Les Kaira : quand la banlieue fait (un peu) rire
Je fais partie de ceux qui ont pris le film La Haine comme un vrai choc lors de sa sortie en 1995. En effet, pour avoir suivi ma scolalisation dans des établissements situés en pleine zone un peu chaude, je connaissais pas mal la banlieue, même si j'habitais personnellement du coté plus résidentiel.
Et si le film de Mathieu Kassovitz m'avait produit un tel effet, c'est bien parce qu'avant lui, le cinéma français n'avait jamais osé posé un oeil ( enfin plutôt une caméra) sur les habitants de ces zones stimgmatisées par les médias et outre la maitrise plein de virtuosité de Kassovitz, le film valait aussi pour son regard plein d'acuité sur ce que la presse appelait les "zones de non droit"(je me souviens d'un titre du Parisien à l'époque) .
En allant voir les Kairas, et alors que je pensais plutôt, au vu de la promotion et des reportages du film, voir une comédie totalement régressive à la façon Appatow sur des types un peu demeurés, bref une farce totalement décervelée (ce qu'il est aussi par moments, j'ai beaucoup pensé à la Haine (auquel le film fait constamment référence, Kassovitz étant le parrain du film), dans un versant effectivement bien plus léger.
Il faut dire que, sous couvert d'une bouffonnerie totalement assumée, les Kaïra dépeignent un monde déprimé de la banlieue et des jeunes en mal de repères identitaires : aucune de culture, pas d'argent, pas de copine. Pour le réalisateur Franck Gastambide, "Les Kaïra va beaucoup plus dans le sens des Lascars que de Ma 6-T va crack-er. On dédramatise d’une certaine manière. Ce qui d’ailleurs me semble plus proche de la réalité : dans la plupart des cités, on se marre beaucoup, on ne fait pas de tournantes et on ne brûle pas de bagnoles "!
Le film tente ainsi, et plus ou moins habilement, de surfer entre comédie sociale, sur les banlieues et comédie trash et graveleuse, avant d'aborder une troisième partie, à la fin du film, lorgnant plus vers la comédie sentimentale.
Cette dernière partie est d'ailleurs de loin la moins convaincante, et le film, après un début bien incisif et mordant avec des apparitions de gues star totalement savoureuse (Eric Cantona en entraineur d'équipe de foot de nains, Elie Semoun dans son propre rôle, et surtout François Damiens en producteur de porno pour la scène la plus hilarante du film), a nettement tendance à faire du surplace.
On voit bien que Franck Gastambide est largement plus habitué aux formats courts, les kaira étant au départ une série de court métrages d'une minute 30 faits pour le web et achetés ensuite par Canal plus avec le succès que l'on sait.
A cause de cette faiblesse dans l'écriture, et d'autres petits défauts bien visibles (le peu de soin apportée au cadre et à l'image, du évidemment au manque de moyens et afin sans doute d'accentuer l'aspect documentaire certes, mais qui rebute quand même pas mal), Les Kaira est une oeuvre qui m'a semblé être plus convaincante par son aspect sociologique que par son versant comédie, ce qui entrave un peu le plaisir de ce film qui, sur le papier, aurait pu etre encore bien plus explosif qu'il ne l'est à l'écran!!!
Edit : Et un grand merçi à Cliffhanger chez qui j'ai gagné des places pour voir le film!!!
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