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19 septembre 2023

Rencontre presse du film "Coup de chance" - quand Woody nous parle de chance, de Paris et des comédiens français

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Pour présenter son cinquantième long métrage, Coup de chance, en salles le 27 septembre prochain, et son tout  premier tourné en français, Woody Allen était à Lyon dimanche 10 septembre dernier.

Le réalisateur new-yorkais était présent à l'Institut Lumière pour la projection en avant-première de son dernier film intitulé « Coup de chance"- critique du film à venir sur le site- qui  aborde les thèmes de la chance, du destin et de la fatalité. 

En présentant à Lyon « Coup de Chance », accompagné de trois des quatre acteurs principaux du film, Woody Allen accomplit un rêve de jeunesse, celui de devenir un cinéaste européen, et fait une sorte de pied de nez à l’industrie américaine qui l’a rejeté pour les raisons que l'on sait. 

On a eu l'immense privilège d'être parmi les médias invités à interroger un des plus grands maestros vivants du cinéma mondial.

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Woody Allen et la chance

Des le début de l'interview, à la question de notre confrère Vincent Raymond du Petit Bulletin, le réalisateur a toujours estimé avoir eu beaucoup de chance dans sa carrière. Selon lui, il faut avoir de la chance pour avoir de bonnes idées et de l'inspiration.   

Un thème qui traverse l’œuvre du cinéaste, à l’instar de Match Point. « Alain, le personnage du film joué par Niels Schneider,  reconnaît l’influence du hasard et de la chance dans l’existence », ajoute Allen au cours de l'interview. « Il l’a observée de près et en a lui-même fait l’expérience, contrairement à Jean, qui est beaucoup plus rigide et qui veut être dans le contrôle. Personnellement, je suis convaincu que la chance joue un bien plus grand rôle que ce qu’en pensent la plupart des gens : ils estiment qu’avec de la discipline, du travail et de la concentration, ils peuvent maîtriser le cours de leur existence. Mais ce n’est que partiellement vrai, même si c’est une perspective assez troublante ».Jean aime surtout avoir le sentiment qu’il contrôle sa vie, quitte à forcer le destin. 

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 Dans "Coup de chance",  c'est Jean, joué par Melvil Poupaud qui pense que la chance se provoque : « Beaucoup d’hommes d’affaires qui ont très bien réussi ont l’impression qu’ils peuvent provoquer leur chance et qu’ils ne sont pas à la merci du hasard », reprend le cinéaste. « Bien entendu, ce n’est pas toujours vrai, mais Jean est du genre à vouloir tout maîtriser – à tel point, comme on l’apprend au début du film, qu’il serait allé, dit-on, jusqu’à commettre un acte crapuleux pour se débarrasser de son associé. »

Pour Woody, c'est « la chance qui lui a permis de convoquer ces personnages »… Et aussi de travailler avec ces acteurs. « Ce sont eux qui ont fait le film et qui ont fait en sorte que j’ai l’air d’avoir un savoir-faire ».

Lui n’a aucun doute sur la puissance du hasard qui tire les ficelles, y compris dans sa carrière : « La chance joue un très grand rôle dans ce que je fais. La chance m’a souri… ». 

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Woody et Paris

Woody Allen a confié son amour pour Paris. Il trouve que Paris est une ville magnifique, excitante et pleine d'opportunités.

Le cinéaste d'Annie Hall aime tourner à Paris car cela lui permet de venir en famille et de vivre dans cette ville pendant plusieurs mois. 

Car si le cinéma de Woody Allen est indiscutablement associé à la ville de New York, Paris a toujours occupé une place à part dans son cœur.

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Après y avoir filmé – en partie – Tout le monde dit I love You en 1996 et avoir fait de la capitale française un personnage à part entière dans Minuit à Paris en 2010, il y revient cette fois pour un film entièrement tourné en français. 

Au départ, pourtant, il envisageait de réaliser Coup de chance en anglais et de mettre en scène des Américains vivant à Paris. « Je ne parle pas très bien français, et je le comprends encore moins, mais en finissant le scénario, je me suis dit que ce serait une expérience formidable de tourner en français », explique Woody Allen. « J’ai toujours adoré le cinéma européen, et français en particulier, et quand j’ai suggéré l’idée à mes producteurs, ils ont réagi avec enthousiasme. » 

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Tourner en français

Il a également évoqué la particularité de son dernier film, à savoir qu'il est entièrement en français et joué par des comédiens français. Il a fait confiance aux acteurs qui semblaient bien comprendre les scènes et le scénario. 

