Fabrice Éboué, j'en dis du bien depuis pratiquement le début de ce blog : je suis un de ceux qui ont suivi le Jamel Comédy Club depuis leur première diffusion en 2005, et trés vite, j'ai été fan de l'humour d'Eboué, et dont l'humour tient plus de Coluche ou de Desproges, s'il fallaità tout prix lui trouver une affinité: l'art de dire avec un ton totalement pince sans rire le pire des petites saloperies, avec toujours au fond des yeux la petite pointe de malice et d'humanité qui permet de faire passer la pilule.
Un parti pris qu'il a repris au cinéma, d'abord avec son compère Thomas NJIGOL, d'abord avec l'excellente case départ, brillante comédie autour de l'esclavage et de l'histoire des noirs en France ou encore le crocodile du Bostwanga, farce décapande sur un autre sujet qui fache, les relations Europe/ Afrique, et surtout les excès des didacteurs africains coupables de toutes les folies des grandeurs montrait qu'Eboué n'avait pas peur des un pari sacrément gonflé.
Malheureusement un des penchants de cet humour cinglant et anti politiquement correct c'est qu'il parvient tendance à alourdir le trait et mettre des situations quand même fortement caricaturales et qui perdent pas mal de leur mordant.
Les mêmes qualités et les mêmes défauts sont présents dans COEXISTER, le nouveau film d'Eboué à l'affiche depuis une semaine et que j'avais eu la chance de voir lors de la semaine de la comédie UGC en septembre dernier.
Cette nouvelle comédie- réalisée ce coup ci en solo- met en lumière un groupe de musique atypique et créé de toutes pièces, formé d'un rabbin, d'un curé et d'un imam, largement copiée sur le (pathétique) concept des Prètres qui ont cartonné il ya quelques années en reprenant version soupe des standarts de la chanson francaise.
Une idée cynique née sur les cendres de la bonne musique d’antan, et qui égratigne gentiment ce vivre ensemble dont tout le monde se garagarise, mais qui va s’avérer forcément très juteuse, surfant allégrement sur la veine du « tous ensemble dans la paix et la fraternité entre les peuples ».
Avec un casting de choc, Ramzy Bédia en imam dépravé, Guillaume de Tonquédec en curé amoureux et Jonathan Cohen en rabbin dépressif, cette comédie atteint largement ses objectifs et fait plaisir bien loin de l'humour un peu rance de Qu'est-ce qu'on a fait au bon Dieu ?
Eboué évite la plupart du temps la lourdeur et la caricature et sait imposer au film un rythme trépidant, et sait ménager certaines puchlines particulièrement efficaces, certaines scènes notamment celles de la radio catholiques font hurler de rire
Bref, une comédie bien à l'image de son auteur à savoir, irrévérencieuse, corrosive, et décapant et qui sait bousculer gentiment la bienséance; grâce à pas mal d'échanges incisifs, inspirés et savoureux.
Comme souvent on regrette que le film ne tienne pas vraiment la distance et n'évite pas quelques facilités de scénario et de dialogues et une absence de prise de risque en cherchant toujours à garder l'équilibre l’humour entre les religions et les communautés pour ne pas froisser tout le monde.
Fabrice Eboué n’a pas osé totalement aller à fond dans l’humour grinçant et semblait plus virulent encore dans "Case Départ", CoeXister fait dans l’impertinence massive, mais sans jamais dépasser la limite du manque de respect envers qui que ce soit.
Cependant ne boudons pas notre plaisir tant les occasions de rires ne manquent vraiment pas, notamment dans la facon dont Coexister se moque finement des dérives de l’industrie musicale et ne cherche jamais à donner de leçon de morale.
Sur ce sujet pourtant ultra-sensible, Fabrice Eboué a confectionné une offensive acerbe qui ne cherche jamais à être moralisatrice.
Si niveau comédie francaise on n'est pas au niveau d'excellence du sens de la fête ( sur lequel nous reviendrons prochainement) saluons quand même l'audace et la prise de risque dans le sujet d'un artiste qui n'hésite pas à aller du coté ou ca fait mal.