Si je n'avaisbroken-8 qu'un regret à émettre concernant mon top 10 ciné de 2012 que j'ai mis en ligne en début de mois,  c'est l'absence d'une nationalité cinématographique  : en effet, aucun film anglais dans les 10 premiers, alors même que j'ai une affection particulière pour les films provenant de  la Perfide Albion, et que normalement, chaque année, un ou deux films issus d'outre Manche y figurent forcément...

Cette année, le Ken Loach annuel était bon, mais peut être un peu trop léger pour figurer aussi haut, et Tyranosaur, tant acllamé ici et là était au contraire un poil trop sombre pour me convaincre tout à fait...

En fait,  les films  anglais sortis en 2012 que j'ai vraiment adoré au point de les mettre tout en haut de mon panthéon personnel, je les ai vu...en 2013,  mais qu'importe, l'essentiel est  quand même que j'ai pu les voir à un moment ou à un autre, n'est ce pas?.

En effet, grace à leurs éditeurs vidéo, j'ai pu me faire une séance de rattrapage de cinéma anglais avec deux films sortis cette année qui me tentaient beaucoup et qui ont largement rempli leurs promesses, chacun dans des styles et des époques différentes, même si tous les deux ont un point commun : ils lorgnent assez sensiblement vers le mélodrame, un de mes genres préférés, si ce n'est mon préféré.

Le premier  de ces deux séances de rattrapage en DVD (merci à Diaphana et France Télévisions pour ces envois), c'est Broken, qui a fait l’ouverture de la Semaine de la Critique à Cannes cette année et qui a eu autant de fans que de détracteurs. Broken est en fait un film choral qui se situe parfaitement dans la veine du cinéma social britannique traditionnel, avec une dimension sociale évidentes, abordant des sujets  aussi rugueux et divers que la  monoparentalité,  le handicap mental, la violence sous toutes ses formes, la grossesse adolescente).

Mais contrairement à la plupart de ces chroniques sociales dont le cinéma britannique a le secret, le scénario sait aussi ne pas toujours verser ( contrairement à Tyranosaur)  jouer la carte du glauque et du tragique.

Au contraire, le film sait nous ménager quelques beaux moments de tendresse , de fantaisie et de malice, aidée en cela par une jeune actrice sensationnelle dans le rôle principal de Skunk, la  jeune fille à travers les yeux de laquelle on verra tout son voisinage s'effondrer plus ou moins. En fait, Broken délaisse parfois la chronique sociale pour  emprunter le chemin du conte,  avec des scènes oniriques réussies, aptes à nous faire saisir les peurs et les désirs de  l'entrée dans l'adolescence.

En fait, le scénario, sensible et touchant, est l'oeuvre de Mark O’Rowe qui avait déjà signé le script de l'excellent "Boy A" , autre petite merveille du cinéma anglais.

Porté également par la magnifique interprétation, toute en humanité de Tim Roth ( qui revient à ses premiers amours, le cinéma anglais indépendant), Broken, qui peut parfois dérouter à cause d'une réalisation versant un peu trop dans les effets de mise en scène, mais son final, bouleversant en diable, cueillera même les  plus insensibles d'entre nous....

The-Deep-Blue-SeaLe second film anglais que j'ai vu cette semaine en DVD se situe encore un cran au dessus de Broken. Il s'agit du nouveau film de Terence Davies, The deep blue sea, sorti en juin dernier plutot confidentiellement, même s'il fut défendu par une bonne partie de la critique établie de Télérama aux Inrocks.

Il faut dire que le cinéaste britannique Terence Davies a toujours été puissamment soutenu par cette presse là, à mon grand plaisir puisque j'ai toujours beaucoup aimé son cinéma, ces films rares mais trés sensibles sur le Liverpool de sa jeunesse. Davies n'hésite pas à jouer la carte de l'émotion, voire du mélo, mais avec une telle  retenue et tel regard plein de sensibilité sur ses personnages que je ne peux que regretter qu'il réalise aussi peu de films de fictions ( avant The Deep blue sea, son dernier long métrage de fiction datait de 2002!!)

