« Jeune garçon, grand, aux yeux bleus terribles, aux cheveux bruns tirant sur le roux, au sourire éblouissant comme la foudre. Les femmes l’adoraient. Bien avant ce qui était autorisé, elles voulaient ses baisers, ses mains, lui ouvrir leur lit quand leur mari était en ville. Et les petites filles étaient si distraites à force de le dévisager à l’église que le pasteur devait demander à Benjamin de s’asseoir au dernier rang. »
Un gourou charismatique crée une communauté religieuse sur les bords du lac Michigan, La Maison de David. Nous sommes au début du XXe siècle et Benjamin Purnell, un homme que l’on dit d’une beauté envoutante règne sur une colonie de jeunes filles et de jeunes hommes robustes vigoureux et travailleurs.
Dans ce lieu paradisiaque, on ne se coupe pas les cheveux, on ne mange pas de viande et l’on ne doit pas avoir de rapports sexuels. Le jardin d’Eden sur terre en attendant l’Appel, car les fidèles en sont certains, la fin du monde est proche, Ben a reçu un message de Dieu lui-même.
Le créateur accordera la vie éternelle du corps à tous les membres de la secte. Alors on cultive la terre, on construit même le premier parc de loisir pour les habitants des villes voisines. Les équipes de Base-ball et de basquet ball de la maison de David deviennent célèbres dans le monde entier.
Tout le monde rend grâce à Benjamin Purnell, surtout les jeunes filles de la communauté, car si la sexualité entre adepte est condamnée, les femmes sont très vivement incitées à partager la couche du roi Ben. Purification et promesse de vie éternelle contre un gros câlin, il n’y a pas à hésiter.
Hé oui tout cela a existé, chaque chapitre du formidable roman de la non moins formidable romancière Laura Kasischke débute par un l’extrait d’ article de journal d’époque, par le témoignage d’un fidèle ou d’un voisin de la communauté, ou par un compte-rendu de jugement car heureusement, l’aventure se terminera au triunal pour le prédicateur manipulateur (pléonasme?) .
Petit roman sec qui déconstruit un monde communautaire renfermé et pourtant extrêmement rentable.
Une société hypocrite et calculatrice à la joie forcée, comme un parc d’attraction rutilant dont on cacherait les poubelles pourrissantes. Court récit féministe pour résister à la domination masculine, court récit politique qui met en garde contre toutes les dictatures.