Critique cinéma : Cigare au miel : l'émancipation d'une jeune fille coincée entre deux cultures
En salles ce mercredi 6 octobre, « Cigare au Miel » est le premier long métrage de Kamir Aïnouz, demi soeur de l’algéro-brésilien Karim Aïnouz, réalisateur du formidable "La vie invisible d’Euridice Gusmao"
Situé au début des années 90, , « Cigare au Miel » est le récit du passage à l’âge adulte de Selma, pris dans une double culture, la française où elle est née et l'Algérienne, d'où viennent ses parents.
Avec ce joli récit initiatique qui sonde les affres du désir et de l'émancipation d'une jeune fille face à un carcan parental aimant mais trop rigide, et à une double nationalité qu' elle a un peu de mal à cerner, Kamir Aïnouz s'inscrit dans la lignée des réalisatrices franco Maghrébines comme les excellentes Mounia Meddour (Papicha) ou bien encore Maryam Touzani, cinéaste du beau Adam l'an passé .
Le film de Kamir Ainouz est sans doute moins puissant et plus doux que celui de ses comparses précitées, mais il n'en demeure pas moins profond et d'une grande sensibilité.
La réalisatrice suggère que le sexe est avant tout une question de désirs intérieurs, tout en prenant soin de ne jamais sexualiser gratuitement le corps de sa jeune protagoniste.
Selma aura des rapports sexuels réels avec des hommes qui ne sont pas exactement ceux de ses rêves, et la déception qu'elle ressentera sera très finement amenée au détour de séquences à la fois cruelles et tendres.
Zoé Adjani , la nièce de qui vous savez, est étonnante de maturité et de naturel dans son deuxième rôle principal après Cerise de Jérôme Enrico en 2015, et parvient à conserver une part de mystère et d’insondable même à la toute fin du film.
Les parents, l'élégante Amira Casar et le toujours charismatique Lyes Salem, père qui se veut libre et féministe mais qui progressivement va se rendre compte un peu trop tard de la soumission des femmes de sa vie, sont également d'une très grande justesse.
Dans ce beau film plus audacieux qu'il en a l'air de prime abord, et malgré une dernière partie qui se délite un peu Cigare au miel Kamir Ainouz nous montre avec ce qu'il faut de justesse et de sensibilité la difficulté des femmes élevées entre deux cultures à se faire accepter et réussir à ne pas paraitre ni trop libre ni trop coincée.