Sur la planche: la belle urgence du cinéma marocain
Hasard de mes chroniques cinéma, deux des derniers films que j'ai pu voir en février se déroulent dans la même ville, une ville qui n'est pourtant pas celle la plus fréquentées par les studios de cinéma. Par cette ville, je veux parler de Tanger, un port au nord du Maroc, qui était déjà le décor du beau film de Nadir Moknéche, Goodbye Morroco, et qui est également le cadre du film Sur la planche de Leila Kilani que je viens de voir en DVD, dans le cadre de mon programme DVDtrafic, qui m'a, je le reconnais, particulièrement gaté pour cette session là .

Les ouvrières sont réparties en deux castes : les textiles et les crevettes, ces dernières étant bien plus stigmatisées que les autres, ne serait ce qu'à cause de l'odeur persistante qu'elle trainent autour d'elles .
En tournant un documentaire sur Tanger, la cinéaste a commencé à s'interesser à ces filles là et a décidé de créer une fiction autour d'un quator travaillant dans cette usine, et qui vont tout faire pour tenter de trouver des moyens pour s'élever de leur conditions, notamment financièrement.
Badia et sa copine Ismal travaillent dans une usine de décorticage de crevettes. Elles ne tarderont pas à rencontrer Asma et Nawal, jeunes ouvrières dans le secteur textile. Ensemble, elles vont faire les quatre cent coups. Et nous d’escalader, de dévaler les sentiers de la criminalité à leur suite.
Le film veut donc absolument saisir l'urgence qui soutend ces filles boules d’énergie incontrôlables, assez représentatives de cette jeunesse arabe bouillonnante qui s’est exprimée lors du printemps arabe, survenu après le tournage du film, qui en portait donc quelques prémisses.
Pour illustrer l'urgence qui anime ses personnages, la cinéaste a opté pour une mise en scène trés mobile, trés caméra à l'épaule, entre Cassavetes, et le Rosetta des Frère Dardenne.
La réalisation est donc extremement rythmée, frénétique, et on reste donc pendant toute la durée du film collé aux basques de ces filles, et notamment de Badia, fille rebelle et révoltée, animée par une rage permanente ( qui peut parfois un peu lasser le spectateur) .
Si ce parti pris de réalisation, pleinement assumé et maitrisé, séduit la première heure, il tourne malheureusement ensuite un peu au procédé, d'autant plus que l'intrigue fait du surplace et ne va pas assez loin dans le polar social qu'on aurait pu et voulu attendre.
Et du coup, de rythmé et révolté, on ne voit plus que l'autre pendant de cette réalisation, à savoir le coté aride et un peu désincarné de ses personnages.
Bref, un film interessant pour sa réalisation et le Tanger original qu'il nous montre, mais qui ne convainc, hélas, qu'à moitié...
Parmi les bonus, notons un très interessant reportage qui nous permet de suivre pendant près d'une demi heure, l’équipe du film lors de sa venue à la Quinzaine des réalisateurs de Cannes en 2011 , on y apprend notamment que la réalisatrice a connu quelques problèmes pendant le tournage à Tanger, ville où visiblement rien ne se déroule facilement.
Puis un autre bonus original nous permet de suivre la présentation du film en avant-première au MK2 Beaubourg, avec encore une fois un entretien avec la réalisatrice qui montre une nouvelle fois la croyance profonde de Leila Kilani en la force de son sujet et de son cinéma.
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