Baz'art  : Des films, des livres...
11 mars 2019

Rencontres autour du film Grâce à Dieu/ les membres de la parole libérée

 Second entretien de ce début de semaine après celui de Kent hier soir, et  pour ce lundi matin, on s'éloigne un peu  de la culture au sens propre du terme, avec trois personnes qui ne sont pas dans le milieu mais qui ont largement inspiré le film événement de ce début d'année 2019.

Le film "Grâce à dieu", événement cinéma de ce début d'année (voir notre critique ici)  met en avant  et en lumière les combats collectifs d'Alexandre Hezez, François Devaux et Pierre-Emmanuel Germain.

Le film vient d'atteindre le  demi-million de spectateurs  en deux semaines,  ce qui est un excellent chiffre  vu  la teneur du sujet.

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Ces  trois piliers de l'association la Parole libérée,  association fon­dée   à  Lyon en 2015  par d’anciens scouts accusant le père Bernard Preynat de les   avoir   abusés  et fédérant les victimes du père Preynat, sont joués respectivement  dans le film d'Ozon  par Melvil Poupaud, Denis Ménochet et Swann Arlaud.

 Ces trois membres  historiques de  l’association " La Parole libérée" ,  qui brisent l’omerta en créant l’association « La parole libérée , on avait eu la grande chance de les rencontrer le 12 février,  un peu avant la sortie du film en compagnie du réalisateur et des acteurs du film (seconde partie de la rencontre à venir prochainement)  : 

Interview avec les membres de l'association La parole libérée

pour le film "Grâce à dieu "

Alexandre Hezez, François Devaux et Pierre-Emmanuel Germain.

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Baz'art : Comment s’est déroulée la rencontre avec François Ozon et avez- vous accepté de suite de faire une fiction avec votre histoire personnelle ?

La Parole Libérée :  Avec François, disons pour résumer, que ce fut  une rencontre fabuleuse de  plus, comme on en  a eu  également avant, avec  des  journalis­tes, des  avocats, des  policiers, des  écrivains, tous ceux qui ont voulu nous écouter et donner du crédit à notre histoire....

On  a été  contactés il y a  un an et demi par François Ozon lui même. 

Mais il faut savoir qu'à l'origine, ses intentions n'étaient pas clairement définies, il en­visageait de réaliser un documentaire autour de notre histoire, mais on  était pas emballés par l'idée.

Nous avions déjà  participé à  cinq documentaires déjà depuis 2015  et  on  ne voyait pas  l’intérêt et la plus value  d’en faire  un  d e  plus,  tout François Ozon qu’il  était ( sourires) , et même on ne comprenait même pas trop pourquoi lui, qui a toujours fait de la fiction ne voulait pas faire pareil avec notre histoire ...

Heureusement, François a assez rapidement changé d’avis  pour réaliser une fiction, bâtie à partir d’une enquête journalistique, et de  longues et intenses rencontres.

 

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 On a donc accepté longuement de lui parler, de répondre à toutes les questions qu'il voulait nous poser, on n'a fermé aucune porte, mais pour autant, on n’a pas  voulu être partie pre­nante de son projet,  on  n’a  jamais été impliqués dans la forme ni le scénario, ce n'était pas du tout dans notre état d'esprit.

Bref,  à partir du moment où on lui donnait le feu vert, on laissait François totalement autonome sur son film, on n'a même pas voulu à rencontrer ni à donner notre avis sur les trois acteurs qui jouaient notre rôle, on ne l'a fait qu'à la première projection officielle du film . 

Baz'art : Qu’avez-vous ressenti au fond de vous en voyant le film pour la première fois ?

La Parole Libérée :  C’est , vous pouvez vous en douter, très troublant de nous regarder, même  à travers le prisme de la fiction . 

 On n’a ja­mais voulu exister au  tra­vers  de  la parole libérée, on  a tou­jours été  animés par  des convictions profondes, en mettant en  avant l’intérêt commun et  aucunement  nos  iden­tités et véilleités personnelles.

