Marc Fitoussi ("le réalisateur des trés réussis et savoureux films Copacabana"ou de la Ritournelle, voir critique, et. tous les deux avec Isabelle Huppert ) nous propose avec "Maman a tort", sorti en salles il y a un tout petit plus qu'une semaine, est une comédie grinçante et profondément intelligente sur les relations humaines au sein d'une grande société, vues à hauteur d'une adolescente de 14 ans,
Découvrir que sa mère peut être lâche, qu'elle peut se taire face aux injustices puis devoir vivre avec cette révélation qui va changer une relation mère/fille, c'est le scénario de départ de ce "Maman a tort", un film qui tente également de décrypter le thème du harcèlement sur les lieux de travail.
Pour Anouk, la jeune héroine du film que la caméra de Fitoussi ne lâchera pas d'une semelle, son très anodin stage en entreprise , qui est au départ une vraie purge pour tout le monde - très bonne idée que de parler de ce stage de troisième qui est une belle réalité dans les entreprises et un vrai casse tête comme chacun sait, dès qu'on est y est confronté dans un sens ou dans l'autre- va finalement être bien plus important que prévu dans sa vie et dans son apprentissage d'adulte en devenir...
Ce stage sera pour Anouk l'occasion contrainte de mettre un terme à une vision idéaliste et idéalisée, et de la société et de sa mère qui va devoir lui expliquer les lachetés et compromissions qu'elle doit endurer dans sa vie professionnelle ; des compromissions qu'Anouk elle même va devoir faire, bien loin de ses volontés utopistes et du costume de justicière qu'elle aura tant aimé endosser..
On navigue dans une sorte d'Eric Brokovitch- une histoire d'arnaque à laquelle se livre la compagnie d'assurance où Anouk fait son stage- mais porté par le regard d'une gamine de 14 ans, d'où quelques situations pour le moins cocasse et décalée, et quelques scènes plus teen movie- de drague avec un autre stagiaire ou des discussions avec une copine un poil surperficielle- un peu plus convenues mais qui touche également par leur justesse et leur fraicheur..
Traité sur le ton de la comédie dramatique, Maman a tort s’attache en effet tout autant aux rapports mère-fille qu’à la découverte du monde de l’entreprise entre petits arrangements et grandes lâchetés.
La souffrance dans le monde du travail, la tyrannie managériale et les abus sociaux de certaines compagnies d’assurances sont des sujets forcément lourds et profonds, habituellement traités dans les émissions de débat - ou pire dans les reportages putassiers de M6 et consorts- et on aurait pu penser que les voir à travers les yeux d'une gamine de 14 ans pouvait prêter le flanc à la caricature, sauf qu'ici, le constraste entre ces sujets et la legereté adolescente est particulièrement bien vue et surtout très rarement traité au cinéma.
Ces qualités constituent l'immense intérêt du film de Fitoussi, et la justesse du regard d'un cinéaste qui prouve une nouvelle fois sa faculté à mélanger comédie populaire efficace-certaines scènes avec Camille Chamoux et Nelly Antignac sont vraiment très drôles- et sujets de fond sensibles, tout en évitant clichés et facilités d'écriture, et en traitant toujours avec pudeur et tact..
Dans le rôle de la mère au bord du burn out, Emilie Dequenne est comme toujours, vraiment remarquable, alors que, pour lui donner la réplique, Jeanne Jestin, qui avait déjà fait une apparition dans "Le Passé" aux côtés de Berénice Bejo en 2013, est d'une maitrise et d'une palette de jeu vraiment impressionnante , à la fois rebelle et ingénue quasiment dans la même scène, une vraie révélation qu'on devrait très vite revoir sur grand écran.
Bref , maman a tort, sans doute quand on voit le film, mais les spectateurs aussi auraient tort , de la bouder, cette fort jolie comédie française...
EXTRAIT MAMAN A TORT - Le 9 Novembre au CINEMA