Focus sur LA FRACTURE - Rencontre avec la comédienne Aissatou Diallo Sagna

lundi 07 février

Focus sur LA FRACTURE - Rencontre avec la comédienne Aissatou Diallo Sagna

Elle fait partie des cinq comédiennes nominées pour le César du meilleur second rôle féminin qui sera decerné le 25 février prochain et comme elle n'avait jamais joué avant, elle faisait d'ailleurs partie de la liste des 32 REVELATIONS 2022 .

Aïssatou Diallo Sagna, puisque c'est d'elle qu'il s'agit, a en effet totalement explosé l'an passé au cinéma sous la caméra de Catherine Corsini dans pour le film LA FRACTURE .

Elle joue une aide-soignante dévouée et face à des comédiens épatants et chevronnés tels que Pio Marmai, Marino Fois ou Valeria Bruni Tedeschi, elle est la vedette surprise du film.

Aide-soignante de profession, elle joue un rôle important dans le film de Catherine Corsini sans jamais pris un seul cours de théâtre, ni même n'avoir jamais rêvé de jouer ou de fréquenter le milieu.

On l'avait rencontré à Paris lors de la sortie du film en salles, retour sur les moments forts de cet échange avec une personnalité qui détonne dans le milieu du 7eme art ..

Aide soignante de profession avant d'être comédienne

« J’ai 38 ans et j'ai fait le gros de ma carrière, dix-sept ans, à l’hôpital Saint-Joseph. Pendant dix ans, j’ai été agent des services hospitaliers, c’est-à-dire que je m’occupais du nettoyage des chambres, du service des repas. Ensuite, j’ai passé le concours d’aide-soignante.

On pouvait avoir jusqu’à 180 passages par jour avec, comme dans le film de Catherine Corsini, de vraies urgences vitales. J’y suis restée sept ans. Aujourd'hui, j'exerce au sein de l’unité médicochirurgicale de garde de l’hôpital des Peupliers, à Paris."

De la salle des urgences aux plateaux de cinéma

"Ce sont des collègues à moi, un peu plus jeune que je ne le suis et qui sont toujours connectés aux réseaux sociaux qui ont découvrent l’annonce du casting. C'était un casting sauvage pour le personnel soignant, sans aucune expérience de jeu. ..

On s'est motivés à y aller tous ensemble. Le jour J, l'amie qui a été convoquée avec moi n'a pas pu venir, elle a annulé à la dernière minute et m'a prévenu . J’étais tranquille à la maison, j’ai failli ne pas y aller. Puis par curiosité je me suis dit, pour une fois qu’on s’intéressait à nous, j’ai voulu aller voir. …

J'ai pris un uber, je suis arrivé à la bourre , je me suis retrouvé dans une pièce avec que des soignants ayant une expérience des urgences, donc j'étais très à l'aise au premier casting.

Au second casting, j'ai rencontré plus longuement la directrice de casting, Julie Allione, ensuite je suis convoquée à un troisième où je vois Pio Marmaï que je ne connaissais pas j'avoue, me donner la réplique avant d'être enfin présentée, dans un quatrième temps, à Catherine (Corsini).

Puis j’ai été rappelée par Catherine début septembre 2020, et c’était parti .

Mais en fait, jespérais juste faire un peu de figuration au départ, je suis assez réservée et cela me suffisait largement .

On peut dire sans que j'arrive vraiment à vous l'expliquer qu'il s’est passé quelque chose lors des différents castings .

Tout cela a fait que Catherine Corsini m’a dit , à un moment somme toute assez tardif du processus de création de son film, qu’elle envisageait de me confier ce rôle d’infirmière destiné, à l’origine, à une actrice professionnelle

Vous savez quoi? je n'ai pas mis longtemps du tout à accepter le challenge (rires)! "

$fracture$

L'excitation d'un tournage de cinéma

"Je me suis organisée à l’hôpital pour prendre un mois de congés sans solde en plus des jours en vue du tournage entre fin septembre et mi-novembre.

Ma cadre de santé m’a d’ailleurs soutenue pour ce film, alors que nous étions pourtant en pleine seconde vague de Covid-19.

J’ai demandé et obtenu un mois de congés sans solde, et je me suis lancée dans cette expérience extraordinaire.

Je n'ai jamais vraiment ressenti de l'appréhension c'était plus de l'exictation pour cette expérience, c'est comme si deux petites mains me poussaient pour me dire " vas y t'inquiète pas!"

C'est vrai que sur le tournage il y a une grosse machinerie avec tous ces techiciens et ces acteurs confirmés qui sont face à toi, mais je ne me suis jamais sentie destabilisée au point d'en perdre tous mes moyens.

J’étais avec les acteurs, eux professionnels dans leur domaine, moi dans le mien, même si c'est vrai, Kim infirmière a plus de responsabilités et de compétences que moi, aide-soignante.

Cette expérience, on peut dire que je l'ai adoré du début jusqu'a à la fin !"

Aïssatou Diallo Sagna (Laura Stevens/Libération)

Un tournage au plus proche de la réalité

Un souci constant de véracité tenait à cœur à Catherine, qui nous posait sans cesse des questions.

Ce que montre le film correspond à la réalité, Catherine Corsini n’exagère rien, ni dans la dégradation des locaux, ni dans l’épuisement du personnel.

Les tenues, les gestes, tout est reproduit avec la plus grande exactitude possible.

Catherine Corsini est une réalisatrice très ouverte aux propositions des acteurs, son objectif était d’être le plus proche possible du réel .

Pour rendre une scène crédible, avec un patient en détresse respiratoire, il fallait installer un petit écran de surveillance. Initialement, dans cette scène il y avait un scope à côté.

Mais les données au niveau des constantes étaient correctes !

C’était incohérent avec l’état du personnage. Et impossible de changer les données.

Alors, le scope a été retiré et je me suis revu avec les accessoiristes en train de travailler pour fabriquer un autre moniteur ( sourires).

La folie de la croisette

"C'est à Cannes que j'ai vraiment pris conscience de l'impact d'un film..

J'étais quand même sur un petit nuage. Je devais travailler le week-end de présentation du film et à la place j'étais sur la croisette en train de parader…

Après le tournage j'ai vite repris mon train train du boulot j'étais en relation avec Catherine mais je suivais cela de loin mais n'étant pas cinéphile à la base, je ne savais même pas quand avait lieu le festival de Cannes.

Ce qui est assez amusant là dedans, c'est qu'on a eu la première projection du film devant l'équipe le 1er juin et que le lendemain au soir on a su qu'on était sélectionnés, c'était assez fou comme calendrier."

Une actrice en devenir?

"J'ai postulé sur d'autres castings depuis la fin du tournage de la Fracture Mais ce sont toujours des rôles d’aide-soignante. J’aimerais sortir de ma zone de confort.

Déjà, j’ai eu de la chance d’avoir eu un premier rôle gratifiant. Je ne suis pas Aïssatou femme de ménage ou mère de 15 000 enfants…

De toute façon, je me dis que ce n'est que du bonus ce qui m’arrive désormais. »