La saison des femmes : Inde, ma douleur...
Après l'année dernière le sublime Mustang sur la difficile situation des femmes en Turquie, et quelques mois après l'âpre mais salutaire Much Loved sur celles de leurs homologues marocaines, "La saison des femmes" qui est sorti en salles en juin dernier- rencontrant un beau succès d'estime avec 160 000 entrées- et en DVD ce 20 septembre chez Pyramide Vidéo, se propose de sonder la non moins difficile condition de la femme indienne, en nous plongeant en plein dans la campagne indienne où quatre amies essaient tant bien que mal de se révolter face à leur asservissemment inhérent à leurs conditions féminines.
Comme elle l'indique dans le passionnant entretien de 25 minutes inclus dans les bonus de cette belle édition DVD, la réalisatrice Leena Yadav s'est largémement inspiré, pour écrire son scénario choral et foisonnant, de vraies vies et de femmes réelles, qu'elle a rencontré pour mieux comprendre leurs situations, des femmes qui ont toutes en commun de vivre sous la coupe des hommes, une souffrance forcément universelle tant ces situations sont prégnantes dans le monde entier, encore aujourd'hui.
Comme Mustang et Much Loved, la place de la femme dans une société machiste et rétrograde est disséquée avec finesse et en réussissant à éviter la grande majorité du temps les stéréotypes et les raccourcis, grâce à de très beaux personnages de femmes magnifiquement écrits.
Alors que dans les deux oeuvres précitées, c'est la charia qui conditionne les principes et la soumission de la loi, ici c'est respect de la caste qui asseoit la domination masculine, mais là encore dans le respect d'une (prétendue) loi divine, malheureusement encore une fois au détriment de l'équité et de la liberté individuelle.
A voir la facon dont la cinéaste décrit la réalité de son pays et surtout cette problématique question de la place de la femme dans une société traditionnelle encore très marquée par la prédominance de l’homme, on comprend que son film ne soit jamais sorti en Inde, contrairement aux films de Bollywood qu'on voit le plus souvent quand on voit un film indien- exception faite du récent LunchBox, bien plus léger et moins dénonciateur que cette saison des femmes.
On ne pourra que louer le courage de Leena Yadav de se confronter, de manière plutôt frontale- même si certains passages chantés très Bollywood apportent une distance bienvenue- une réalité prégnante de l’Inde d'aujourd'hui que les occidentaux ne connaissent pas forcément..
On mettra donc de coté certaines - légères- maladresses de réalisation- en revanche, la photographie du film, qui est l'oeuvre de Russel Carpenter, le chef op de Titanic de Cameron, excusez du peu, est magnifique- ou certains personnages masculins manquant d'épaisseur pour se focaliser sur l'essentiel, à savoir cette très belle histoire d'amitié féminine entre ces héroïnes qui vont puiser des forces communes dans leurs quête d'autonomie, et dans ce beau combat pour leurs difficiles mais incontestables émancipations.