Baz'art  : Des films, des livres...
23 septembre 2020

Rencontre avec Marc Fitoussi pour son film "Les apparences "

les apparences

Rencontre avec le réalisateur Marc Fitoussi, réalisateur des apparences ( voir critique ici)

Pourquoi adapter un roman de l'auteur peu connue Karin Alvtegen ?

Juste après mon premier long métrage, La Vie d’artiste, la productrice Christine Gozlan m’avait demandé si  l’idée d’adapter un roman pouvait m'interesser.

A cette époque j'avais surtout  d’écrire d’autres histoires originales, mais j’avais dit à Christine que si je me lançais dans une adaptation, ce serait plutôt dans le domaine du thriller , notamment avec une auteure que j’aimais beaucoup, Patricia Highsmith.

Mais tous les droits de Highsmith étant détenus par Sydney Pollack, alors  même qu'il en a adapté aucun, donc on a laissé tombé l'idée.

Christine Gozlan a  a découvert ce polar suédois dès 2008  qui pouvait ressembler un peu à du Highsmith. Elle m’a demandé de le lire pour voir ce que j’en pensais.

Je l’ai lu, j'ai trouvé ca pas mal mais avec  quelques réserves mais au moins comme j'aimais à moitié,  j'étais assez libre niveau adaptation  puisque je pouvais changer certains passages qui me génaient.   

Quels  changements par rapport au roman d'origine ?

L'intrigue du roman se déroule à Stockholm et ne parle pas du tout de la communauté d’expatriés français.

C’est l’histoire d’une femme qui découvre que son mari la trompe, elle ne se résout pas à l’affronter et préfère passer par des chemins de traverse  dont l'envoi de mails , pour essayer de le récupérer. 

Ce qui me génait en fait dans le roman c'est qu'il n'y a pas d'élement contextuel pour expliquer le silence de l’épouse vis-à-vis de son mari ni son impossibilité de concevoir une séparation.

D’où mon idée d’inventer ce milieu d’expats grand bourgeois, la profession prestigieuse du mari, le tout donnant un coté un peu  chabrolien avec les notables de province remplacée par la communauté d’expatriés.

Un mélange des genres assumé

 Au départ, le film pourrait être une étude de mœurs sur les Français de l’étranger. J’ai choisi Vienne parce que ça correspondait bien au métier de chef d’orchestre d’Henri.

Socialement, ce couple est en haut de la pyramide. Le mélange de genres est induit très tôt par la musique qui fait planer une menace sourde d’entrée de jeu.

Il y a aussi ce plan où Ève monte le grand escalier hitchcockien à la recherche de son époux : là, on sent qu’il ne s’agira pas seulement d’une comédie de mœurs.

 Des personnages peu aimables

L’ambigüité morale du film m’a valu des difficultés dans les recherches de financement : aujourd’hui, il y a une forte demande pour que les personnages principaux tiennent le spectateur par la main, soient irréprochables,  on cite notamment le film Sauver et périr sur les pompiers à tour de bras mais cela m’ennuie souvent  au cinéma, ce genre de personnages vertueux,  surtout dans le cadre d’un thriller.

Ce qui était important pour qu'on croire à ses personnages peu sympathiques à l'écriture c'est le choix des comédiens

Quelqu'un comme  Karin Viard parvient à faire des choses affreuses tout en restant éminemment attachante, et pas seulement dans ce film. Elle a un capital sympathie virtuose, et même quand son personnage fait des crasses, on est avec elle.

 D'ou vient Le titre  "les Apparences"?

Le titre  figure dans l’ultime dialogue prononcé par  Benjamin Biolay. Le film a été fait avec le titre de travail Valses de Vienne. J’avais peur de la fausse piste, que les gens puissent penser qu’il s’agisse d’un film en costumes sur Johan Strauss.
Il fallait donc rectifier, mais j’aimais bien l’idée de valse qui symbolise la ronde des rapports entre tous les personnages. Chacun passe son temps à suivre les autres ou à être suivi.
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Les apparences, s’appliquent à chaque personnage, y compris les secondaires. Le choix de Vienne me permettait  aussi d'intégrer au scénar un personnage comme Jonas.
C’est le seul Autrichien avec qui Ève entre vraiment en contact et c’est un fou furieux. Cette communauté d’expats aurait pu être située en Afrique, ou au Brésil, mais ça m’aurait embêté que le monde “extérieur” à leur communauté puisse être représenté ainsi. Jonas incarne les aspects sombres de l’Autriche.
Vienne dans l’imaginaire du cinéma, ça peut renvoyer aussi bien à Lubitsch ou Sissi mais aussi aux films peu aimables de  Haneke ou Seidl.
Un thriller tres élégant niveau mise en scène 

 C’est le film où je me suis le plus amusé en termes de mise en scène. J’ai souvent fait des films qui relevaient plus de la chronique comme Copacabana, La Ritournelle ou Maman a tort, où je craignais le “m’as-tu-vu”. Là, dans le contexte bourgeois friqué et dans l’écrin viennois, je n’avais pas de raison de me contraindre.

Par exemple, dans la séquence de l’opéra où tous les personnages se retrouvent à distance, j’ai pu jouer de façon un peu hitchcockienne avec les différents points de vue : Tina qui n’a d’yeux que pour le chef d’orchestre, Jonas qui observe Ève, etc. Ce scénario m’offrait la possibilité de déployer la mise en scène.

Une musique à l'ancienne

L’idée avec le compositeur Bertrand Burgalat était de faire une bande originale hollywoodienne à l’ancienne. Au départ du montage, j’avais placé des musiques témoins, ça allait de Ennio Morricone à Bernard Herrmann, ce qui plaçait la barre très haut pour Bertrand et l’intimidait.

Mais il a carrément relevé le défi. Il a donné une grande homogénéité à la B-O qui instaure dans le film une couleur précise sur toute la durée, qualité de plus en plus rare maintenant que de nombreuses B-O sont des compilations de musiques existantes.

 

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