Un dimanche matin : un livre fort et puissant d'une grande humanité
« Durant les mois et les années qui ont suivi le geste de Pierre, ou plutôt ses gestes, comme j’allais l’apprendre au moment du procès, je me suis attelée à leur trouver un sens. Face à l’inconcevable, c’est un réflexe de survie : on traque la clé du basculement comme on chercherait l’oxygène.
On peut fouiller d’autant plus qu’on ignore quand le processus s’est mis en marche : faut-il forer l’enfance du tueur, sa construction d’homme ou, plus tard, sa rencontre avec la victime ? On peut creuser d’autant plus profond qu’on ignore même s’il y a quelque chose à trouver. »
17 juillet 2004, un homme tue sa femme sauvagement et cache son corps deux jours durant dans un sac de chantier au sous-sol de leur pavillon de la banlieue lyonnaise. Rien ne laissait prévoir que ce père de famille pourrait un jour commettre un acte aussi barbare.
Johanne Rigoulot reçoit deux jours plus tard reçoit un coup de fil de son frère qui va faire l’effet d’un tsunami dans sa famille.
Pierre, un cousin proche avec qui elle a grandi, un homme qu’elle estime et pour qui elle a beaucoup d’affection vient de commettre l’irréparable. Comment expliquer un geste aussi terrible de la part d’un proche qu’on estime et en qui on avait toute confiance ?
Comment se positionner par rapport un oncle et une tante désemparés ? « Pierre était gentil, tellement gentil ». La famille est un organisme vivant, un seul élément l’intoxique et le corps entier rentre en lutte.
Une déflagration dans une famille de la classe moyenne, une famille française lambda face à l’inconcevable.
Johanne Rigoulot, comme Emmanuel Carrère l’avait fait quelques années auparavant dans « L’adversaire », affronte un monstre, le monstre qui habite son cousin.
Dans un récit sans fard, avec une honnêteté qui l’honore, elle démonte le mécanisme émotionnel qui dérègle la famille du bourreau sans jamais oublier la victime.
"Un dimanche matin" est un très bon livre, qui s’avale d’une traite.; le sujet est suffisamment fort et original, c’est si rare finalement et si audacieux de parler de la famille d'un bourreau..
Un livre fort et puissant d’une grande humanité.
Un dimanche matin ; Johanne Rigoulot ( éditions des équateurs) ; avril 2019