Littérature étrangère Printemps 2021 : Le jeu de la dame/Oiseaux de tempête/Une saison douce
Un roman sur les échecs remis au gout du jour grâce à une série au succès interplanétaire, une fable sur les miogrants écrits par une roamncière italienne pratiquement toute aussi connue et une ballade islandaise auprès d'un bâteau en pleine tempète..
Voici ce qu'on vous propose dans notre dernier vendredi lecture du mois de mars/ sélection spéciale littérature étrangère
1/ Le jeu de la dame, Walter Tevis( Gallmeister)
"Elle décida de ne pas prendre le pion offert, pour conserver à l’échiquier toute sa tension. C’était ce qu’elle aimait. Elle aimait la puissance des pièces, qui s’exerçait selon des droites et des diagonales. En milieu de partie, quand il y avait des pièces partout, les forces qui s’entre- croisaient sur l’échiquier lui donnaient des frissons."
Comme beaucoup d’entre vous on a vu la série lors de sa diffusion sur Netflix. Un grand merci aux éditions Gallmeister d’avoir réédité cette pépite et de découvrir le texte original signé Walter Tevis pour le comparer avec la série
Gros succès 2020 de Netflix, la série Le Jeu de la dame a permis aux échecs de connaitre un véritable renouveau.
Plus de 30 ans après le roman dont il est adapté, la diffusion de cette série dans un contexte de renouveau féministe évident donne un bel écho au triomphe de Beth Harmon dans un monde forcément et férocement largement dominé par les hommes
Le récit est celui d’une ascension sociale par les échecs, est venu remettre les échecs sur le devant de la scène médiatique de façon très prégnante.
On suit le parcours d’une prodige des échecs de son enfance à sa consécration. Jamais reconnue par son père et orpheline de mère, Beth Harmon se retrouve à l’âge de huit ans dans un orphelinat du Kentucky où elle apprend à jouer aux échecs et devient dépendante aux anxiolytiques distribués aux jeunes pensionnaires.
Le gros atout est évidemment son héroïne, assez singulière Beth Harmon, qui se trouve vite plongée dans un monde des echecs largement dominé par les hommes.
Malgré son image de loisir élitiste, Le jeu de la dame donne une image plus fédératrice des échecs et joue habilement entre les reflexions inhérentes aux échecs et certains archétypes que l'écriture de Walter Tevis contourne très habilement.
2/Oiseaux de tempête; Einar Karason (Grasset)
🌊 Des creux vertigineux, des déferlantes qui balaient tout sur leur passage, de la glace, de la neige, la vareuse trempée, le maigre réconfort d'un café chaud ou d'une cigarette, la peur et la volonté de survivre, Oiseaux de tempête m'a offert toutes ses sensations alors je voulais vous en dire deux mots.
Ces chalutiers islandais qui partaient loin, par tous temps, dans les années 50, au large des côtes de terre neuve car la pêche y était miraculeuse, ils ont existé et les naufrages ont été nombreux.
🌊 A lire pour retrouver ou découvrir les formidables traductions d' 'Eric Boury (sur un vocabulaire aussi pointu que celui de la navigation maritime je suis encore plus admirative), parce qu'une fois embarqué, vous aurez forcément envie de savoir comment cela finit !
🌊Vous l'aimerez encore plus si vous aimez les auteurs islandais (même en pleine tempête, les livres sont présents à bord) !Parution : 7 Avril 2021
3/Une saison douce, Milena AGUS (Liana Levi)
"À l’arrivée des migrants, les vieux, surtout les hommes étaient tous morts. Ne restaient que leurs veuves et nous, couples vieillissants formés de femmes vaillantes et rieuses et de leurs maris honnêtes, sérieux et travailleurs mais aux tristes figures, aux sourcils perpétuellement froncés, qui ne semblaient se détendre que lorsqu’ils allaient boire un coup dans l’unique bar du village, qui sentait le bouchon."
Dans un village sarde, des migrants conduits par des humanitaires et des paysans vont vivre une cohabitation inattendue qui les marquera à jamais.
C'est sans compter l'intervention bienveillante d'un chœur d’épouses prêtes à défier l’hostilité de leurs maris envers les étrangers.
Milena Agus enthousiasme le public français depuis son Mal de pierres paru il y a 15 ans et joliment adapté au cinéma par Nicole Garcia.
Milena Agus déploie son intrigue, proche de la fable, autour de deux chœurs différentes de femmes narratrices: les villageoises, et les migrantes, dont s’extraient parfois des membres de ces collectifs, donnant à son récit une truculense et une fantaisie particulièrement bienvenues .
« Le train ne s’arrêtait plus chez nous, il passait en sifflant et en nous ignorant, parce que nous n’étions même plus une commune, rien qu’un hameau baignant dans le silence : le Maire, les urgences médicales et le curé se trouvaient au village voisin. »
La romancière italienne possède cette tendre ironie qui ne cache pas un vrai optimisme mais évite de tomber pour autant dans le mièvre.
Une saison douce se savoure comme un bonbon légerement acidulé d’une profonde et salutaire humanité.