Revue de BD spécial portraits de femmes : Nowhere girl, Corps Public, Prénom Inna tome 2
Si la couverture de Nowhere Girl reprend une pochette célèbre des Beatles, si les membres du groupe apparaissent sur les épaules de l'héroïne, c'est parce que ces stars de la pop ont joué un rôle très important dans la vie de Magali Le Huche.
Gros coup de cœur pour cette bande dessinée sur la vie d'une jeune fille de 11 ans qui souffre de phobie scolaire et qui trouve dans la musique un formidable moyen d'évasion.
🎧 A lire : pour l'univers graphique de l'illustratrice en rose et noir puis éclatant de couleurs lorsque les Beatles entrent dans sa vie, pour la force de ses images (le rocher énorme pour montrer la pression qui grandit chaque jour d'école par exemple, d'autres images en story), pour l'auto dérision de Magali Le Huche sur un thème pas forcément léger.
🎧 Vous l'aimerez encore plus si : des références comme Madame est servie, Ah-Ah ou Le passage de Francis Lalanne font écho; si vous avez une fille qui est entre enfance et adolescence (on a d'ailleurs fait lire à la BD à notre fille de 11 ans qui l'a aussi beaucoup aimé !)
2/Corps Public, Mathilde Ramadier et Camille Ulrich ( Editions du Faubourg)
Morgan, jeune comédienne de théâtre va apprendre, entre Paris et Berlin, et au fil des années à devenir actrice de sa propre vie et aller à l'encontre des discours normatifs qui corsète le corps féminin dans des fonctions spécifiques .
S'appuyant sur différents témoignages, cette bande dessinée retrace l’histoire d’une femme, comédienne de théâtre, de son adolescence à sa première grossesse .
Ce parcours a priori classique est abordé sous un angle original et assez inédit ( bien que proche dans sa démarche à une Brigitte Giraud dans son roman Histoire du corps) : celui de la façon dont son corps va être appréhendé par la société en général, et des idées préconcues formulées par differents corps ou institutions, des médecins aux hommes en passant par la famille ou les amis .
Corps Public sonde et interroge avec grande intelligence les normes liées au corps féminins et les représentations plus ou moins éronnées les premières règles, les premiers partenaires, douleurs menstruelles accouchement, blues post-partum…
Comment parvenir à concilier désir, personnels et professionnels en sauvant la face et ne grevant pas ses convictions profondes? C'est ce à cette question que tente de répondre cet album militant mais jamais pesant, qui offre une réflexion nourrie et très pertinente sur les notions d’appartenance , d'asservissement et de libération.
Le lecteur ressent bien la sensation d'oppression d'une femme prisonnière des modèles culturels sociétaux traditionnels de façon plus ou moins implicite
Osant se confronter aux ambivalences des diktats et des instrumentalisations en tous genres du discours formaté, Corps Public est un album idéal pour toutes les femmes qui cherchent à se réapproprier leurs corps à un moment ou un autre de leur vie , et qui donne finalement un peu d'espoir sur un changement possible de mentalités . Paru aux éditions du Faubourg
3/Prénom Inna tome 2 : Simon Rocheteau, Thomas Azuelos Inna Shevchenko ( Futuropolis)
Il ya un an, on découvrait le tome 1 du dytpique "Prénom Inna", saisissant portrait de la jeunesse d'Ukraine après la chute du bloc soviétique et montré à travers la parole d'une fgure majeure des Femen, Inna Shevchenko dont l'album raconte la naissance d'un engagement .
Le second volet de son récit, vient de paraitre toujours à la lisière du documentaire et de la biographie et prolonge comment son combat contre l'obuscrantisme et pour la libération a pu voir le jour.
Après l'enfance, au tour de l'adolescence et des années étudiantes.
Au début du tome 2, on voit Inna entrer à l'université de Kiev à 18 ans pour entreprirendre des études de journalisme.
Inna va dès lors très vite prendre conscience des ravages de la prostitution pour les étudiantes les moins aisées et approcher de près les dérives de la société qui enferment les femmes dans un cadre tres patriarcal
Tout cela va lui donner de s'engager pour plus d'égalité et de justice et comment va lui venir cette idée d'utiliser son corps comme une arme .
Le scénariste Simon Rochepeau qui a pu aller en Ukraine sur les traces du passé d'Inna reconstitue ces années de lutte avec réalisme et acuité, porté par des illustrations toute en subtilité de Thomas Azuelos.
Une biographie qui échappe au piège du didactisme en restant au plus proche de l'humanité et de la révolte de son héroïne.