Jean Philippe Blondel: les classes préparatoires, OUI; le mariage, NON...
A mon grand desespoir, je me suis récemment rendu compte que je n'étais pas lu par tout le monde, en tout cas pas par tous les écrivains français :o) car les précieuses recommandations que je leur donne ne sont pas forcément toutes suivies d'effet .
En effet, il ya trois ans de cela, j'avais conseillé, à la fin de ma chronique consacrée au romancier Jean Philippe Blondel dont j'avais lu quasiment tous les romans depuis son premier Accès direct à la plage, de se focaliser sur ses écrits plus personnels, plus intimes, plus profondes au détriment des fictions plus légères qu'il aimait à faire un roman sur deux et qui me semblait arrive à témoigner d'une qualité littéraire plus évident que dans des récits à potentiels plus romanesque.
Car l'écrivain troyen, professeur d'anglais à mi temps, ne fait pas selon moi mouche à tous les coups : il alterne souvent entre roman passionnant et profondément émouvant- Et rester vivant par exemple- et desromans plus lgers et qui sonnent un peu faux- Le baby sitter...
Malheureusement- ou heureusement si on voit du bon côté des choses- les deux derniers romans en date de Sieur Blondel ne font que confirmer cette tendance et rendre mon conseil de 2012 toujours d'actualité, tant le roman animé d'une belle intensité dramatique m'a semblé être bien plus réussi que l'autre, à la tonalité plus légère:
1. Un hiver à Paris sensible et enchanteur
Cet hiver à Paris, sorti en grand format en janvier 2015 et qui vient de sortir chez Pocket, c'est celui qu'a connu un jeune provincial de 19 ans qu'on devine très inspiré par la propre expérience de l'auteur et qui est venu monter sur Paris pour s'inscrire en école de prépa, dans un lycée prestigieux de la capitale, ces lieux où la compétition fait rage, ou les coups bas et les humiliations plus ou moins assumées et tolérées sont fréquentes tant ces profs sont là pour façonner des élites., et les moyens importent finalement peu .
Si Victor qui vient d’une famille modeste, comme pas mal d'héros des livres de Blondel n’a pas vraiment l’ambition de réussir de prestigieux concours mais plutot de profiter de cette expérience forcément formatrice n'est pas forcément déroutée par cet environnement particulier, ca ne sera pas le cas pour un de ses camarades, le jeune Mathieu qui désespéré par ces comportements de profs et l'indifférence ou le mépris des camarades, va un jour sauter par la fenetre et se suicider, un évenement qui changera à jamais Victor.
La grande difficulté à s'adapter d'une part à un milieu qui nous est étranger, l'atmosphère de compétition incessante, le déracinement lorsqu'on ne vient pas de Paris, : tout sonne juste dans ce beau récit initiatique, sur cette belle et parfois terrifiante analyse du monde des prépas. Le style de l'auteur simple et sincère aborde joliment ces souvenirs enfouis de l'existence qui, un jour, nous reviennent en mémoire et ne nous quittent jamais.
Si le héros est à la fois lucide et pas dupe sur cette société pleine de faux semblants et d'utopies, les questionnements qu'il traverse sont profondément universels et nous touchent forcément, puisque, tout au long de ce court mais intense "Hiver à Paris", nous frappe de manière évidente la tendresse de l'auteur pour ses personnages.
2. Des Mariages de saison artificielles et peu passionnantes
Une tendresse qu'on perçoit toujours dans son dernier roman paru en cette rentrée 2015, Mariages de saison chez son éditeur habituel, Buchet Castel mais qui hélas ne suffit pas pour renouveller la réussite de l'hiver à Paris...
L'intrigue nous plonge comme le titre l'indique dans une saison de mariages, leurs éventuelles remises en question, au gré de confessions face caméra...le roman déroule une série de saynètes qui dévoile peu à peu Corentin, vingt-sept ans et une tonne de désillusions, bref des ingrédients qui pourraient fonctionner, mais jamais la sauce ne prend jamais, hélas.
La faute sans doute à son personnage Central, ce Corentin, ex étudiant un peu glandeur qui il aide son parrain à filmer des mariages, qui ne possède pas la même épaisseur que Victor. la faute sans doute au sujet central - les cérémonies de mariage un thème qui ne m'a jamais passionné... la faute aussi à un récit choral - chaque chapitre est composé d'un mariage et de personnages différent- pas très maitrisé... et la faute certainement à un récit finalement bien trop léger, dépourvu de la meme intensité dramatique de ses meilleurs romans.
Moins d'empathie pour les personnages, un intéret limité, et au final un coté un peu trop artificiel : ce Blondel cru 2016 est décidement un peu trop fade, hélas, mais on peut se rabattre encore sur le cru 2015 et pas mal d'autres de ces précédents pour explorer l'oeuvre de ce brillant écrivain, qui parvient la plupart du temps à faire écho à ce que chacun d'entre nous rencontre un jour ou l'autre dans sa propre vie.