alors même qu'un autre du Daily Express se tenait juste devant moi...et le visage de mon voisin de droite ne m'était pas inconnu ,sans que j'arrive d'abord à le situer, et c'est lorsqu'il a posé la première question qu''il s'est présenté en tant que David S. Tran, le seul journaliste cinéma du Progrès, dont je lis évidemment ses chroniques bi hebdomadaires sans en rater une seule...

Enfin, je ne pouvais pas jouer longtemps les groupies ( tiens, justement, voila Aurélien Ferenczi qui arrive dans la salle, avec sa tasse de café, j'aurais du lui demander comment ca marchait, mais j'aurais été grillé à vie), car les choses sérieuses commençaient...

Thierry Frémeaux surgit en effet dans la salle, et commença à saluer tous les journalistes qu'il connaissait, et les appeller par leur prénom...A part l'anglais, le russe...et moi, l'enseemble des journalistes présents ont tous eu le droit à la poignée de Thierry, et lorsque ses yeux se sont arrétés sur moi, j'ai cru voir une abime de perplexité passer sur son visage...

Puis, un type installa le prix Lumière sur le pupitre devant lequel allait s'asseoir Ken Loach,  et plusieurs journalistes commencèrent à dégainer soit leur appareil photo, soit leur téléphone portable...à ce niveau là ,je n'avais pas àme sentir complexé, certains journalistes (dont Aurélien F, on n'est pas matéraliste à Télérama) ne possédant pas un meilleur appareil que moi...

 Puis, Ken Loach, flanqué de son éternel scénariste Paul Laverty et de sa femme Leslie, (qui sont partis s'asseoir juste devant moi), arrivèrent de façon très simple, sans tambour ni trompette... je fus surpris que personne ne l'applaudisse, vu que j'étais resté sous le triomphe de la veille, mais en même temps, nous étions entre professionnels, pas de vulgaires fans courbant l'échaine devant le talent -immense- de cet homme...

 Avant de commencer la conférence proprement dite, Thierry Frémaux, certainement pour le mettre à l'aise ( pas sur qu'il adore les critiques et les journalistes, comme bon nombre de ses confrères cinéastes ), lui glissa à mi voix un " dont' worry, there's only very goods journalists"... là, je me suis attendu à ce qu'il ajoute, en me montrant du doigt " except, of course, one blogger, right here", mais il s'est abstenu, sans doute n'a t-il pas voulu dénigré le service communication qui m'avait invité :o)...

Puis, le préposé aux lumières s'est mis à sortir l'artillerie lourde pour éclairer Loach et Frémeaux, et ceux ci ont vivement protesté contre la lumière aveuglante, Loach partant dans un délicieux exposé sur les techniques de son chef opérateur, Chris Mengès qui n'aurait jamais osé une lumière artificielle aussi agressive... :o)

Enfin, passé un petit préambule de Frémaux sur la joie d'avoir choisi Loach comme 4ème prix lumière, la foire aux questions a été lancée, et s'il s'est déroulé un petit moment avant que quelqu'un daigne se jeter à  l'eau (comme dans toute réunion professionnelle à laquelle je participe habituellement,) les premières questions ont fusé, et là, j'ai été surpris de constater qu'elles étaient d'abord toutes posées dans la langue de Shakespare, même pour les journalistes français...

De plus, étant donné que les deux premiers intervenants ont posé leurs questions sans aucun préambule, Thierry Frémaux a alors exigé des journalistes que chacun daigne se présenter avant de poser leur question à Ken Loach, même s'il a tenu à rajouter que cela  aurait peu d'utilité, vu que "tout le monde présent ici se connait déjà" (ah, mais alors, j'avais raison...Aurélien connait bien mon blog...sans parler du journaliste russe, évidemment tous les matins fourrés sur Hellocoton pour voir mon dernier billet :o)

Je me suis dit alors que, définitivement, je ne poserais pas la mienne, car je ne me voyais pas trop lever la main et dire à Ken avec mon accent français à couper au cordeau : " So, Filou 4, from blog baz'art, this is my question : Your recent movies are more turned for the greater part to the comedy? What is that it translates a change of state of mind of your part?"

