Papicha (critique) : One, two, three, viva l'Algérie.. au féminin !
Sensation du dernier festival de Cannes lors d’une décidemment excellente sélection "Un certain regard" « Papicha», premier long métrage de l’algérienne Mounia Meddour, arrive sur nos écrans dans une semaine, le 9 octobre prochain.
Soyons d'emblée clairs : il ne faut absolument pas passer à côté de cette petite bombe du cinéma nord-africain, à ranger du côté de la Belle et la meute de Kaouther Ben Haniaou plus récemment de Sofia de Meryem Benm'Barek.
"Papicha", c’est le terme plutôt tendre que l’on utilise pour qualifie les jeunes et jolies filles qui vivent à Alger.
Celles ci sont particulièrement bien représentées dans le film de Mounia Meddour qui se propose d’en suivre plus particulièrement quatre d’entre elles dans le Alger du début des années 90 quand l’extrémisme religieux commence à dangereusement pointer le bout de son nez.
Parmi ces quatre jeunes filles, qui aspirent à une indépendance salutaire, mais si difficile à conquérir dans cette société où les entraves à la liberté sont partout et notamment aux droit des femmes, on suit plus particulièrement Nedja.
Cette jeune et très belle fille de 18 ans qui rêve de devenir styliste et qui fait le mur de son internat pour aller dans les boites de nuits vendre à des filles de mauvaises nuit ses dernières création a un objectif à court terme : créer un défilé dans son école, ce que les ayatollah de la religion ne verront évidemment pas d’un très bon œil, eux pour qui la modernité et la mode occidentales ne sont franchement pas bien vues.
Heureusement, la jeune femme va pouvoir aider sur son groupe de copines à la vie à la mort pour qui l’entraide et la sororité ne sont pas des mots en l’air
Avec une mise scène très incarnée et vibrantes d’émotions en tous genres, Mounia Meddour est toujours proche de ces jeunes filles qu’elle adore et qui sont visiblement ressemblantes à celle qu’elle a été et à celles qu’elle a côtoyé.
Résultat : ces jeunes filles échappent toutes à l’archétype, leurs personnalités sont complexes et bien fouillées, entre Wasilla, Kahina et Samira dont l’évolution dramatique vont franchement évoluer au fil des quelques semaines qui vont tout faire basculer dans leur vie.
Mais surtout la caméra, rythmée, intense, ne lâche jamais d’une semelle Nedjma, dans son combat permanent à voir son pays passer de la violence insidieuse à la violence effective envers les femmes, ainsi que dans son indignation à sentir le regard accusateur ou/ et libidineux (le dégoutant Mokhtar, gardien de nuit de l’université qui ne l’aide que de façon purement intéressée) que les hommes portent sur elle et ses amies.
Papicha est avant tout fière d'être algérienne (le fameux "one two three, viva l’Algérie" , qu’on entend dans les stades de foot et que les jeunes filles clament à plusieurs reprises dans le film) et entend transcrire ses rêves dans la réalité en dépit d'un contexte si délétère.
Et ainsi immergé dans sa lutte sans merci, le spectateur, ravi et tendu à la fois ressent tout ce qu’elle vit.
L’empathie pour ce formidable personnage ne serait pas aussi prégnante sans le talent de la comédienne Lyna Khoudri ( qui épate aussi dans la série Les sauvages, actuellement sur canal+ ) pour l’incarner.
Dire qu’elle irradie chaque plan de sa fougue et de son envie de vivre malgré tout est un doux euphémisme … et dire que Papicha est un film formidable qui terrifie et donne un vrai coup de peps à la fois l’est tout autant !!
PAPICHA Bande Annonce