La maison des hollandais : le talent de conteuse d'Ann Patchett à son meilleur
"Il y a peu d'occasions dans la vie où il arrive qu'on fasse un bon et que le passé qui avait été notre socle s'écroule tandis que l'avenir sur lequel on voudrait atterrir n'est pas encore en place. Pendant un moment on demeure suspendu, sans rien connaître, ni personne, pas même soi"
Danny vit avec sa grande sœur, Maeve, et son père ( la mère est parti quelques années auparavant, abandonnant soudainement mari et enfants dans une maison appelée la maison des Hollandais en banlieue de Philadelphie. en plein milieu des années 50-60.
Cette maison des hollandais est en fait une belle et grande demeure des années 1920 avec un parc aux magnifiques tilleuls pleinement offerte aux regards à Elkins Park,
Cette somptueuse maison va être l’objet de convoitise de la part de la nouvelle femme de leur père, Andrea, qui s’intallera avec ses deux filles et modifiera tout l'équilbre et l'édifice familial
Dans son précédent roman, Orange amère, Ann Patchett était apparue comme une romancière à la maitrise littéraire particulièrement affirmé.
Elle renouvelle cette prouesse en dévoilant une nouvelle fois son talent de conteuse indéniable ainsi que sa capacité à autopsier au scalpel la sphère familiale dans toute sa complexité et dans tous ses traumatismes.
"Je me suis immobilisé. Sans même prendre la peine de faire non de la tête, j’ai juste reposé la question, la question centrale de mon existence que je n’avais jamais posée. ‘Pourquoi ma mère est partie?' »
Ann Patchett s'attache également à montrer les causes et les conséquences d'une décision, aussi minime soit elle au départ, qui peut faire basculer à jamais un destin .
A travers la fascination presque maléfique qu'excerce une somptueuse maison, qui est carrément un personnage à part entière dans ce roman, Ann Patchett raconte la vie d'une fratrie sévèrement ébranlée par la fuite d'une figure maternelle et la mort brutale d'un père .
Une histoire délicate et touchante, pas toujours chronologique ni linéaire, basée sur une relation fraternelle qui emprunte au conte familial - on pense forcément à une version moderne de Hansel et d’une Gretel, avec ce personnage de marâtre ou parfois aussi au fantastique à la Henry James .
Assurément un des très bons livres étrangers de ce premier semestre 2021!!
La maison des hollandais, Ann Patchet, Éditions Actes Sud, traduit par Hélène Frappat, janvier 2021, 320 pages