On avait un peu peur de  la dimension héroïque  que le film   pouvait  donner  de nous parce que ce n’ est  pas  ça du tout qu'on voulait renvoyer comme image.    On n'est pas des héros, on  a juste fait  ce  qu’on devait faire.

Mais le gros  intérêt de  ce film,  et  donc de  la fiction, c’est que François Ozon n'a pas hésité à  prendre  un certain nombre de  libertés  notamment, sur  la mise en  lumière de notre intimité et de nos réactions personnelles, ce qu ’on   ne se serait   jamais autorisés personnellement à faire,  toujours au  nom de la vérité.  

Après on a trouvé que les personnages de Preynat, Barbarin et Régine Maire, les éclésiastiques du film,  étaient très bienveillants, plus que ce qu'ils ont semblé l'être dans la  vraie vie (sourires),  même si visiblement ce n'est pas leur opinion ( NDLR : l'interview a été réalisée avant les rejets des différentes actions en justice demandant le report du film après les procès).

 Baz'art : Vous parlez des libertés que François Ozon a prise avec vos véritables vies personnelles.. avec lequel de vous trois y a t-il eu justement le plus de libertés entre la fiction et la réalité?

Avec le personnage de Pierre Emmanuel incontestablement- joué par Swan Arlaud...Déjà il ne porte pas exactement le même prénom ( il est nommé Emmanuel dans le film), et puis c'est nous- Alexandre et François- qui avons fait rencontré Pierre Emmanuel à  François Ozon, car celui ci tenait à avoir un membre qui n'est pas forcément à l'origine du mouvement, mais qui est suffisamment représentatif de la souffrance de ces victimes.

Pour écrire ce personnage, François s'est évidemmment inspiré du témoignage de Pierre Emmanuel mais il a également fait un mélange avec d'autres témoignages.. par exemple,  Pierre Emmanuel ne souffre pas d'épilepsie comme son personnage  en est victime dans le film, cela vient d'un autre témoignage, visiblement.. 

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Baz'art : Pourquoi d'après vous,  votre  combat  a- t-il  eu  une telle résonnance, au point d'aboutir à ce film très attendu?

La parole libérée : Ah, c'est assez diifficile à dire, mais on a l’impression que le concept de “parole libérée” est un concept moderne et  caractéristique de  l’évolution de notre société ac­tuelle.

On se sent un peu en phase avec les  Gilets  jaunes, dans le sens où on  essaie d’enlever les responsabilités individuelles et de la repositionner dans une responsabilité globale et collective.

Et comme pour les gilets jaunes,  il n’y a pas  de leader dans notre collectif, personne ne cherche à exister au travers de  cela, on  reste avant tout  concentrés sur  la cause.

On a le  sentiment que tout cela redonne à différents acteurs ­que sont les cinéastes ou les journalistes, la base de leur métier, celui de contribuer à faire bouger les consciences et à interpeller l'opinion, faire quelque chose d'utile et fondé, l'essence de leurs missions, non? (sourires).

Il nous semble que modestement, on a un peu servi  à être le point de rencontre de tout cela.

 

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 Baz'art : Plus concrètement, pensez vous que l'église en tant qu'institution va profiter du film pour s'emparer enfin de la question de la pédophilie ?

Vaste question.. je sais que François a beaucoup d'espoir là dessus, il a rencontré quelques prêtres qui lui ont dit que cette oeuvre peut profiter à l'église, pour assumer et affronter enfin la réalité de la pédophilie...

De notre coté,  on a l'impression que depuis le début de notre combat, on entend quelques beaux discours de la part de l'institution ,mais très peu sont suivis d'effet.. c'est tellement difficile de faire bouger les choses dans cette institution, c'est tellement ancré depuis longtemps...

Mais le film a bien marché à Berlin, il semble y avoir une vraie attente et un vrai bon écho, donc pourquoi pas, gardons l'espoir en tout cas, c'est ce qui nous a permis à tenir depuis le début du mouvement, on ne va pas le perdre maintenant quand même ( sourires) ..

"Grâce à Dieu" : beaucoup d'émotions lors de l'avant-première du film de François Ozon

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