Au moment où je faisais le deuil de cette question, un journaliste du Dauphiné Libéré s'est mis alors à lui poser quasiment la même, en français (autrement dit, savoir si récent virage vers la comédie reflétait un nouvel état esprit), et de façon moins alambiquée que celle que j'avais préparée...j'ai alors déchiré ma feuille et roulé en boule dans ma sacoche...

Cela ne m'a évidemment pas empeché de suivre attentivement les réponses apportées par Ken Loach, abordant des sujets aussi variés que la situation économique du cinéma mondial et français, la Palestine, son rapport aux documentaires....ect,  toujours avec la même gentilesse et la même précision.

Loach n'éluda aucune question, attendant patiemment que le traducteur (qui avait de faux airs à la Joaquin Phoenix) daigne faire son métier.

Pendant qu'il répondait avec toujours ce même souci de la phrase juste ( il faut dire que certains sujets étaient quand même bien périlleux), Frémaux arrivait à écouter avec le plus grand intéret tout en envoyant des sms sur son portable ( dont la coque était aux couleurs de l'Olympique Lyonnais, en vrai fan de foot)...seuls les grands hommes savent faire plusieurs choses à la fois, voila pourquoi je reste à mon modeste niveau :o)

Je ne vous rentranscrirais évidemment pas l'intégralité de la conférence; mes confrères d'un matin l'auront bien sûr déjà fait, mais je sélectionnerais simplement un rapide échantillon, dans le désordre, des extraits que j'ai jugé le plus répresentatif de l'homme et de l'ambiance qui résultaient de cette conférence :

- "Voir le montage de mes films, hier soir, lors de la remise du prix Lumière, c'était un peu comme voir toutes les images de sa vie défiler devant soi avant de mourir ! Ça m'a surtout rappelé tous les gens avec qui on a fait tous ces films. Mais je n'avais pas réalisé qu'il y avait tant de foot dans mes films !" 
 
-Quand on regarde le paysage politique aujourd'hui, il est très difficile d'être optimiste. Nous n'avons pas assez de pouvoir pour nous opposer à la logique du marché. Mais la différence aujourd'hui, c'est que nous sommes à la fin de la partie (end game) : la planète ne pourra plus soutenir ce type de développement dans les années à venir. On sait que ça va changer. En bien ? Tout dépend de nos enfants, mais il faut se battre."
 
- Pour moi, les trois meilleurs cinéastes aujourd'hui sont les frères Dardenne, Milos Forman et… tous les autres réalisateurs du monde arrivent à la 3e place".

- Nous avons déjà travaillé avec des mêmes acteurs dans plusieurs films comme Robert Carlyle. Mais nous ne réfléchissons pas de cette manière. Nous cherchons juste des acteurs qui puissent remplir le rôle d’un personnage très précis. Mais c’est vrai, que nous en changeons souvent car nous ne voulons pas que le spectateur pense à un autre film lorsqu’il voit un acteur.

-Le casting est  quelque chose de très important. Il faut que la classe sociale de l’acteur colle avec celle du personnage. Quelqu’un qui vient de la classe ouvrière de Lyon ne pourra jamais jouer un personnage de la classe ouvrière de Manchester par exemple.

-Mes  films n'ont  pas vraiment eu d'impact sur la vie politique en Grande-Bretagne. Cela permet parfois de créer une discussion, un débat ce qui est très important. Mais ça reste quelque chose de local. La politique aujourd’hui est aux mains du centre droit, et les idées qui ne sont pas les leurs n’ont aucun impact sur leur façon de diriger."

 Ken Loach

 Pour finir, Loach a tenu à remercier chaleureusement Thierry Frémeaux pour l'honneur et pour l'accueil qu'il lui avait fait, en lui décernant son prix.

