Nouveauté poche : Tout faux; Véronica Raimo
Un frère et une sœur sont devenus tous les deux des écrivains connus et reconnus en Italie.
L'ennui, et l'incompréhension du monde qui les entoure dans leur enfance sera le terreau et le ferment de leur vie d'adulte.
Un père paranoïaque et une mère surprotectrice rien de tel pour fossiliser des névroses et gâcher une vie.
A moins d'avoir le talent de l'écriture, les souvenirs originels deviennent alors un matériau brut inspirant et une source inépuisable d'anecdotes.
La frustration, la peur, la honte, la colère, la jalousie, toutes ces émotions Veronica Raimo les traverse et les apprivoise pour créer un roman faux où tout est vrai, à moins que ce ne soit un roman vrai où tout est faux.
"Je suis la seule femme de la famille – coté maternelle et paternel confondus – qui n'a pas de poitrine. Malgré ça, ou probablement justement pour ça, en vertu du principe immuable que représente le bizutage domestique qui maintient glorieusement en vie les hiérarchies familiales, je me retrouvais ponctuellement avec un soutien-gorge comme cadeau d'anniversaire.
Étant donné que de toute façon il ne me servait à rien, sa taille était tout à fait arbitraire. Je possède un tiroir rempli de soutiens-gorge flambant neufs avec l'étiquette encore accrochée dessus, allant du bonnet A au bonnet E, en dentelle, en satin, à balconnets, rembourrés, avec ou sans bretelles.
Je ne parviens pas à m'en débarrasser, d'abord parce que les cadeaux sont pour moi quelque chose de sacré et que je crains toujours le retour du karma, mais aussi parce que la perversité de ce tiroir me ramène à l'intrinsèque vérité morale d'une famille."
Ironiquement drôle et féroce, l'écrivaine nous livre le portrait intime d'une jeune femme de son temps, l'autofiction à l'italienne d'une femme libre de ses choix et de ses renoncements, apaisée de son passé et confiante dans son avenir.
Les italiens ce sont des français de bonne humeur, disait Cocteau, la preuve par Veronica Raimo et son excellent Tout faux (prix Strega 2022).
Tout faux de Véronica Raimo, traduit de l’italien par Audrey Richaud, Liana Levi, version Picollo
J'ai appris à lire à l'âge de quatre ans. Dans une autre famille que la mienne, j'aurais peut-être eu droit à un « bravo ». Mais comme mon frère, à trois ans , en était déjà capable, et qu'à quatre il connaissait déjà par cœur les capitales du monde entier, le nom des présidents américains ainsi que leur date d'arrivée au pouvoir par ordre chronologique, et tous ceux des joueurs de la Juventus depuis 1975, année de sa naissance, mon génie passa complètement inaperçu