critique d'album- 11;11 - Bandit Bandit
Le rock, mais plus encore. Révélé il y a quelques saisons grâce au potentiel abrasif de ses riffs, le duo formé par Maëva et Hugo impose sa stylistique musicale pour le moins singulière dans l’hexagone, ainsi qu’une aisance insolente à manier la langue française, grâce à son épatant premier album, 11:11.
Sept années se sont écoulées depuis la rencontre de Maëva et d’Hugo... sur une app de rencontre! Certes, l’objectif originel n’était pas exactement celui de faire de la musique, mais le coup de foudre a également lieu sur le plan musical.
En 2018, ils s’entourent de musiciens. De quoi s’approprier la chanson gainsbourienne avec une folle élégance.Après deux EP électrifiants, Bandit Banditet Tachycardie, il s’agissait, pour le duo, d’«aller voir plus loin que le rock» sur un 11:11 réalisé par Azzedine Djelil (Rita Mitsouko, Catherine Ringer, Minuit, Lulu Van Trapp...).De mélanger les genres, de cultiver le champ pop dans toute son amplitude avec, comme fil rouge entre le rock brut et l’alternatif plus sophistiqué, la voix de Maëva.
Les influences font le grand écart: Bandit Banditose tordre la langue française comme chez Bashung, rappelle au détour d'un couplet onirique la sensualité brute de Niagara, balance des déhanchés à la Daho quand un spleen digne de Françoise Hardy ne prend pas le dessus. Les guitares, elles, vont de St Vincent à Queens of the Stone Age, flirtant sans vergogne avec des synthés à l'instar des héros anglais Bowie et The Cure. Si les riffs sont la grande affaire d’Hugo, Maëva sait tirer parti de l’expression visuelle, sous influence Sailor et Lulaou Natural Born Killers.
Car la musique, c’est du son... mais aussi de l’image.Oeuvrant ensemble à l’écriture et à la composition, ces âmes sœurs musicales profitent du confinement pour lire et écouter bien au-delà de leur zone de confort. Jusqu’ici auto-centrés et cathartiques, les textes de Bandit Bandit restent intimes sur 11:11tout en s’avérant politiques, féministes, et engagés. Virage particulièrement manifeste dans ''Pyromane''au rock hautement groovy, dans le surf électrique de ''Lucky Luke''ou encore dans les fréquences sensibles de ''Si j’avais su''.
Quant au titre 11:11, il s’est, comme toujours chez Bandit Bandit,naturellement imposé. Faisant référence à l’heure miroir, cet horaire est souvent apparu durant les sessions en studio. En numérologie, onze est un nombre premier, représentant la rébellion comme la quête de soi. «L’intuition a toujours été notre forceavec Hugo, comme la sensation intime d’être là au bon endroit au bon moment». Ladécouverte de cette liberté, celle de Maëva, d’Hugo, mais aussi celle de leur musique débridée, résonne fort tout au long d’un album dévorant d’un désir aussi insatiable que contagieux
Ici, on parle de résurgence, de trouver la force en soi d’aller au-delà des épreuves que l’on peut affronter.« La Marée » parle de nager à contre-courant de vagues répétitives et sans fin contre lesquelles nous pouvons nous battre tout au long de notre vie, en finalité la vie (ici représentée par la mer) est salvatrice si on ne perd pas le cap donné et si l’on persévère