Festival America : "La ligne de nage" : les belles fissures de Julie Otsuka
« Vers le mitan de l’été, l’attrait de la nouveauté s’est dissipé, et nous tournons notre attention peu à peu vers d’autres choses que la fissure : l’installation des nouvelles pommes de douche écologiques dans les vestiaires, la disparition des luniettes de piscine de Susan, la directrice administrative de l’université (affaire toujours non élucidée), une histoire de mains baladeuses à la ligne trois (l’agresseur supposé ayant été jeté dehors par les membres de la sécurité en moins de cinq minutes), une bagarre à la ligne sept (« Il a refusé de me laisser le doubler ! »), le nouveau maillot psychédélique avec des motifs cachemire arc-en-ciel d’Angelita, qui date d’environ 1969 (consensus à la piscine : trop génial !), la vague de chaleur caniculaire là-haut – les réservoirs qui se vident, les jardins parcheminés, les petits chiens qui tirent la langue -, qui ne donnent aucun signe de vouloir se calmer. »
Lauréate du Femina étranger il y a dix ans avec Certaines n’avaient jamais vu la mer, la romancière américaine d'origine japonaise Julie Otsuka renoue avec un style qui n’appartient qu’à elle : une succession de petites phrases très courtes, une succession de personnages, en l’occurrence dans la première partie, les personnes qui fréquentent une piscine en sous-sol.
L’autrice arrive alors à brosser une petite communauté, des nageurs aux maîtres-nageurs, des experts aux agents administratifs.
Puis dans sa seconde partie, "La ligne de nage" vire au texte poignant sur la fin de vie d'une vieille dame atteinte de démence.
La ligne de nage explore la fin de vie et la perte de mémoire dans un roman mélancolique mais assez léger en même temps qui nous plonge dans des fissures à différentes dimensions. Car les fissures au fond de la piscine font écho à celle s la tête d'une vieille dame.
Alice, qui nage dans cette piscine depuis de nombreuses années, semble avoir l’esprit dans le même état que le fond de la piscine.
On notera que dans cette deuxième partie, le nous laisse place au tu. Le tu est celui de la fille d’Alice, la narratrice, mais qui a besoin du tu pour regarder ce qui se passe mais ne pas s’y perdre.
Car Alice a quitté la piscine pour un établissement spécialisé dans la gestion des maladies neurologiques. Le texte, empreint de mélancolie, explore cet espace hors du temps qu'est la fin de vie quand la mémoire s'échappe, et les difficiles relations entre une mère et sa fille
Un roman aussi pudique que très touchant!
JULIE OSTUKA SERA PRESENTE AU FESTIVAL AMERICA du 22 au 26 septembe 2022 .
après Certaines n’avaient jamais vu la mer, la romancière américaine @JulieOtsuka revient en force avec publie un livre poignant sur la fin de vie d'une vieille dame atteinte de démence. La ligne de nage à découvrir aux éditions @Gallimard . et bientôt @FestivalAmerica pic.twitter.com/1qVrwxksZv
— Baz'art (@blog_bazart) September 4, 2022