Véritable laborantin de la musique électronique, Erwan Castex, alias Rone, a toujours cherché de nouvelles textures musicales et sait se renouvelle avec chaque projet, grâce à des rencontres à la croisée des arts.
Artiste majeur de la scène électronique française, Rone a en effet obtenu, lors des derniers césars, la reconnaissance du 7ème art pour sa BO envoûtante et hypnotique de La nuit venue, avec son formidable travail sur la composition sonore du film qu'on avait relevé dans notre chronique de l'étonnant premier long métrage de Frédéric Farrucci.
Les 25 et 26 juin dernier, c'est aux côtés de l'Orchestre national de Lyon, du chœur Bostgehio et de la pianiste Vanessa Wagner que Rone a revisité ses œuvres phares pour un projet intitulé L(OO)PING.
On était à la première soirée vendredi soir et ce fut un moment assez grandiose qu'on vous relate de suite :
« J'ai l'exaltante sensation de préparer une acrobatie vertigineuse
dans un monde qui m'est étranger, un "Looping" en apesanteur
où mes machines feraient corps avec l'Orchestre national de Lyon
sous la baguette du maestro Dirk Brossé. »
Rone dans ses notes d'intention du concert L(oo)ping
Crédit : Kévin Buy
C'est à l'occasion d'un concert remarqué à la Philharmonie de Paris en 2017 que Rone entame une collaboration avec le compositeur et orchestrateur Romain Allender.
Ensemble ils donnent naissance à Motion, une première œuvre orchestrale aux côtés des Siècles.
Rone prend alors conscience de la possibilité de donner un sens nouveau à son œuvre en utilisant une grammaire peu naturelle pour lui : celle de l'orchestre symphonique qui ont conduit à ce concert donné avec l'Orchestre National de Lyon pendant plus d'une heure trente.
Crédit : Kévin Buy
Avec ce formidable spectacle L(oo)ping, Rone est parvenu à se nourrir de l'énergie puissante dégagée par l'Orchestre national de Lyon pour proposer des relectures aériennes et ludiques de ses œuvres phares.
Aux côtés de Rone, des artistes qu'il connaît bien – le quatuor vocal féminin Bostgehio déjà présent sur l'album Mirapolis, et des complices du label InFiné : la pianiste classique Vanessa Wagner qui jouait sur Motion et le producteur mexicain, collaborateur de longue date, Cubenx, qui l'assistait pour travailler le son de l'orchestre en direct.
Crédit : Kévin Buy
Romain Allender aura assurément permis de faire le lien entre l'orchestre et les machines de Rone : on aura admiré comme il se doit le beau travail qui a été effectué oour arranger et réorchestrer les morceaux.
L(OO)PING: ça n'était pas Rone et son orchestre, mais vraiment plusieurs artistes à part entière qui mêlaient avec une grande fluidité et virtuosité leurs propres univers.
Portée par la richesse des couleurs, des sonorités et de l'expressivité offertes par les instruments classiques, Rone transfigure sa musique pour lui donner un nouveau souffle.
Crédit : baz'art
C'est sûrement en partie dû au talent d'arrangeur de Romain Allender ainsi qu'à celui d'orchestrateur de Jehan Stefan Legros (c'était déjà lui sur Kaamelott et sur l'hommage à Ennio Morricone pendant les Victoires de la musique classique) que le concert fut aussi réussi.
L'alliage entre ces sonorités contemporaines et la puissance symphonique de l'ONL était une merveille et certains passages portait en elle une dimension vraiment féérique...
On peut dire que les machines faisaient vraiment corps avec l'orchestre mené de main de maitre par le chef d'orchestre Dick Brossé !
crédit photo: baz'art
Rone, aura en tout cas, proposé, au cours de ces deux soirées, à un public plutôt jeune et rapidement conquis, de l’accompagner dans une exploration de son univers et de ses influences dans des revisites parfois raccourcies, d'autres fois allongées de ses titres les plus emblématiques de son riche et diversifié répertoire.
La magie a rapidement opéré et le public plongeait avec délectation et ferveur dans son univers musical.
Ici, des évocations de l'univers 7eme art à la Tim Burton, là des tonalités qui pourraient faire penser à du Hans Zimmer, les amateurs de musique très cinématographiques étaient forcément aux anges.
Crédit : Kévin Buy
La musique électronique a ainsi pris toute sa place à l'Auditorium de Lyon, entre expérimentation et reprise de "tubes" du maestro de la musique électronique, quelque part entre (légères) improvisation et performance plus que maîtrisée!
Rone expérimente et ose tout*, et le réussit au centuple et pour paraphraser Audiard, c'est bien à cela qu'on reconnait ce génie de la musique contemporaine .
*Rone a récemment sorti un disque Rone & Friends où il revisite certains de ses titres avec des artistes pop comme Dominique A, Flavien Berger, Yaël Naim