Patients : le merveilleux livre de Grand Corps Malade devient un non moins merveilleux film..
Il y a quelques années, j'avais écrit un billet sur le livre écrit par le slameur Grand Corps Malade, "Patients" qui sortait alors en grand Format.
Il faut vous dire que ce billet est incontestablement une de mes chroniques littéraires les plus lues depuis le début du blog,et si j'ai eu longtemps du mal à comprendre pour quelles raisons celui ci marchait mieux que les autres, j'ai eu ma réponse il y a quelques semaines lors de l'avant première publique du film adapté du livre, un film qui porte le même nom que le livre et qui sort en salles dès demain.
En effet, lors de cette projection, comme sans doute dans la cinquantaine ( excusez du peu) d'avant premières que l'équipe du film a réalisé pour promouvoir ce formidable film, j'ai appris que le livre était étudié depuis sa sortie dans de nombreuses écoles d'infirmières ou de kinésithérapie, tant cette publication est un fabuleux hommage au monde médical, et plus que d'autres sur le sujet, insiste sur le dévouement et la compétence des équipes soignantes qui s’occupent de ces fameux patients du titre .
Mais, plus largement encore que le simple personnel médical, Patients rend un précieux hommage à toutes les personnes qui ont soutenu, consolé, parfois même bousculé l'artiste, durant les longs et douloureux mois de rééducation que Fabien a connu, suite à son terrible accident vécu il y a une vingtaine d'années.
Voilà précisemment ce que Fabien Marsault- dit grand corps malade- raconte dans son livre et maintenant dans ce film qu'il adapte avec son ami et complice Mehdi Idir, le réalisateur de quasiment tous ses clips ( sauf un qu'il estime d'ailleurs raté :o)
Patients, le film, comme l'était le livre, est avant tout le récit raconté avec sobriété et singularité de ce combat de tous les instants qui voit naître de magnifiques amitiés.
Au début du film, on voit à quel point chaque journée passée dans ce centre n'est qu'une suite de combats permanents :première petite autonomie avec un fauteuil roulant électrique, à moins que l’aide-soignant ait oublié de le charger pendant la nuit, et que l’on se retrouve seul au milieu de sa chambre sans pouvoir rien faire car tout l’étage est au réfectoire, une fois de plus prisonnier de son corps, impossibilité de tenir une télécommande, alors que horreur, l'aide soignant a laissé la TV sur M6, avec, après les clips, l'émission M6 boutique que Ben- (contrairement au livre, Grand Corps Malade a souhaité changer le prénom de son héros pour que le film ne soit pas vu comme un biopic qui aurait brouillé son image)- est obligé de se farcir jusqu'au bout.
Car, pour un tétraplégique complet ou incomplet, se laver, s’habiller, manger, aller aux toilettes ou même téléphoner, le moindre geste a priori anodin pour un valide s'avère être une épreuve terrible ...
Porté par la même bienveillance et la même humilité qui rendaient son livre déjà unique, son film est porté par la même sincérité et le même regard plein de tendresse mais sans complaisance que l'on s’attache autant à ces jeunes protagonistes fauchés en plein vol alors que la vie leur tendait les bras.
Grand Corps malade, qu'on a toujours célébré pour qualité de sa plume, toujours subtile et surprenante, soigne ici les dialogues, parfois différents du livre, et rend son film truffé de répliques aussi drôles que justes sur ces jeunes qui n'ont plus que la tchatche et le courage pour ne pas baisser les bras.
Le film insiste avec pudeur et sensibilité sur la patience et le courage qu’il faut à ces êtres pour arriver à renaître petit à petit, tout cela en continuant à faire preuve de beaucoup d’humour.
Grand Corps Malade est ressorti de cette épreuve avec un vrai amour pour la vie et une féroce envie de la croquer à pleine dent, lui permettant d'apprécier pleinement le moindre petit moment de joie, comme seuls les grand respacés de terribles épreuves peuvent le faire et tient une nouvelle fois à le témoigner avec ce film, sans pour autant que cette adaptation donne l'impression d'être une redite comme le sont parfois les adaptations de livre par leurs propres auteurs.
Patients témoigne, comme rarement une oeuvre ne l'avait fait avant lui, sur.ces êtres humains, peut-être différents des valides physiquement mais mais pas intérieurement, ce que Patients prend soin de le rapeller de manière parfois frontale, d'autres fois plus poétique.
Concernant le casting de son film, Grand Corps Malade n’avait qu’une exigence : choisir des têtes nouvelles, des comédiens que l’on voit peu mais dont les qualités seraient telles que, in fine, il puisse se montrer fier de les avoir choisis et c'est peu de dire que le pari est réussi pour toutes ces révélations qui explosent littérallement à l'écran, notamment avec le .premier rôle Pablo Pauly, remarquable dans le rôle de Ben, est un comédien déjà présent dans pas mal de films mais jamais dans un rôle de premier plan.
Quant àux autres, je pense à Soufiane Guerrab, l’interprète de Farid, pour Moussa Mansaly, qui joue Toussaint, pour Franck Falise, l’interprète de Steeve, pour Nailia Harzoune, Samia dans le film, tous devraient logiquement se retrouver dans les prénominés des prochains césars, sinon je n'y comprends plus rien :o)
Bref, des comédiens à l’écriture en passant par les choix de mise en scène, Patients fait un sans faute total, et l'on souhaite à ce film bouleversant qui aborde de façon unique le monde du handicap de rencontrer un très nombreux public tant ce film est l'une des pépites de ce premier trimestre au cinéma.