Baz'art  : Des films, des livres...
29 février 2016

Saint amour : le Kerven Delepine 2016 est plutôt un bon cru..

 

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Bien qu'étant de la même génération, celle qui avait 20 ans lorsque cet OVNI télévisuel est arrivé sur nos petits écrans, je ne fais pas partie de ceux  (j'en connais un certain nombre) qui sont devenus très vites fous de l'émission Groland, trouvant  l'idée  de base, et quelques  scénetes certes bien trouséees , mais tout en étant très vite lassé par un esthétisme assez laid et qui érige le glauque et le décalé en valeur étalon.

Du coup, je suis passé à coté de l'éclosion au cinéma du tandem Kerven/ Delepine, les instigateurs de Groland. Il faut dire que d'après ce que j'avais pu voir ou lire, leurs films, Aaltra (2004) et Avida (2006), sous leurs oripeaux surréalistico-dadaïstes, et Louise-Michel (2008), prolongeaient le même univers télévisuel, en essayant de prôner une poésie du glauque et de la misère, d'une façon complètement décalée et assez barrée qui me laisse souvent de marbre, moi le fan de l'épique et du lyrisme au premier degré, à la Lelouch ou Dolan, bref des univers bien différents de ceux de Kerven/Delepine .

Et si j’ai raté le pourtant incontournable Mamuth, j’étais allé voir Le Grand soir en 2012  et le résultat m'avait semblé peu convaincant, avec un  scenario qui manquait d'envergure et d'unité.  Définitivement, à mes yeux, et ce sentiment s’est conforté avec l’ovni Near Death Expérience, le gros défaut du cinéma de Kerven Delepine, est de privilégier l'excentricité, la gaudriole   et l’ambiance  à la profondeur du récit et des personnages, souvent réduits à du cocasse et du décalé.

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Bref, tout cela pour dire que je ne me précipite pas dans les salles pour voir les longs métrages du tandem grolandais, mais concernant "Saint Amour" , leur dernière œuvre en date qui sort mercredi dans les salles,  je n’ai pas pu y échapper vu que c’était le film surprise du dernier ciné-brunch du Comoedia  fin janvier, et que dès que j’ai vu  apparaitre au générique du début le  nom du distributeur- le Pacte j’ai d'emblée deviné que j’allais partir avec Benoît Delépine et Gustave Kervern sur les routes viticoles de France..

Ce "Saint Amour",  j’en avais entendu parler de longue date, car une bonne partie du tournage a eu lieu dans ma région, celle du Beaujolais, première étape de ce tour de France des vins que vont entamer un trio composé de Gérard Depardieu ,Benoît Poelvoorde dans les rôles d’un père et d’un fils agriculteur, auquel s’ajoute le nouveau  venu dans leur monde Vincent Lacoste dans le rôle d’un chauffeur de taxi parisien  obligé de se coltiner les deux uberlulus forcément avinés…

 Passé vingt premières minutes dans le salon de l’agriculture qui m’ont malheureusement fait penser aux pires travers de l'univers grolandais, avec ce côté faussement provocateur et à l’image particulièrement ingrate (certaines scènes au salon de l’agriculture ont été tournées en caméra caché) , nous voila parti dans un virée alcoolisée à travers les routes viticoles de  France, destinée à relancer l’amour filial et à trouver l’amour tout court auprès des femmes rencontrées sur le trajet.

 

Il faut savoir que l’idée de départ du duo Kerven Delepine était de circonscrire une route des vins aux différents stands viticoles du Salon de l’Agriculture, et j’avoue, à la vision du film être soulagé que les contraintes de production aient empêché le projet de se concrétiser,  tant "Saint amour"  commence à prendre de l’envergure  et un vrai intérêt dans la partie road-movie,  où le trio va faire quelques rencontres féminines plus ou moins inattendues et décalées.

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"Saint amour" n’échappe pas toujours aux défauts inhérents du cinéma du duo, à savoir une succession de sketches inégaux qui manquent de liant et de fil conducteur, et des personnages qu'on aimerait voir  dôté d'un peu plus d'épaisseur,  mais le dernier long métrage des (faux) frères terribles du cinéma français parvient, sur la longueur,  à instiller un vrai charme et de beaux moments de grâce, notamment avec l’apparition de beaux personnages féminins, comme celui joué par la délicieuse Solène Rigot ou la toujours formidable Céline Salette- même si elle n’arrive qu’après une heure vingt de film !!

 

Du coup, on jetera un voile pudique sur les autres rencontres, celles qui  paraissent plus ternes, moins incarnées, comme celles avec  Izia Higelin ou Chiara Mastroani qui viennent juste faire un petit caméo sans consistance, sans oublier  celle faussement drôle avec un Michel Houellebecq qui personnellement, nous agace de plus en plus..

 Mais Saint Amour vaut avant tout et surtout pour la confrontation de ces deux comédiens colossaux sans doute au sommet de leur artBenoît Poelvoorde et Gérard Depardieu, ces monstres sacrés qui parviennent à ne jamais tirer  la couverture à eux et à proposer des compositions finalement plus émouvantes que drôles…

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Sur le papier, on aurait pu s’attendre à ce que Saint Amour soit un véhicule permettant le cabotinage éhonté  de ce duo de choc, avec le vin en moteur  , mais le film n’est pas vraiment l’ode à l’ivresse attendu et plus une jolie chronique familiale entre un père et son fils qui tentent  à se parler malgré la pudeur inhérente au monde rural..

Le film fait un peu penser au Singe en hiver d’Henri Verneuil redécouvert lors du Festival Lumière 2013, avec ce rapprochement de deux générations d’écorchés vifs autour de l’ivresse, ou même aux Valseuses de Bernard Blier, surtout dans sa partie finale, bien plus en tous cas qu'à  Mondovino ou Sideways des vrais films sur la route des vins auquel le pitch aurait pu faire penser à l'origine.

Car, et c'est la bonne surprise de ce Saint Amour  :  Benoît Delépine et Gustave Kervern,  au lieu d'aller chercher comme parfois  la provocation à la petite semaine,  tentent-  et réussissent- leur  première véritable incursion dans la chronique familiale tragi comique, avec ici et là quelques bonnes trouvailles visuelles et scénaristique- notamment celles concernant- les 7 étapes de l’ivresse.

Le film est aussi mis en valeur par la musique composée par Sébastien Tellier, dont les nappes orchestrales  insufflent un brin de douceur salutaire cette balade touchante et décalée.

Moins radical et décalé  que les autres films du duo, ce Saint Amour pourrait séduire les réfractaires à l’univers de Kerven Delepine , mais également, forcément en effet miroir, certainement décevoir les fans incontestables du duo et de Groland… 

 

Commentaires
A
J'avais bien aimé leur opus précédent. Et même si le thème ne me fait pas palpiter d'excitation, le casting me mènera sans doute au ciné pour le voir !
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M
Merci pour cet article, je suis impatiente de voir ce film, la bande-annonce est très sympa, j'espère que ça va être dans l'esprit de "Mammuth" qui m'avait beaucoup fait rire.<br /> <br /> J'avais vu "Near death experience" lors de sa sortie au Comoedia en présence de Gustave Kervern, je n'avais pas réussi à bien accrocher mais j'avais apprécié le côté décalé. La rencontre avec Gustave Kervern en revanche était très drôle, il avait donné des anecdotes désopilantes sur Michel Houellebecq entre autres. <br /> <br /> Vivement la sortie chez moi !
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