"Dévasté. Y avait-il un autre mot?Corentin s'était assis à côté d'Albane, à coté des autres. Comme eux, il contemplait. Mais contempler quoi? Tout ce qui était vif était devenu cendres.Tout ce qui existait était détruit. Tout n'était que silhouettes noires et atrophiées- et brulées- les immeubles, les arbres, les voitures. Les hommes. "
Sandrine Collette nous l'avait confié l'an passé lorsqu'on l'avait rencontré dans le cadre de Quais du Polar : elle ne saurait pas écrire un roman léger et optimiste et ne saurait pas non plus écrire un roman très urbain qui ne met pas la nature (le plus souvent très hostile) au premier plan.
C'est pour cela que nous n'avons pas été étonnés de voir que son nouveau roman, "Et toujours les forêts," sorti en cet hiver littéraire, est très noir et qu'il met au prise un environnement peu accueillant, isolé dans une ambiance assez post-apocalyptique.
S'il y avait un motif d'étonnement à avoir avec ce nouveau roman de Sandrine Collette, c'est celui de constater qu'elle a changé d'éditeur, ayant quitté Denoël pour JC Lattès, mais elle reste cependant fidèle à son univers de poésie noire dans lesquels les humains ont tendance à revenir à leurs instincts les plus primitifs .
"Et toujours les forêts "est comme l'était également la majorité de ses romans une sorte de conte noir assez hynotique et opressant.
On y suit un personnage, Corentin, qui a retrouve sa forêt ou il vivait heureux avec son arrière grand mère, Augustine, mais la retrouve dans un paysage en cendres, dans un monde qui a cessé d'exister, balayé par les flammes.
Comment survivre après une catastrophe et se réappropier des choses naturelles qui semblent ensevelies à jamais? Cette thématique, qui était déjà celle d'après la vague il y a deux ans, est devenu le sujet principal de ce nouveau roman de Sandrine Collette.
Roman sans concession sur les aléas du réchauffement climatique et sur le mal que les hommes font à leur nature, "Et toujours les forêts" est toutefois sans doute un des romans les moins nihilistes de son auteur : malgré une vision assez terrifiante de l'avenir de la planète, subiste toutefois un petit espoir incarné par Corentin en quête d'une hypothétique lumière et qui veut croire en l'amour, celui pour sa grand mère, Augustine, mais aussi celui pour Mathilde jeune femme croisée sur ces lieux de perdition.
Si comme souvent chez Collette, le livre ne nous dévoile pas toutes ses clés, on notera que la dimension anxiogène laisse parfois place une leçon d'humanité, de courage et un (tout petit mais quand même) rail de lumière qui fait du bien à l'âme.
Une chose est certaine : Sandrine Collette a peut-être changé d'éditeur mais elle n'en continue pas moinsà écrire des romans d'une puissance incroyable !
Sandrine Collette, Et toujours les Forêts, JC Lattès, 2020. 334 p.