Peut on encore de nos jours réaliser des films qui semblent tout droit sortir des années 80?
Cette pensée, je l'avais eu en tête en voyant Drive, le film un peu surestimé par tout le monde de Nicolas Winding Refn, et je l'ai ressenti encore plus violemment en allant voir Passion, le nouveau film de Brian de Palma, film également surestimé, mais par beaucoup moins de gens, plutot la franche intello de la critique parisienne qui a toujours porté aux nues ce grand cinéaste américain.
En effet, pendant toute la durée du film, on a vraiment l'impression, que ce soit au niveau du sujet que de la mise en scène, de regarder un film fait il y a 30 ans, à part simplement quelques anachronismes comme les portables ( téléphones et ordinateurs) que l'on croise ici et là au détout d'une intrigue un peu tirée par les cheveux de l'intrigue.
Sinon, notre cher De Palma, qui a quand même réalisé de grand films pendant ces années 80, reprend exactement les ingrédients de ses thrillers de ces années là (Pulsions,Blow out ou Body Double): voyeurisme,manipulation,rapports de soumission et domination,faux-semblants...
Vu le peu de succès de ses derniers films ( Femme Fatale, Redacted), De Palma a du se dire que le plus sage était de renouer avec ce qui a fait la clé de ses succès, à savoir ses premiers thrillers érotico-hitchcockien des années 70 et 80.
Le problème est que la mise en scène semble complétement calquée sur celles des ses années là, et que du coup, cela passe moyen et surtout fait quand même pas mal penser à une série B un peu parodique, et un peu à la lisière du kitsch et du ridicule, surtout dans sa première partie.
La mise en scène est en effet très old-school, avec des mécanismes qui peuvent sembler éculés ( le split screen très à la mode à une époque) et des musiques « hitchcockiennes » qu’on n’entend plus vraiment de nos jours.
Passion est en fait, pour ceux qui l'ignorent encore, le remake de "Crime d'amour", le dernier film avant sa mort d'Alain Corneau.Il s'agit d'une relation trouble et saphique entre deux femme dans une multinationale de la publicité. Brian De Palma a, selon ses propres mots, tenté de rendre ce thriller manipulateur avec Rachel McAdams et Noomi Rapace"plus érotique, plus sexy, plus ludique et plus pervers" que l'original.
Là dessus, on doit reconnaitre qu'il y arrive facilement tant l'original était un peu plan plan et pas forcément sexy en diable. Prenant pour cadre le monde des affaires, il met en scène Naomi Rapace, interprétant avec brio une jeune femme qui tente de se faire une place au sein de la multinationale pour laquelle elle travaill et qui entretient une relation étrange avec sa supérieure, mêlant séduction, manipulation et trahison dans un cadre qui dépasse celui du travail.
Le film dépeint un univers de requins où l’argent est roi, mais où les plus faibles peuvent vite perdre pied, et où le succès peut bien vite laisser place à la déchéance. Bref, rien qui ne sort beaucoup de l'ordinaire de la production cinématographique courante, mais tout cela pourrait passer si on était pas souvent géné par le coté vriament kitsh de certaines scènes du début, et de l'érotisme un peu surranné sous jacent de l'intrigue et de la mise en scène.
Rachel McAdams et Noomi Rapace sont plutôt impressionantes et se fondent avec talent dans l'univers de De Palma. Mais l'histoire fumeuse qui se raconte dans Passion rend la très grande partie de leurs scènes gênantes, et même la mise en scène, parfois ingénieuse, parfois à coté de la plaque de De Palma n'aide pas à la fluidité de l'histoire.
La seconde partie du film ( celle qui arrive après la fameuse scène de split screen en question) est, certes, plus captivante que la première, car nous propose des rebondissements moins prévisibles, mais là encore, certains détails gênent un peu ( le film réalisé avec des fonds franco-allemands se passe à Berlin et l'on voit apparaitre à mi parcours des flics qui font pas mal penser à Derrick).
Bref, cette passion un peu vaine se regarde sans déplaisir aucun, mais sans vraiment de passion!!
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