Si l’intrigue amoureuse et les thématiques sont caractéristiques de l’œuvre du cinéaste, la direction d’acteurs dans une autre langue que l’anglais était radicalement nouvelle pour lui. « Je ne parle que l’anglais si bien que je ne pensais pas avoir un jour la possibilité de tourner dans une autre langue, mais je me suis aperçu que j’arrivais à voir si un acteur jouait de manière crédible ou pas », précise Allen. « Comme c’est moi qui ai écrit le scénario, je savais ce que les acteurs disaient à chaque scène. Et si j’avais un doute, j’interrogeais ma scripte ou les cadreurs qui, eux, parlaient français. »

 Woody Allen reconnaît qu’il ne connaissait pas bien les comédiens à l’affiche de Coup de chance, mais que tous ceux qu’il a sélectionnés à partir d’enregistrements vidéo correspondaient parfaitement aux personnages qu’il avait imaginés. Il les a rencontrés peu de temps avant le tournage et, comme avec tous ses collaborateurs, il leur a accordé une grande liberté d’action. « Je tenais à ce que les acteurs s’approprient les dialogues et parlent comme n’importe quels Français », ajoute le réalisateur. 

« Ils n’étaient pas obligés de respecter le script à la lettre : ils pouvaient improviser et s’exprimer naturellement, comme ils l’auraient fait dans un contexte comparable. C’est en leur laissant cette marge de manœuvre qu’ils sont aussi bons. ». Woody Allen nous a confié conserver un merveilleux souvenir de ce tournage à Paris d’un film en langue française et serait prêt à renouveler l’expérience. 

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S'entourer des meilleurs techniciens pendant le tournage

Le travail sur la lumière et la gamme de couleurs, des tons chauds et dorés aux teintes plus froides, subliment la beauté de la ville et accompagnent la trajectoire émotionnelle des personnages.

Après Café Society, Wonder Wheel, Un jour de pluie à New York et Rifkin’s Festival, c’est la cinquième fois que le directeur de la photographie Vittorio Storaro collabore avec Woody Allen. 

« Le secret, c’est de s’entourer des meilleurs chefs de poste », confie le cinéaste. « Il faut savoir les choisir et, ensuite, ne surtout pas les museler et les étouffer. Bien au contraire, il faut les laisser s’exprimer artistiquement en toute liberté. Avec Vittorio, nous travaillons toujours de la même façon. Il lit le scénario, nous discutons de l’atmosphère du film et, comme avec l’ensemble de mes collaborateurs, je lui laisse une totale liberté de création. C’est un grand artiste et presque toutes ses intuitions sont justes. » 

Vittorio Storaro a choisi de tourner avec une caméra numérique Sony Venice 16-bit qui permet d’obtenir une qualité d’image incomparable. « Je ne regrette plus du tout l’argentique », raconte le chef-opérateur qui, entre autres, a éclairé la plupart des films de Bernardo Bertolucci et Apocalypse Now de Francis Ford Coppola. « Avec cette caméra, on peut capter jusqu’à 200 milliards de nuances différentes !

Pour Coup de chance, on tournait à Paris, qui est une ville du nord, et en automne de surcroît, période où le temps est très nuageux et où les gens utilisent beaucoup d’éclairages artificiels. J’ai donc essentiellement joué sur les contrastes entre lumière naturelle et éclairages artificiels en fonction des situations. »

 Le réalisateur a profité de l'occasion pour évoquer l'influence du cinéma européen sur son travail. Il estime que les réalisateurs français tels que Truffaut, Renoir, Godard et Chabrol ont eu une grande influence sur les cinéastes américains de sa génération, y compris sur lui-même. 

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 Woody et le jazz

S’il a conservé ses méthodes de travail et plusieurs de ses fidèles collaborateurs, Woody Allen a reconnu  néanmoins avoir fait une exception pour la musique. 

« En général, pour tous mes films, j’utilise des morceaux de jazz beaucoup plus anciens car c’est la musique que j’aime », conclut-il. « Mais comme je tournais un film français, j’ai voulu rendre hommage au cinéma français des années 50 et 60, comme Ascenseur pour l’échafaud de Louis Malle, que j’ai découvert quand j’ai commencé à m’intéresser au cinéma. C’était l’époque où les cinéastes français faisaient appel à Miles Davis et au Modern Jazz Quartet et, de manière générale, à un jazz plus moderne. C’est donc le style de musique que j’ai adopté pour Coup de chance. »

 Coup de chance, le (ba)round d'honneur pour Woody?

Woody Allen a abordé en fin d'interview la question de savoir si « Coup de chance » serait son ultime film, ce qui serait selon lui une idée plutot sympathique de boucler la boucle sur un chiffre rond, avec ce 50e chiffre.

De toute facon, il nous a expliqué que trouver de l'argent pour réaliser des films devient de plus en plus difficile et qu'il n'aime pas non plus ce qu'est devenue l'industrie du cinéma avec les plateformes de streaming.

Il estime que le cinéma a perdu de son glamour et de son attrait.

Cependant, s'il recevait un financement, il succomberait probablement à la tentation de faire un autre film en espérant que ce dernier puisse demeurer à l'affiche le plus longtemps possible. On a en effet du mal à voir Woody sans sa caméra. 

Merci à l'Institut Lumière, à Corinne

crédit photo: Metropolitan film export (photos 3,4,9)

et Fabrice SCHIFF  (le reste)

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