Il est plus que temps en  ce début octobre d'attaquer le ( seulement?) second billet musical de la rentrée, et après Cocoon, un groupe francais mais qui chante dans la langue de Shakespeare, on met un petit focus sur des groupes de l'Hexagone  qui ont eux choisi de faire rimer la langue de molière avec des sonorités aux influences diverses, mais qui dans l'ensemble se sont surtout et largement  inspiré de la pop des années 80, mais ont gardé heureusement pour nous, le meilleur de ces années là.

Une nouvelle génération de chanteurs pop, imprégnée par la culture électronique et la musique de leurs ainés qui le font avec une grande classe et avec un désir  de  parfois faire danser les auditeurs, soit de les plonger dans un état un peu mélancolique.

Des références souvent communes, de Michel Berger à son inséparable France Gall en passant par Alain Chamfort, Etienne Daho ou Eli & Jacno, pour, au final, une même volonté de bousculer la pop française en lui donnant un coup de fraîcheur coloré et trouvant un style résolument intemporel.

Petite revue en trois jeunes artistes que j'ai découvert en cette rentrée et qui marquent fortement les esprits avec trois coups d'essais qui sont pas loin d'être des coups de maitre :

 1 Paradis; Recto verso 

 Fruit d’un long travail initié il y a presque 4 ans, le premier album de Paradis, qui est sorti le 23 septembre dernier chez Barclay, méritait largement qu'on soit un peu patient.

Ces 4 années c'est ce temps de maturation rare, mais nécessaire, tant le duo formé des deux parisiens Simon Mény et Pierre Rousseau  nous offre un album particulièrement réussi, qui mélange avec une maitrise indéniable le meilleur de la chanson française des années 80 - de Laurent Voulzy à Etienne Daho- avec une pointe de musique éléctronique très contemporaine.

Résultat des courses : l'ensemble dégage un spleen assez splendide, un côté aérien, aquatique et fluide  pleinement assumé, des textes poétiques et plus profonds qu'ils n'en ont l'air  pour  ce label "french Touch"- label qu'on a collé à pas mal de groupes d'air à Daft Punk,  totalement revendiquée et d'une belle sensibilité, qui défriche  au final des voies musicales peu souvent explorées dans la pop hexagonale. 

Recto Verso illustre parfaitement ce paradoxe qui prouve qu'on peut toucher le coeur et l'âme avec des machines, tout en gardant un respect profond pour nos grands chanteurs de variétés- l'album comprend notamment à la fin de l'album une très belle reprise de Bienvenue au Paradis d'Alain Chamfort, et le groupe s'était fait connaitre avec une non moins très belle reprise de La Ballade de Jim de Souchon...

A l'écoute de ce premier album, Recto Verso, on terriblement envie de croire à l'eden promis par le nom du groupe .

 En extrait l’éponyme « Recto verso »  qui illustre parfaitement cet esprit autant moderne que gorgé de bonnes influences

 2.Cléa Vincent; Retiens mon désir

Encore une artiste qui comme Paradis, réussit à évoquer des illustres ainés tout en les combinant à des sonorités assez électro et bien d'aujourd'hui.

Cléa Vincent est très jeune, mais elle est déjà dans le milieu de la scène française depuis plus de 5 ans-  et elle incarne assez magnifiquement cette génération respectueuse des générations précédentes, tout en les combinant à des tonalités assez dancefloors.

Avec une très belle voix enfantine- on pense parfois à France Gall ou Francoise Hardy, des références envahissantes mais dont elle se sort très bien-  Cléa trousse des comptines électro-pop plutôt groovy, dans lesquelles l’on retrouve de multiples influences  de ces années 80 qu'on aime tant ( Depeche Mode, Lio, Kylie Minogue, Etienne Daho...), parsemené d'une candeur et d'une désinvolture masquant joliment des textes parfois teintés d'une certaine cruauté.

Tout cela est présent dans  son premier album, « Retiens mon désir », dont la sortie est prévue pour ce vendredi 7 octobre 2016- le même jour que la sortie du chef d'oeuvre de Vincent Delerm on y reviendra- au  label Midnight Special Records ,  particulièrement bienvenue dans le paysage musical français avec un côté pop acidulé- un adverbe qu'on utilise souvent péjorativement mais qui ici colle parfaitement au propos et à l'esprit .

Un album composé avec l'aide de Raphaël Léger, batteur émérite du groupe Tahiti 80 qui co-compose et arrange avec des titres légers ( j'ai pas fait expres pour le jeu de mot :o) parmi lesquels on retiendra notament "Retiens mon désir" , "Soulevant" et "Clair-obscur" au panthéon des grandes réussites de ce premier opus, dans lequel les ritournelles sentimentales prennent un abord plus singulier  et profond qu'il n'y parait au premier abord. 

"Et je cours après le soleil alors qu'il est alors trop chaud

Et je cherche un endroit, un endroit où aller, où tu seras"

Une artiste qui réussit à conserver un univers singulier particulièrement rafraichissant  sur la scène musicale française actuelle, et un univers tout à fait dansant, bref un opus idéal pour faire swinguer les longues soirées d'hiver à venir.

Pour illustrer  ces propos,  jetez un oeil- et une oreille sur " je m'y attendais pas", premier extrait de l’album qui montre bien son univers décalé,  dans laquelle images amateurs  nous font penser au visionnage d'une vieille cassette VHS  toute droite sortie... des années 80!!

3."The Pirouettes" Carrément carrément

On finit cette revue de jeunes artistes issus de la même mouvance très eigthies avec sans doute leur meilleure incarnation, The Pirouettes.

Le 16 septembre dernier est sorti "Carrément carrément" leur premier album, sous leur propre label Kidderminster ,d'un jeune couple qui eux aussi donnent un joli coup de fraicheur à la pop française, partagé également entre des réminiscences vaguement  nostalgiques et un désir d'aller de l'avant.

Au départ, on a deux jeunes lycéens d'Annecy issus de la génération Y, qui est aussi celle de La Femme ( un groupe dont  tout le monde chante les louanges mais qui me laisse un peu plus froid, certainement trop psychédélique et barré pour moi),  qui revendiquent totalement leurs gouts pour la  pop 80’s et de chanter en français contrairement à pas mal de leurs collègues de la même génération.

Assumant aussi leur volonté de faire de la musique éléctro sur laquelle ils mettent des paroles  exclusivement  en français, ils réussissent avec une grande habileté à  mettre à l'honneur des sonorités anciennes dans un esprit très contemporain. 

Comme pour Paradis, le duo a mis  quatre ans avant de sortir  son premier album, signe d'un projet murement réfléchi et soigné des orchestrations aux textes.

Des textes plutot solaires et radieux, d'où pointent cependant quelques punchlines plus amers et cinglants-  The pirouettes dit aussi beaucoup aimer le rap plus acerbes et assez lucides sur le temps qui passe et des problèmes sociétaux actuels.

Un album élaboré avec pas mal de simplicité, de sobriété, et un revival des années 80; comme je le disais quelques lignes auparavant qui est sans doute le plus prégnant encore des trois artistes présentés, comme en témoigne cet escalier, premier extrait de sa single, qu'on a envie de dévaler en courant tellement on est ivre de joie en l'écoutant.