Selections Coup de coeur en poche - Mécano, Blanc, Cavaler seule
1.Mécano, Mattia Filice (Folio)
" Mon angoisse fluctue selon les jours. Il suffit d'un événement relaté par un collègue, l'histoire des freins qui ne répondent plus et du train qui dérive, pour que je me projette dans la situation et ne désire qu'une chose : me rendre au bureau du chef du dépôt et poser les clés : ouais en fait c'est pas fait pour moi, sans rancune.
Profitant du train ralenti par une rampe, le Mécano a sauté de la cabine et posé des cales entre le rail et les roues. Aurais-je été terrorisé, figé, incapable de réagir ? Mes doutes ne trouveront une issue que lorsque j'y serais confronté.
Roman de la vie du rail, compte rendu poétique et littéraire d'une vie décalée par des horaires décalés, récit quotidien d'un travail absorbant et exigeant.
La reconversion devrait bientôt frapper à la porte de Mattia, projectionniste d'un cinéma sans spectateur.
Au hasard d'un voyage en train le jeune homme fait la connaissance d'un Mécano, non, on ne dit chauffeur pour un train, mais Mécano.
Comme une épiphanie, Mattia, qu'aucune histoire familiale ne prédestinait à la conduite de quoi que ce soit, se demande : "mais pourquoi pas moi".
" j'écris depuis le début sur ce qui fait ma vie depuis désormais 18 bonnes années
Un roman écrit avec la soif de mettre de la poésie sur un travail difficile, absorbant, terriblement technique et prosaïque.
De la sélection pour entrer dans la grande famille cheminote à l'école de conduite sévère et stricte, du stress du premier train à la première grève jusqu'à la première erreur d'aiguillage, de l'amitié et de la fraternité aussi Mattia Filice se livre dans un journal intime et lyrique à la fois. De l'écriture comme une absolue nécessité.
Une étonnante découverte et la naissance d'un véritable écrivain.
Paru en poche aux éditions Folio; septembre 2024
2. Blanc ; Sylvain Tesson (Folio)
“Le Blanc ne constituait pas un milieu naturel, encore moins un paysage, mais une substance. Rapportée au monde abstrait, une substance s’appelle l’universel. Sa traversée s’appelle un rêve”.
Sylvain Tesson nous fait la promesse d'un long voyage, rempli d'errance à la recherche du blanc le plus pur.
Il raconte, de sa plume alerte, plusieurs hivers passés dans la blancheur immaculée de la grande poudreuse, un un périple alpin sur plusieurs saisons passés avec son fidele ami Daniel Du LAC.
Chaque année, en février ou mars, les deux amis (bientôt rejoint par un troisième larron) partent pour vingt à trente jours de périple.
Son épopée alpestre devient une ode fougueuse à la nature virginale, aux paysages enneigés et isolés, à la littérature et à la liberté.
Tesson comme à son habitude réussit son coup en beauté, son récit émaillé de rencontres humaines et de réflexions philosophiques et métaphyqiues est un vrai bijou
Dans cet ilot de reflexion qui donne à repenser la place de l'homme malmenée par la civilisation actuelle., chaque phrase, chaque mot chaque réflexion vaut son pesant d'or (blanc?):
“Le Blanc ne constituait pas un milieu naturel, encore moins un paysage, mais une substance. Rapportée au monde abstrait, une substance s’appelle l’universel. Sa traversée s’appelle un rêve”.
"Nous aimions relier des lieux inaccessibles par des endroits infranchissables." Dans le Blanc tout s’annule - espoirs et regrets. Pourquoi ai-je tant aimé la pureté?
Difficile de ne pas savourer la quintessence des écrits de Tesson. et ce besoin d'évasion loin de la modernité ambiant
3. Cavaler seule, Katryn Scanlan, éditions 1018
Les cavaliers se mettent debout sur leurs étriers, et dans notre pays, ils appellent ça « faire la tribune ». Ils écartent les bras en disant : Je me prenais pour un coyote mais je suis guéri maintenant.
Basé sur une histoire vraie, Cavaler seule nous fait partager le parcours d’une femme dans le milieu des courses hippiques. Sonia voulait être jockey mais elle était trop grande, donc elle devient entraîneuse de chevaux.
L’auteure nous raconte à travers de courts chapitres et des phrases directes et précises, la vie de Sonia, son amour pour les chevaux, ses nuits dans les boxs, dans les mobil-home, sa vie au sein de cet univers masculin, solidaire et violent. Elle dévoile tout ou presque tout : lads violents, propriétaires exigeants, bagarres, tricheries etc
Les coulisses du monde hippique, le quotidien des lads et des propriétaires d’écuries sous un monde pas forcément glamour mais très juste et percutant
Entre jalousie et accidents, le portrait d'une destinée est jalonnée de belles rencontres, souvent animales, parfois humaines.
Cavaler seule
Kathryn Scanlan
Laetitia Devaux (traduit par)
Collection : Littérature étrangère
Date de parution : 14/08/2024