RENTRÉE LITTERAIRE 2020 / Les Métamorphoses; Camille Brunel : une fable animaliste d'actualité
-" Tu as entendu parler de la prolifération d'animaux échappés? répondit-elle pour garder son exaspération sous contrôle : regarde, ils étaient en train de disparaitre et maintenant, ils reviennent alors dis moi, ça me passionne. Dis moi ce que ca t'évoque."
Octavia commença à manger sa viande : - Je ne sais pas, c'est un chant du cygne, non? Les dernières espèces essaient de rejoindre les villes au lieu de mourir dans la nature. Elles doivent imaginer que c'est un bon endroit pour survivre puisque les humains y prolifèrent. Je ne serais pas étonné si ta grue n'était qu'un animal qui avait compris qu'il fallait chercher la bouffe où elle se trouve, c'est à dire chez nous."
Jeune femme végane et antispéciste, Isis trouve un beau matin dans son jardin, une grue Antigone, très bel oiseau qu'on n'a pas l'habitude de voir en Europe.
Isis est à ce moment là loin de se douter que cette apparition n'est que la première étape d'un phénomène très étrange qui voit des aniamux sauvages proliférer de plus en plus; le monde devenant dès lors un bestiaire aussi étonnant que rapidement terrifiant ...
L'étape suivante est encore plus incroyable pour Isis lorsqu'elle s'apperçoit qu'en fait, ces animaux sont le fruit de la transformation d'êtres humains tous victimes d'une pandémie inédite qui transforme radicalement le rapport de l'homme et de la nature.
Isis parviendra-t-elle à faire face à cette menace ainsi nos sociétés d’un retour définitif à l’état de nature qui met à mal ses propres convictions ?
"Isis n'osait plus bouger. Dinah l'avait trahie et sa honte vis à vis de sa famille le disputait à la peine qu'elle éprouvait pour l'hirondelle, en qui mourrait probablement le souvenir d'un nid d'hiver quelque part en Centrafrique, au dessus des gorilles et des éléphants qu'elle ne reverrait jamais-quelle absurdité finir tuée par une chatte après avoir survécu aux panthères"
Très rapidement va en effet se poser à elle la question de comment survivre au milieu de l’effondrement du monde tel qu'elle pensait le connaitre.
Dans le sillage de son premier roman, la guérilla des animaux (Alma, 2018), grand prix SGDL du Premier roman 2019, Camille Brunel , ardent défenseur de la cause animale, continue à embraser ses thèmes favoris- l'environnement, d'écologie, de protection de la nature, la revanche de la nature sur l'homme dans une fable animaliste et philosophique qui prend le parti de penser de manière singulière notre monde contemporain, tirant les ficelles jusqu’au-boutistes des travers de notre société.
" Enrique est devenue une sorte de poisson.Ophélie veut le garder. Pareil pour Federico, son copain veut le garder. C'est une sorte de grenouille maintenant."
Entre la Métarmophose de Kafka et surtout les Chants de Maldoror de Lautréamont, référence clairement assumée, le roman de Camille Brunel, avec sa toile de fond à base de pandémie mondiale et de retour à la nature; pourtant écrit l'an passé , résonne forcément avec la crise du Covid-19 et en fait un texte d’actualité. en cette rentrée littéraire 2020..
Un texte intelligent, déconcertant et profondément singulier..