Le prénom vs Carnage: Cocorico!!!
Lors de la sortie du film Le Prénom le mois dernier, beaucoup d'observateurs l'ont comparé au
dernier film de Roman Polanski, Carnage. En effet, les similitudes entre les deux films sont nombreuses: adaptation d'une pièce de théâtre à succès, huit clos (ou presque), engueulades et clash, soit, dans le Prénom, entre amis, dans "Carnage", entre parents d'élèves d'une même école.
De la scène à l'écran, les pièces à succès ne manquent effectivement pas. Elles ont eu des fortunes diverses, de Mélo en passant par Le Père Noël est une ordure ou Cuisines et Dépendances, le chef d'oeuvre du duo Bacri/Jaoui.
Afin de pouvoir comparer du mieux possible les deux films, j'ai donc eu envie de me les enchainer à la suite, en louant le DVD de Carnage juste après avoir vu le Prénom au cinéma, histoire de rédiger une sorte de billet match, comme je l'avais fait le mois dernier pour les dessins animés. Et taisons immédiatement le suspense : contrairement à la majorité de ceux qui ont vu les deux films, j'ai été bien plus séduit par la comédie des débutants Alexandre de La Patellière et Mathieu Delaporte que par le film du vieux routier Polanski.
Le Prénom, gros succès de la saison théâtrale 2011, passe très logiquement au grand écran dans une comédie de boulevard réalisée par ses propres auteurs, Mathieu Delaporte et Alexandre de La Patellière. Même si je n'ai pas vu la pièce, le film ne donne pas l'impression d'être un simple copié-collé mais une adaptation certes fidèle , mais qui s'affranchit des contraintes théâtrales d'une histoire de prénom qui vire au jeu de massacre en famille, d'un huis clos infernal où le rire dégénère en règlement de comptes. Tout ça pour un prénom que le fringant Vincent, bientôt papa, soumet à sa sœur, à son beau-frère et à des amis lors d'un dîner.
Dès l'entame du film, rythmé en diable, le huis clos, véritablement passionnant ne laisse pas une seconde de répis au spectateur . "Le Prénom" expose l'hypocrisie de ses personnages, mais n'est pas véritablement noir et sans espoir.
Grâce à des dialogues percutants, et très bien écrits, le film est surtout et principalement très drôle, en se basant sur la mauvaise foi de ses protagonistes et leur plaisir de "se chercher". Le fameux prénom va déclencher des engueulades qui laisseront des traces à jamais. Contrairement à ce que laissait présager la bande annonce, les dialogues sont vraiment bien conçus et les personnages se renvoient du tac au tac des répliques percutantes tels des tennisman se disputant la balle. Une véritable réussite dûs également et peut être surtout grâce à des acteurs excellents, qui connaissaient le texte par coeur pour l'avoir joué sur scène une centaine de fois, et dont la complicité se ressent. Mention spéciale à Charles Berling ( qui est pourtant le seul à ne pas avoir été dans le castingde la pièce), et ici touchant et hilarant, et à Guillaume de Tonquédec, acteur méconnu, à qui le film offre une partition et une scène de bravoure en tous points réjouissante!
LE PRÉNOM : BANDE-ANNONCE Full HD Avec Patrick Bruel, Charles Berling...
2. Carnage :Déjanté, mais raté
Polanski adapte donc ici la pièce de théâtre de Yasmina Reza « les dieux du carnage », et reprend le canevas intitial. Il coince donc deux couples dans un appartement prétextant une altercation entre leurs enfants, quatre personnages qui vont en profiter pour vider leurs sacs et faire ressortir leurs petites rancoeurs. Ce postulat de dépar,t ajouté au pedigree des acteurs et au talent de metteur en scène de Polanski (dont le dernier film, The Ghost Writer était une petite merveille) laissaient augurer un film aussi jubilatoire, si ce n'est plus, que le film français.
Hélàs, passé les dix premières minutes, assez perverses et malsaines, le film lasse très vite de ses dialogues au couteau, bien écrits certes, mais vraiment trop (écrits) et qui sonnent terriblement faux... Polanski n'a pas cherché à déthéâtraliser son film, on a donc droit à du vrai et pur théâtre filmé qui manque clairement de vie (on a l'impression que les acteurs attendent leurs dialogues patiemment dans leurs coins, sans interactivité aucune ) et qui semble être vraiment exagéré et caricatural. Polanski ne trouve jamais la distance, sans doute à cause d’une intrigue pas assez forte pour porter le style habituellement enlevé du réalisateur. La faute sans doute au rythme et aux dialogues plats : cette l'histoire de ces deux couples réglant un conflit qui ne fera que s'envenimer donne une impression de répétition et d'éternel recommencement qui très vite, énerve le spectateur.
CARNAGE : BANDE-ANNONCE VF Full HD de Roman Polanski
VERDICT : Le Prénom est donc une sorte de "Carnage" moins grave et acide, mais qui en fait est bien plus basé sur le rire et l'effet de suspense. Plus fouillé niveau de la psychologie des personnages et de la sphère intime, Le Prénom s'avère, pour toutes ces raisons, bien plus réussi que Carnage.