Il y a maintenant quinze jours de cela, je vous ai parlé d'Antoine Dulery, et de son spectacle " Antoine Dulery fait du cinéma au théâtre" qu'il allait présenter incessamment dans le café théâtre de mon quartier.
A la suite de cet article, j'ai eu la grande chance d'être invité (un grand merci à Pauline) pour voir de quoi il en retourne, et je dois dire si j'avais quelques appréhensions sur sa capacité à passer du cinéma au one man show, exercice sur lequel de nombreuses personnalités se sont essayés avec plus ou moins de brio et d'a propos ( ne citons personne pour ne pas les vexer, on les reconnaitra facilement), je dois reconnaitre que Duléry a largement passé le cap avec énormément de talent et de maitrise.
J'ai eu un petit peu peur au début, en le voyant arriver habillé en sumo, ou plutot devrais je dire déshabillé en sumo puisqu'il était torse nu ( voir photo à droite). Je me suis en effet dit qu'une telle apparition si spectaculaire allait certainement cacher le peu de matière de son discours. Un discours qui m'a d'ailleurs paru dans les dix premières minutes pour le moins peu clair, d'autant que le comédien semblait quand même un peu mal à l'aise, et pour le moins tendu.
En fait, il faut entrer dans le spectacle de Duléry car le principe narratif est par essence dense, et pourrait donner l'impression d'un spectacle un peu décousu.
D'ailleurs, Duléry a conscience du fait qu'il nous perd un peu : puisqu'il s'adresse très vite à nous : "Je vous sens un peu désemparés. Vous vous dites, il fait le sumo, il dit aurevoir àdes gens..."
Le comédien nous explique alors qu'il est à une soirée entre amis, entouré de Fabrice Luchini, Patrick Chesnais et Daniel Prévost et dont il n'arrive jamais à partir.
En apparté de cette soirée, Dulery nous donne pas mal de confidences et de confessions, comme ses visites chez le psy (un Henri Chapier plus vrai que nature) ; téléphone à sa femme pour lui dire qu'il va renter ; se retrouve durant la Seconde guerre mondiale à parler à Louis Jouvet avant de se mettre à chanter comme Michel Legrand Charles Aznavour, Barbara, et surtout, se met à nous dévoiler quantités d'anecdotes avérées sur le cinéma ou le théatre, ce qui lui donne prétexte à quelques imitations assez impayables et parfois parfaitement réussies.
Car le spectacle de Dulery, c'est plusieurs représentations en une : un spectacle d'imitations, un stand up, une pièce de théâtre, et un récit un peu interactif et plus personnel. En effet, Duléry multiplie des apartés avec la salle qui lui permettent de créer une intimité et une connivence qu'il recherche coûte que coûte. Entre ces séquences, Duléry se dévoile... un peu : "Une fois que j'ai joué un rôle, je n'y pense plus. Je suis plus hanté par des répliques et comédiens que j'admire." Il cite des extraits du Cid de Corneille; des "Enfants du paradis" de Marcel Carné, et une trés émouvante version de la Femme du boulanger par un Galabru que l'on croirait voir en chair et en os...
Car la vrai plus-value de ce show réside incontestablement dans le talent d'imitateur de Duléry tant maitrise cet art avec une qualité qu'on ne lui connaissait pas ( même si je l'avais vu faire Serrault chez Lelouch ou Bébel chez Druker :o) : j'ai énormément ri quand il prend les traits d'Alain Delon toujours aussi sérieux, s'essayant à la comédie dans une version de Rabbi jacob que De Funès n'aurait pas renié ; ou lorsque De Niro tente un extrait de "la Cage aux folles". Cela crée un décalage hilarant et pour le moins épatant!!
Mais Duléry sait aussi mettre son appétence pour l'imitation avec plus de tendresse, mais toujours avec justesse : son imitation de Chesnais, acteur que j'adore plus que tout, est juste et jamais caricaturale. En revanche, Duléry n'épargne pas forcément Luchini ou Dujardin, mais jamais avec méchanceté.
Duléry déploie en tout cas tout au long de son show d'une heure ( un peu trop courte, jeune homme) une énergie communicatrice fait le reste durant cette heure de spectacle qu'on ne voit pas passer.
Bref, avec son tout premier one man show, Antoine Duléry a réussi son entrée dans le monde du one man show avec cet ovni théâtral qu'il rejouera cet été dans le off du festival d'Avignon en juillet. Souhaitons lui tout le succès du monde!!!