Le bleu de la nuit, le bouleversant travail de deuil de Joan Didion
Décidément, il y a certaines personnes qui connaissent une terrible loi des séries question tragédie familiales. Car après le décès brutal de son mari qu'elle avait magnifiquement raconté dans L’Année de la pensée magique la romancière et scénariste américaine Joan Didion a peu de temps après perdu sa fille adoptive, Quintana, décédée peu après à l'âge de 39 ans d'une hémorragie cérébrale après plusieurs mois d'agonies.
Et comme pour l'année de la pensée magique, le seul moyen qu'elle a trouvé, c'est de consigner ce drame terrible dans un récit, le Bleu de la Nuit, paru au Livre de Poche en ce début 2014.
L'auteur y raconte Quintana dans sa globalité, et surtout les souvenirs de sa vie avec Quintana, cette petite fille à la destinée et à la personnalité assez incroyable, particulièrement intelligente et précoce, qui a écrit un premier livre avant même ses 15 ans, et qu'une maladie va briser les ailes .
Le bleu de la nuit ne suit pas un fil chronologique classique, Joan Didon nous livre plutôt un patchwork, un kaléidoscope de souvenirs et de réflexions qui nous entraine un peu partout dans ce qui a fondé ce fort lien filial, des difficultés entourant de l'adoption à l'agonie en passant par la solitude et le si difficile travail de deuil.
"Le bleu de la nuit", comme l'était évidemment le précèdent livre de l'auteur, est donc un magnifique carthasis, une antidote au chagrin et à la douleur en même tant qu'un très bel hommage à ceux qui nous quittent. Joan Didon cultive le paradoxe de nous livrer des souvenirs, alors qu'elle deteste ce terme, car pour elle,«Les souvenirs, c'est ce qu'on ne veut plus se rappeler.»
Les thèmes abordés sont particulièrement éprouvants, mais l'auteur refute tout pathos et tout épanchement lacrymal. L'écriture est sèche sans être aride, et essaie de lutter contre la tristesse et la mélancolie, même si celles ci livrent une bataille particulièrement aride. Joan Didon veut à tout prix se rappeller les souvenirs des jours heureux passés, le souvenir de ce qui a été comme garde fou salutaire pour croire à de nouveaux jours heureux.
Une lecture pas toujours aimable, mais essentielle et bouleversante!!