Nocturama: Un film radical qui laissera forcément divisés...
Hier soir, avec Michel nous n'étions pas d'accord sur les films qui manquaient cruellement dans la liste des nominés des Césars.. si de mon coté j'aurais tant voulu voir l'équipe du film Les ogres ou celle de l'économie du couple attendre gentiment leurs statuettes largement méritées, Michel quant à lui n'a pas compris l'absence de L'Avenir- pour lui si Huppert méritait une statuette c'était pour le film de Mia Hansen Love ainsi que Nocturama dans la compétition.
Parlons un peu du coup de ce dernier film, qui est sorti il y a quelques jours seulement le 22 février en DVD/ Blu Ray chez Wild Side et qui a beaucoup fait parler de lui chez les cinéphiles tant ila partagé entre ceux qui comme Michel le défendent becs et ongles et d'autres comme moi qui le trouve largement contestable sur le fond, malgré une maitrise formelle évidente.
Pour les premiers, avec ce Nocturama, Bertrand Bonello signe une œuvre de fiction qui parvient à capter avec brio l’errance d’une jeunesse qui cherche à exister et à se faire entendre, servi par un casting magnétique, qui révèle une nouvelle génération de comédiens époustouflants comme Finnegan Oldfield (Les cowboys), Hamza Meziani, Manal Issa, Rabah Naït Oufella- à l'affiche de 4 films cette année-.
Pour les seconds, Nocturama apparait comme un exercice de style brillant mais totalement vain et assez limite au niveau théologique.
Nocturama ne dépasse jamais le objet conceptuel, théorique qui n'est rien d'autre qu'une belle abstraction formelle.
Certes reconnaissons au film quelques atouts incontestables : Bonello démontre une nouvelle fois le brio de sa mise en scène : ( sens absolu du cadrage, split screen, utilisation astucieuse de la bande sonore et de la belle bande musicale composée Paul Anka, du John Barry ou Call me de Blondie), et le travail réalisé avec Leo Hinstin, le Directeur de la photographie, absolument remarquable.
Mais toutes ces qualités se retournent finalement contre le film tant le metteur en scène adulé par une partie de la critique donne ici terriblement l'impression de se regarder totalement filmer et de laisser dérouler son film sans maitre à bord
Nocturama ne donnera aucune explication sur les motivations de ses personnages et le film dès lors apparait complètement désincarné et froid, et Nocturama n'a rien du brulot politique annoncé et attendu.
Certes, l'objectif de Bonnello était de privilégier l’action sur le discours, et le pourquoi de leurs gestes, mais le problème dans le contexte actuel est que si l'on ne sait rien des raisons qui ont poussé ces jeunes gens à se regrouper et à commettre ces assassinats et ces attentats, le procédé semble idéologiquement douteux et dangereux.
Dans les intentions du film, le réalisateur compare la France de 2016 à une cocotte minute prête à exploser, mais rien de tout cela ne nous sera montré dans ce film et notamment ces très longues séquences d'attente dans un grand magasin où les personnages déambulent sans qu'on ne comprenne bien ce qui les motive et les relie entre eux, avec des scènes souvent assez belles, mais terriblement creuses, qui fait qu'on regarde ces jeunes gens s'agiter dans une belle indifférence, malgré l'horreur de leurs actes et leurs issues.
Par ailleurs, à part Finnegan Oldfield et Vincent Rottiers comédiens plus experimentés, les jeunes acteurs du film, qui n'ont pas grand chose à incarner, donnent l'impression de réciter de façon assez maladroite leurs textes, ce qui conforte le coté théatralisé et artificiel du film.
Ambitieux sur le papier- une ambition que Michel défend ardemment, lui qui trouve le cinéma français trop frileux, ce Nocturama apparait bien dans la lignée de ses autres films mais on est en train de lui préférer L'Appolonide ou Saint Laurent, moins théoriques et plus émouvants.