Dans ce Deep blue sea, Davies ne parle plus de ses souvenirs d'enfant vivant dans une cité ouvririère de Liverpool, mais il adapte une pièce de théatre de  Terence Rattigan, dramaturge  assez connu en Grande Bretagne, et qui avait notamment une facon bien à lui de raconter très justement la souffrance rentrée des femmes de la haute bourgeoisie.

On est ici juste  après la Seconde Guerre mondiale, lorsqu'une femme très belle (ah que j'adore Rachel Weicz, une de mes actrices anglo saxonnes préférées)  Hester Collyer quitte son mari, le juge Sir William Collyer, largement plus âgé qu’elle, pour Freddie Page, un aviateur jeune et séduisant. Après dix mois de passion dévorante, la décision radicale et impulsive d’Hester laisse place à un état dépressif profond.

Qui dit adaptation de pièce de théatre peut dire aussi huis clos immobile et ampoulé, or c'est tout le contraire qui se passe ici : Terence Davies fait entremeler sans cesse présent et passé  d’un simple et doux fondu ou d’un lent mouvement travelling, afin sans doute de souligner la confusion d’une héroïne au bord du gouffre.

  On est complétement ravagé par le destin d' Hester  et  tout aussi ravagé par la musique originale,  vibrante d'émotion. Et si cette grande oeuvre ménage assurément un des plus beaux portraits de femme que j'ai pu voir  dans les films l'an passé (avec sans doute celui  de Louise Wimmer), Terence Davies cisèle de riches personnages masculins et surtout le mari, bien loin des archétypes traditionnels ce  Sir Collyer, haut fonctionnaire rongé par ses conventions et sa dignité est déchirant d'impuissance face à cette femme qu'il perd mais qu'il aime toujours aussi profondément.

Au-delà de dialogues brillants et littéraires, il y a surtout le travail visuel exemplaire de Davies, dont chaque plan semble avoir été pensé au millimètre et dont les tonalités rendent à la perfection ces années 50 ternes et grises durant lesquelles les passions ne pouvaient que conduire à l'échec, voire au désespoir.  Ce film magnifique nous montre ainsi une  facette de l'angleterre différente de celle présentée par les films de la production contemporaine.

une_cine_oclock_4732Ces deux excellents films,  Broken et The deep blue sea, font partie de la programmation d'un festival qui va se dérouler très prochainement et qui, comme mon billet, met en exergue le cinéma anglais sous toutes ses formes.

Ce festival Ciné o Clock du 2 au 10 février prochain,  en est à sa  18e édition ( depuis 1995) , et il est proposé par  le cinéma Le Zola à Villeurbanne ( dont je vous avais déjà parlé pour d'autres festivals).Sa finalité est de mettre un coup de projecteur sur la production cinématographique de nos voisins d’Outre-Manche  avec une semaine « So British »  qui propose un large panorama des films britanniques et irlandais qui font l’actualité et offre en exclusivité les oeuvres qui ponctueront l’année à venir.

Le programme est alléchant en gardant à l’esprit une ligne éditoriale claire, à savoir alterner avant-premières en faisant découvrir les succès à venir  ( The Shadow Dancer avec Cliwe Owen, Week end royal avec Bill Murray), des  soirées thématiques avec l’hommage à un grand nom du cinéma anglais, au coup de projecteur sur l’Irlande, en passant par un focus sur un auteur à suivre, cette semaine se veut ludique et curieuse, des films « à voir et à revoir », les films marquants de l’actualité cinématographique britannique et irlandaise de ces derniers mois (comme les deux dont je viens de vous parler) ou encore des classiques, des animations ( avec notamment des blind tests) et des projections aussi pour le jeune public ( comme le superbe ferme des animaux) .

Et si vous voulez plus de détails, allez voir le programme en entier sur le site de la manifestation.

Bref, si avec tout ca je ne vous ai pas donné envie de voir un bon anglais devant une non moins bonne tasse de thé anglais ( j'en profite ainsi pour remercier My Little Discoveries chez qui j'ai gagné un superbe coffret de thé lors de son concours de Noel) c'est à n'y rien comprendre, foi de froggies!!