Avant d'être un film Petit pays a d'abord été un roman, et pas n'importe lequel puisqu'il fut incontestablement un des événements de la rentrée littéraire de 2016.
Ce prix Goncourt des lycéens, on en a chanté les louanges, comme à peu près toute la presse emballée par le flow et la puissance du récit très autobiographique du slameur Gaël Faye, devenu quasi une star depuis ce formidable coup d'essai.
"Petit pays" était assurément un grand livre, écrit avec une telle justesse et tendresse qu’on avait du mal après la lecture, à quitter le petit Gaby,personnage central de ce roman plongé malgré lui dans cette guerre civile africaine entre tribus différentes qui opposa au Burundi, Hutu et Tutsi au début des années 1990.
Son adaptation au cinéma par un Éric Barbier qui avait un peu foiré son adaptation de Romain Gary La Promesse de l’aube pouvait faire un peu peur, mais pour l'avoir vu en sa présence et en présence de l'auteur en janvier dernier, avant même sa première sortie prévue au mois de mars et son report post confinement, le film s'avère finalement être une vraie réussite à tous les points de vue .
Malgré ce qui se passe autour de ce jeune gamin qui perd totalement son insouciance au fil de l'intrigue, on garde le point de vue d'un film à hauteur d’enfant, c'est à dire une vision parfois triste, parfois joyeuse parfois naïve, parfois tellement lucide sur cette tragédie avec son cortège de morts de tous âges et de toutes ethnies et son lot de trahisons si difficiles à appréhender pour un gosse de 10 ans.
Plus violent - surtout dans sa dernière partie que dans le livre où la vision du conflit et le lot de morts qu'elle charrie restaient finalement assez évasive- presque suggéré , le génocide vu à hauteur d'enfant draine aussi des relents aussi tragiques qu'amèrs, mais jamais éloignés d'une dimension poétique déjà présente dans le roman initial.
Jean-Paul Rouve en père de famille débordé de tous côtés par la gestion de son entreprise de construction et son couple qui se dérègle offre une de ses meilleures prestations, à la fois assez ambigü et bienveillant dans son rapport avec ses enfants
A ses côtés, la méconnue Isabelle Kabano est très troublante en mère broyée de toute part par cette guerre qui la bouscule personnellement .
Et les enfants sont aussi très justes et n'en font jamais trop.
Fort belle évocation sur l'enfance, le racisme, la violence, la guerre, le déchirement, "Petit Pays" est une très belle fresque, épique et familiale à conseiller aux enfants dès 10-12 ans ( certaines séquences sont trop violentes pour être vu avant) .
Petit Pays
EN DVD ET BLU-RAY LE 6 JANVIER 2021
De Eric Barbier Avec Jean-Paul Rouve, Djibril Vancoppenolle, Isabelle Kabano, Dayla De Medina
Drame - 1h51