Une colonie : un très joli film québécois qui transcende les rives balisées du teen movie..
La réalisatrice québécoise Geneviève Dulude-De Celles explore une période charnière, celle du passage de l'enfance à l’adolescence avec Une colonie, son tout premier long métrage de fiction, qui sort en salles le 6 novembre prochain, après un court métrage ( la Coupe ) et un documentaire (Bienvenue à F.L.) qui abordait déjà cette même thématique.
Dans une colonie, on y suit une jeune fille de douze ans Mylia, qui s’apprête à quitter sa campagne natale pour la grande écoleet qui va prendre conscience de la dureté du monde qui l'entoure en étant confrontée à la rugosité de l’adolescence, à ses petites joies et grandes épreuves.
Au gré d'une année scolaire qui la voit entrer au collège ( le secondaire au Québec) Mylia va peu à peu apprendre à s’ouvrir aux autres, des caramades de classes un peu blasés et condescendants, et tenter d' être acceptée par eux mais tout en comprenant qu'il ne faut pas se forcément plier aux conventions et aux désirs d'autrui et réussir à se frayer un chemin bien à soi, en dehors des conventions.
Récit d'apprentissage a priori classique, "Une colonie" touche souvent très juste, par son parti pris de ne jamais romancer son intrigue et de rester au plus près de la justesse de ses personnages et des situations qu'il traverse et ne pas éluder les difficultés de cette période toujours un peu houleuse, à la fois interminable et nécessaire à sa construction identitaire.
La réalisatrice a visiblement puisé dans ses souvenirs d'enfance pour sonder la fin de l'enfance et pose sur cette période un regard empathique, qui évite tout cliché, hystérie ou sentimentalisme.
Geneviève Dulude-De Celles sait en effet parfaitement capturer les doutes et les non dits de cet apprentissage parfois douloureux et le réalisme de ces petits instants de bonheur ou de malheur fugace sonne toujours très vrai.
Geneviève Dulude-De Celles réussit à insuffler une touche personnelle à un sujet très souvent abordé au cinéma, en teintant sa chronique adolescente d'une couleur douce-amère et d'une délicatesse particulièrement prégnante.
La rencontre de Milya avec Jimmy, un Abénaki qui vit sur la réserve voisine, permettra à la jeune fille de mieux accepter sa propre différence et de voir à quel point certaines communautés peuvent souffrir d'un rejet, voire d'un racisme ambiant hérité du passé colonialiste du Québec, évoqué dans le titre du film.
Si tous les jeunes acteurs sont assez éblouissants ( notamment la toute jeune Irlande Côté,dans le rôle de la petite soeur de Miya ) le film repose avant tout sur les épaules de la jeune Emilie Bierre, qui a visiblement une déjà belle carrière au Québéc ( elle est notamment l'héroïne d'une série connue) et qui montre ici un jeu déjà très mature, toute en retenue et en nuances, et une faculté à soutenir certaines scènes d'une grande puissance émotionnelle.
Une colonie, au charme a priori modeste mais incontestable démontre sans aucun doute possible le talent d’une auteure dont on espère suivre la carrière dans nos contrées françaises.
A noter que le film est projeté en 'avant première au Cinéma le Balzac ( Paris) ce 29 octobre 2019 à 20h