Sélection polars Nos trois coups de coeur automne 2018 : Mauvaises graines , L'échange, Macbeth
Même si l'année n'est pas encore ( totalement) terminée, il est quasiment certain que l'article - hors jeu concours évidemment- qui aura été le plus lu, et de loin, sera celui qui récapitule nos dix polars préférés à vous conseiller pour le festival quais du polar.
Autant dire que cela nous donne forcément envie de continuer sur la même voie avant même d'attendre le festival 2019 ( dont l'affiche et quelques lignes de la programmation nous ont été rapidement données ) avec trois polars ou plutôt romans noirs que trois membres de la rédaction ont dévoré en cette fin d'automne et qu'on vous conseille ardemment pour réchauffer vos longues soirées d'hiver :
1. Macbeth; Jo Nesbo (Gallimard/ Série Noire)
"Sa femme disait qu'il préférait opérer en solitaire parce qu'il n'aimait pas les gens. Ce n'était peut-être pas entièrement faux, mais c'était sans doute plutôt l'inverse qui était vrai. C'étaient les gens qui ne l'aimaient pas, lui. Tous ne ressentaient pas une aversion déclarée, mais quelque chose dans sa personnalité, peut-être, semblait repousser. Il ne savait pas quoi. Il avait un physique et une assurance qu'il savait attirer un certain type de femmes, il était poli, cultivé et plus intelligent que la plupart des individus qu'il connaissait."
Nous sommes dans une ville industrielle régie par la corruption, rongée par la violence de clans comme celui des No Forse Riders, pourrie par les trafics de drogue, de bouillon ou de power. Une ville où la vie s'est arrêtée dans certains quartiers à l'image de Bertha, la vieille locomotive qui a pris racine devant l'Inverness, un des casinos les plus importants de la ville, tenu par Lady. Nous sommes plongés dans une ambiance sombre et étouffante qui, d'emblée, nous prend à la gorge.
C'est une gigantesque partie d'échecs que va jouer le Fou MacBeth contre le Bien, éliminant un à un les pions postés sur les cases devant lui.
Acculé par sa Reine Lady, transformé par sa consommation de power - brillant, ce choix de nom ! -, le Fou va basculer dans la violence. Habité par une soif de vengeance, par le poison de l'ambition, il va ainsi se débarrasser de tous ceux susceptibles d'entraver sa route vers le poste de préfet de police, puis, celui de maire de la ville, nouer des alliances avec ses ennemis, trahir ses amis. Même les Tours en effet, sur lesquelles il s'est longtemps appuyé, seront détruites. Jusqu'à la fin d'une partie sanglante qui se soldera par un Échec et Mac[Beth].
Tout en étant complètement absorbée par le suspense, submergée par l'ambiance nauséabonde qui règne dans la ville, je me suis plu à identifier çà et là de subtiles références à la tragédie de Shakespeare, à travers les personnages - on retrouve Lady, Duncan, les trois sorcières sous les traits de trois soeurs qui prédisent à MacBeth qu'il sera non pas Duc de Cawdor, ni futur Roi d'Écosse, mais préfet de police.
Il s'agissait de mon tout premier polar de Jo Nesbø, ce ne sera assurément pas le dernier ! J'ai tellement adoré ! Je signalerai juste un petit bémol quant à la traduction, pas toujours très bonne.
Chronique de Born To Be a livre
Caroline et Francis, un couple au bord de la rupture, décident comme opération de la dernière chance, de partir une semaine en vacances en profitant d’un échange de maison.
Le couple va échanger son appartement à Leeds contre une maison en banlieue londonienne.
Petit à petit, un sentiment d’insécurité, de malaise et d’angoisse s’installe durablement dans cette maison pourtant banale a priori.
Un climat de tension, des événements inquiétants, Caroline se sent piégée mais, par qui ? Et pourquoi ? L’échange de leur maison réciproque était il le fruit du hasard? Finalement, quel est le propriétaire de cette belle maison londonienne ?
L’histoire alterne le passé et le présent pour tenter de résoudre ces énigmes et de revenir sur l’origine de la lente destruction de cette union qui paraissait au début idyllique.
Les principaux personnages vont narrer chacun de leur coté les événements marquants de cette période chaotique. le lecteur comprendra petit à petit, pourquoi le couple se retrouve à recoller les morceaux et découvrir surtout la personne qui est derrière tous ces mystères
Quelques maladresses d'écriture- notamment les passages de Caroline et son amant Carl- ne gachent pas le plaisir d'ensemble devant ce thriller psychologique de bonne facture qui fait penser à quelques autres récents comme « La fille d’avant » de J.P Delaney.
L'auteur a su poser une atmosphère lourde qui entraine le lecteur dans une spirale infernale qui ne dévoilera son dénouement plutôt surprenant qu'à la toute fin de l'intrigue.
Chronique de Filou
Mauvaises graines, Lindsay Hunter( Gallimard/ Série Noire)
"C'était excitant d'avoir un pote comme ça, un pote avec qui Perry pouvait faire semblant quand le besoin s'en faisait sentir, mais c'était aussi beaucoup e boulot. Jamey l'avait ajoutée sur Facebook des mois plus tôt et elle avait finalement accepté sa demande un soir où Baby Girl ne pouvait pas sortir. Son profil précisait qu'il allait au lycée situé quelques bleds plus loin. Il jouait au base ball et de ce que Perry pouvait voir,il était plutot pas mal"
Contrairement à l'échange, Mauvaises graines n'est pas vraiment un polar, mais assurément un roman noir au sens premier du mot
La romancière Lindsay Hunter prend le pouls de l'adolescence des classes moyennes américaines, avec deux jeunes filles un peu perdues, qui pour tromper l'ennui de leur quotidien, prennent des risques et bravent les interdits et vont notamment s'acquoquiner avec un garçon un peu louche rencontré sur Internet.
Perry et Baby sont deux jeunes filles, pas vraiment délinquantes, mais qui ne semblent pas avoir l'ambition et qui surtout s'ennuient terriblement et qui vont tenter pas mal d'experiences juste pour le plaisir d'éprouver des sensations.
L’auteure ne dresse pas comme on pourrait le penser au départ un portrait sociologique de cette jeunesse américaine à la dérive, car ne se situe jamais au dessus de ses personnages, et surtout elle prend le temps de les accompagner, et de creuser avec eux des situations crédibles, porté par un rythme parfois un peu indolent, mais une plume assurément très juste et une ambiance d’un réalisme noir et prégnant.
Chronique de Michelio