Adieu Berthe : Mourir à en rire?
Comme la semaine passée, mon billet du mardi va se focaliser sur un film qui sort le lendemain en salles et que j'ai eu également la chance de voir en avant première en présence de son réalisateur.
Malheureusement, contrairement à Quand je serais petit, mon billet qui va suivre sera moinse dithyrambique, même si j'aimerais quand même à vous pousser à voir Adieu Berthe ( sous titrée aussi L'enterrement de Mémé), qui, à mon sens n'est seulement qu'à moitié réussi (ce qui n'est déjà pas mal, me diriez vous).
Adieu Berthe, c'est le nouveau film des frères Podalydès, qui ne sont pas un duo de frères réalisateurs, comme les Dardenne ou les Coen, mais qui travaille quand même en symbiose totale: Bruno réalise et écrit et Denis, coscénarise et joue le rôle principal de tous les films du frangin : parmi leurs oeuvres les plus marquantes figure Dieu seul me voit, Versailles Rive Gauche, Le Mystère de la chambre jaune ou Le Parfum de la dame en noir;
Si dans leur grande globalité, les films de Bruno Podalydès plaisent énormément à la presse cinéma et drainent un public de fidèles, personnellement j'avoue avoir été toujours un peu mitigé par ce genre de cinéma, que j'aurais tendance à classer dans la même catégorie que les films d'Arnaud Depleschin, Jacques Doillon ou Philippe Garel, dans un versant un peu plus drôle quand même: même genres de personnages totalement indécis et très cérébraux, même milieu sociaux, même ton un peu décalé, certes, mais sans réel enjeu dramatique (mon grand leitmotiv que je ressors à toutes les sauces, je sais) digne de ce nom, et enfin , (et surtout ?)même habitude d'utiliser les mêmes acteurs d'un film à un autre.
Adieu Berthe est d'ailleurs l'occasion de retrouvailles entre le réalisateur et quelques-uns de ses acteurs fétiches, tels que Isabelle Candelier, Michel Vuillermoz et Jean-Noël Brouté, présents depuis ses débuts. Il collabore également de nouveau avec Samir Guesmi et Pierre Arditi après l'assez raté Bancs publics (Versailles rive droite) en 2008.
Le problème que j'ai eu face à la nouvelle comédie des Podalydès brothers est que je m'attendais, au vu de la bande annonce et des articles que j'ai pu lire suite à sa présentation à Cannes (dans la sélection "Un certain regard") à autre chose que ce qu'elle est réellement. En effet, je pensais que le film serait une comédie bien noire, fine et enlevée sur la mort et tout le commerce qu'elle draine autour.
Entendons nous bien, cette partie est bien présente, et elle est effectivement très joussive : on rit bien franchement devant Armand (Denis Podalydès) et sa femme (Isabelle Candelier) qui doivent crier " décédé" face à un serveur vocal d'un service funéraire ou bien lorsque le héros va visiter un service funéraire complétement new age dirigé par un michel Wuillermoz aux petits oignons en sorte de gourou moderne. Bref, pendant les trois premiers quarts d'heure, on tient une comédie française qu'on peut classer sans aucun problème parmi le haut du panier.
L'ennui, c'est que le film n'est pas qu'une comédie macabre qui se moque (gentiment) de la mort et de son commerce. La seconde partie du film abandonne d'ailleurs progressivement l'histoire de Mémé Berthe pour se focaliser sur l'incapacité d'Armand dont le plus gros défaut est de ne pas savoir trancher entre sa femme et sa maitresse. Bref, Adieu Berthe est aussi une comédie de l'indécision, et c'est là que le bat blesse. En effet, le genre est quand même omniprésent dans le cinéma français depuis une bonne décennie, et ce genre d'histoire d'homme tiraillé entre deux femmes, franchement on l'a vu tellement de fois qu'il faut vraiment un génie comique hors du commun pour le révolutionner. Ici, notamment dans les scènes dans la maison de retraite avec Lemercier (dont la fantaisie est un peu bridée exceptée dans l'hilarante scène du cimetière au tiers du film), l'indolence est de mise, tant et si bien que le film perd du rythme et de l'intensité necessaire et que le coté farfelu du film, pourtant charmant au début, finit par lasser et empeche le spectateur d'être enthousiasmé.
D'ailleurs, c'est un peu l'impression générale de la salle que j'ai ressenti lors du générique de fin, générique que le public n'a pas applaudi, chose très rare dans toute avant première digne de ce nom. Et les interventions des spectacteurs ont abondé dans ce sens, en saluant la douce folie du film et la poésie du film, mais sans jamais paraitre totalement convaincu par le film.
Dommagepour Bruno Podalydès, qui, à l'occasion de son passage sur l'estrade (désolé pour la qualité de la photo) a témoigné d'une très intelligence de vue et d'une grande spiritualité à toute épreuve, faisant regretter encore plus le décalage entre l'esprit du film et le résultat final.
Cela dit, si vous avez l'occasion d'aller voir en salles cet Adieu Berthe (on offre pas mal de places sur la blogosphères pour le voir), ne le ratez pas, malgré mes réserves, le film constitue un divertissement de belle qualité à ne pas négliger.