Avec L'innocent le déjà culte acteur-réalisateur Louis Garrel s’empare d’une intrigue à mi-chemin entre film de braquage et comédie sentimentale.
Le quatrième long-métrage de Louis Garrel a réalisé l'ouverture du Festival Lumière le 15 octobre dernier
On a rencontré Louis Garrel à cette occasion afin qu’il nous touche quelques mots sur ce qui est de l'avis de tous son meilleur film :
Un polar viriliste devenu au fil de l'écriture un polar.... comique et sentimental
Au début, je voulais seulement faire un polar. Avec Tanguy Viel au scénario, qui n'avait jamais écrit pour le cinéma, on voulait vraiment faire un polar avec de vrais personnages pris dans toutes sortes d’aventures, un film de filature jusqu’à une vraie scène de casse, mais en désamorçant le côté viriliste du polar.
Mais au fur et à mesure de l’écriture, cela s’est transformé en polar comique et sentimental ; un polar de personnages donc, et l’enjeu était de parvenir à 4 personnages qui soient suffisamment équilibrés.
Je cherchais en fait à revenir à un premier degré enfantin du spectacle, retrouver le plaisir primal qu’on éprouve devant un film d’aventures ou de braquage…
Mes protagonistes sont donc traversés par de grands sentiments d’amour et de filiation, mais au sein d’un film qui reste toujours ludique.
On a donc voulu écrire des personnages suffisamment forts pour pouvoir les emmener dans des situations rocambolesques, et que les deux s’équilibrent.
On a tenté de trouver une certaine originalité, on a joué avec les codes du genre, puis on a davantage poussé les personnages avec ma seconde coscénariste Naïla Guiguet.
L’idée, c’était de faire en sorte que les acteurs développent une vraie affection pour leur personnage ; je sais moi-même à quel point c’est important. Il fallait les idéaliser, les rendre touchants, tendres, héroïques. C’est sans doute ce qui a été le plus difficile."
"Déjouer les croyances du spectateur
Mon but est avant tout de déjouer les attentes du spectateur, de faire en sorte qu’il ne sache plus sur quel pied danser. J’adore ça au cinéma, et j’ai notamment tenté de le reproduire dans la fameuse scène du braquage ; d’un coup on ne sait plus qui se joue de qui, on se demande même si les manipulateurs ne sont pas piégés eux aussi.
Surprendre, c’est l’objectif premier d’une histoire mais c’est souvent laborieux à l’écriture.
Aussi car la surprise ne doit pas effacer l’apparente légèreté du récit. Mon souhait le plus cher lorsque je réalise un film c'est espérer que le spectateur développera un lien secret avec. Pour cela, il ne faut pas que les intentions soient prémâchées ; il faut veiller à garder une constante légèreté dans l’action.
C’est ce principe qui fonctionne sur moi en tant que spectateur : à un moment donné je suis ému comme par surprise, et alors j’ai l’impression d’être le seul à m’émouvoir. Par ailleurs je fais confiance à cette idée de « croyance » propre au cinéma.
C’est-à-dire que dans cet univers artificiel et très codifié, tout d’un coup surgit une émotion vraie ; non seulement de la part des personnages mais aussi des spectateurs, qui sont émus quand bien même ils savent que tout est faux
.Le choix de Lyon comme film du tournage
Le centre-ville de Lyon est très historique, il rappelle l'Italie, avec les tons ocre, jaune et rose des maisons. C'est une ville qui a vraiment du charme,
J'ai passé mon temps à dire à l'équipe : 'On n'essaie pas de faire comme l'industrie américaine, il faut vraiment faire un film qui soit à Lyon'. Donc je disais : 'C'est du Michael Mann, mais de Rhône-Alpes ( rires) '.
De beaux personnages féminins
En fait, je ne voulais ni tomber dans le pathétique des rapports mère-fils qui peuvent vite devenir lourds au cinéma, ni dans la testotérone des polars habituels. On a donc voulu écrire des personnages suffisamment forts pour pouvoir les emmener dans des situations rocambolesques, et que les deux s’équilibrent.
Noémie (Merlant, ndlr) s’est vraiment découvert un pouvoir comique sur le tournage et on voyait moins Anouk Grinberg au moment du tournage, elle avait été aussi beaucoup enfermée dans des rôles endolories au théâtre.
Je crois qu’elles étaient très heureuses ! Ce sont aussi des personnages qui s’amusent à jouer en permanence, comme au théâtre.
L’Innocent de et avec Louis Garrel, actuellement en salles. Lire notre critique du film.
crédit photo Fabrice SCHIFF
Merci à Ad Vitam films