On sentait bien alors qu'il ne parlait pas uniquement de ce prix Lumière, mais bien des différentes sélections de ces films à Cannes, notamment les plus controversées. On voyait alors, comme le montre cette photo prise à l'issue de cette conférence, le respect et l'admiration mutuelle que les deux hommes éprouvent l'un pour l'autre.  Admiration que je ressentais également pour Loach tout au long de cette conférence, et que, si je n'ai pas eu le courage de lui retranscrire de vive voix à travers la moindre question posée, je reformule à travers ce billet.( Ken, si tu nous lis)...

Il fallait alors quitter ce milieu de journalistes, de grands noms du cinéma, et autres hôtels de luxe pour rejoindre une réalité plus ordinaire, mais, pour que celle ci soit plus douce,sur le chemin du retour, je me livrais à de petits pronostics sur le nom du prochain Prix Lumière, cette immense personnalité du 7ème art, que, cette fois ci, c'est sûr et certain, j'oserais interroger de vive voix à la conférence de Presse d'après remise de prix....les jeux sont ouverts...

Commentaires
F
@elleadah : qui ca, Loach, Frémaux...ou moi? :o)<br /> <br /> @madame sophie : oui c'était quand meme pas mal, je te le concède, et la connerie je l'ai pas dite vu que j'ai pas ouvert la bouche :o) <br /> <br /> @mydiscoveries :ah oui toi tu as déja connu ca, c'est vrai<br /> <br /> @renette : merci...ah Loach, Almodovar et Costa Gravas, ca en fait une belle brochette ca...c super d'avoir réussi à leur dire un mot<br /> <br /> @antony :ah mais je suis le spécialiste es autoflagellation :o) soit je le mérite soit il fallait qu'ils invitent un blogueur dans leur quotas, et ils ont tiré au sort :o)<br /> <br /> @potzina : pourrais tu envoyer ton commentaire aux différents organisateurs de tous les festivals de France et de navarre pour qu'ils te prennent au mot? :o) en tout cas j'adore rédiger ce genre de billet... et je t'avouerai que billet m'aura servi à parler par tweets interposés à une personne présente dans ce billet...et ce n'est ni Loach ni Frémeaux :o) bisous Potz
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P
Quel beau billet ! Une fois de plus filou, tu a su retranscrire tes émotions avec humour et sans faux semblants :) Rien que pour te lire, j'aimerai que tu assistes à ce genre d'événements plus souvent (ce qui ne serait pas pour te déplaire ;)).<br /> <br /> Je crois que je me serai sentie bien morveuse à ta place face à tous ces professionnels et à Thierry Frémaux et Ken Loach. Je crois qu'aucun son ne serait sorti de ma bouche ! <br /> <br /> Bravo à toi pour cette belle expérience et merci de l'avoir partagé avec nous.<br /> <br /> <br /> <br /> Bonne soirée filou, gros bisous
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A
Quelle chance tu as eu, et je m'imagine bien aussi mal à l'aise que toi dans une telle situation, mais ne te dénigres pas, si tu as été invité, c'est que tu le mérites :-)
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R
Et bien philou ton billet est excellent et on vis ton expérience !!! Trop bien !! Je comprends ton émotion dans ce genre de manifestation. Prépare toi donc pour l'année prochaine . Personnellement je n'ai jamais participé à ce genre d'évènements, mais j'ai eu la chance de croiser certains réalisateurs (ken loach à un feu rouge pendant le fif de cannes, almodovar et costa gavras aussi..... ), leur serrer la main et leur dire toute mon admiration...j'ai mis des heures à m'en remettre, eux par contre dans la seconde qui a suivi il m'avait bien sur oublier..... Bonne continuation.
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M
Ton billet me rappelle des souvenirs... En tout cas j'ai bien aimé lire tes impressions et ton retour sur cette conférence de presse, merci pour ce billet! ;o)
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