Les beaux reves perdus de Jennifer Egan
Voilà un roman que j'ai lu depuis plusieurs semaines et que j'ai beaucoup apprécié, mais dont je me suis aperçu récemment que je l'avais étrangement passé sous silence. A l'approche des fêtes de Noel, et à l'heure où le livre papier reste placé en numéro 1 des cadeaux adultes prévus sous le sapin, il est donc temps que je vous touche un mot ( voire même deux, vous me connaissez) sur un roman américain qui pourrait très bien prendre place sous le sapin, Qu'avons- nous fait de nos rêves? de Jennifer Egan.
J'ai entendu parler de ce livre peu de temps avant qu'il ne sorte, le titre- magnifique- avait attiré mon attention, j'ai su juste après que l'auteur avait obtenu le très prestigieux Prix Pullitzer 2011 pour ce roman, et l'éditeur Stock me l'a gentiment envoyé pour que je puisse vérifier par moi même qu'il n'y avait pas que le titre qui était beau.
Alors, pour bien rentrer dans ce livre, il faut accepter de se laisser embarquer sans trop savoir où l'on va. Car Qu'avons nous fait de nos rêves ?est un puzzle narratif qui se joue de toute chronologie. on est balladé d'un chapitre dans le San Fransisco des années 70 au Manhattan des années 2020.
Qu’ont-ils fait de leurs rêves, tous ces gens que nous voyons sombrer dans le morne ressassement de leurs échecs passés ? se demande la romancière dans ce magistral récit choral, qui nous fait passer d'un personnage à l'autre (Sasha, Bennie et leur entourage plus ou moins proche), d'une décennie à l'autre, afin de mieux faire ressentir le passage à l'âge adulte, la fuite du temps.
Jenniffer Egan, dont je n'avais jamais entendu parler, nous fait partager avec empathie et finesse la désillusion, mais aussi l’aptitude de certains à parvenir à se maintenir hors de l’eau, en dépit des échecs du à l'époque, tellement plus anxiogène que celle d''il y a 40 ans.
Les personnage du romans s'efforcent vaille que vaille à trouver un équilibre, sans être dupes de leurs faiblesses et de leurs lâchetés. Quiconque préfère les sagas longues d'une vie dans son entier pourra être frustré, car le livre reste cantonné à de courts moments de l'existence d’une multitude de personnages qui se croisent et se séparent continuellement pour former un grand et même récit.
Comme une fenêtre ouverte sur le monde, chacun d’entre eux présentent leur univers, leur travail, leur passion. Puis, ils disparaissent pour mieux nous retrouver bien plus tard dans leurs vies, et nous montrer comment ils ont évolué et comment leurs rêves d’alors se sont généralement envolés.
Absolument maitrisé de bout en bout, ce roman mélancolique sur la perte des idéaux dans nos sociétés modernes est assurément des grands romans phares de cette rentrée littéraire 2012.