Sapé comme jadis : l'habit des grands de ce monde faisait il le moine?
Pourquoi Jules César s’est-il accroché à sa toge ? Catherine de Médicis avait-elle une culotte ? Comment Philippe III a fait du noir le symbole de sa puissance, comment Mary Quant a révolutionné la mode en coupant ses jupes ?…
Dans son livre Sapé comme jadis (Robert Laffont), Yvane Jacob passe à la loupe 60 histoires de vêtements, histoire de nous rappeler que l’habit n’est jamais neutre.
Diplômée de Sciences Po et de l’Institut français de la mode, cette responsable de collection (pour la marque & Other Stories) et chroniqueuse (sur Radio Nova), dresse dans son livre le portrait de 60 vêtements qui ont marqué l’histoire. Des biographies vestimentaires drôles et inattendues qui rappellent que la fringue a un intérêt sociologique. et ces soixante portraits tentent de le décoder, dévoilant avec légèreté mais sans frivolité tout ce que revêt l’habit.
"S’intéresser à ces histoires ne consiste pas qu’un regard vers le passé. Tout le monde n’a pas la passion du vêtement, mais tout le monde s’habille. Chaque matin, en choisissant des formes, des couleurs, des motifs, nous offrons souvent inconsciemment, une image singulière de nous-mêmes. Ces choix, libres en apparence, s’inscrivent dans le long héritage, social et politique, du vêtement.Bien sapé pour mieux régner", écrit Yvane Jacob dans son introduction
1960. Le photographe Alberto Korda réalise un portrait de Che Guevara qui contribuera à faire de lui le symbole éternel de la révolution. Le guérillero y apparaît digne, concentré, presque invulnérable. Sur la photo, le Che porte un béret sur lequel est épinglé une étoile. Un accessoire intrinsèquement lié à son image comme le sont aussi sa chemise kaki et son treillis. "Parvenu au pouvoir, le Che n’abandonne pas sa tenue militaire. Elle permet de conserver une street cred de barbudo révolutionnaire face au costume-cravate capitaliste", analyse avec humour Yvane Jacob.
Le béret d’Ernesto, lui, "est en feutre, ce qui permet d’être pas cher, et imperméable, ce qui permet d’être dehors." Yvane Jacob souligne que le couvre-chef "navigue dans un bordel idéologique total." Il prend une dimension politique durant la Première Guerre carliste (une guerre civile espagnole qui dura de 1833 à 1839) en symbolisant la lutte contre le pouvoir en place.
Puis, "il devient la coiffe des militaires, des résistants autant que des miliciens, des GI comme des Black Panthers." Et le Che dans tout ça ? Yvane Jacob conclut : "Il le choisit sans doute parce qu’il permet d’épingler des trucs : en l’occurrence l’étoile de commandante – grade le plus élevé de l’armée cubaine – que seuls lui et son ami Fidel peuvent revendiquer. L’accessoire idéal en somme, pour passer de simple guérillero à icône planétaire."
SAPÉ COMME JADIS 60 histoires de vêtements (et de gens importants) Edition Robert Laffont Yvane JACOB