L'attrape-rêves, un beau film solaire et polaire sur le pardon
On voulait revenir ce dimanche soir la sortie qui risque d'être un peu confidentielle mercredi prochain- grosse semaine de sorties avec la palme d'Or loachienne et le génial Sing Street ( on en reparle vite) de "l'attrapes-rêves", un film pourtant présenté au Festival de Berlin 2014- déjà, et qui est surtout l'oeuvre d'une cinéaste qui avait reçu l'Ours D'or au même Festival de Berlin cinq ans auparavant avec "Fausta", conte féministe contemplatif et profond dans les magnifiques décors des Andes.
Cette cinéaste, c'est la péruvienne Claudia Llosa qui retrouve ici des thèmes assez proches de Fausta, et notamment sur la complexité des femmes, à travers un personnage de mère ambigu et pleine de contradicition et de culpabilité.
Cette mère- la trop rare Jennifer Connely, un de mes fantasmes de jeunesse- a abandonné son fils ainé Ivan lorsque celui ci avait une dizaine d'années, car à la mort de son fils cadet a préféré fuir la civilisation , aux confins du Cercle Polaire pour exercer ses talents de guérisseuse , ses dons lui étant apparus par hasard lors de la maladie de son enfant (ce qui est d'ailleurs la première scène assez mystérieuse du film).
Le synopsis, variation sur le pardon, et l'impossibilité de résilience interroge de manière plutôt subtile ce qu'est une mère et tente de savoir si on continue à être une maman même après avoir abandonné la chair de sa chair et qu'on se sent coupable de la mort d'un autre enfant.
On pourra certes reprocher au scénario de ne pas totalement répondre- sauf à la toute fin- à ces passionnantes questions, d'exploiter pas autant qu'on aimerait les pistes qu'on voit effleurer, au détriment d'une quête - le film alterne flash backs sur le pourquoi de cet abandon et le présent qui voit le fils ainé tenter de retrouver sa mère 20 ans après, aidé par une journaliste française jouée par la toujours remarquable Mélanie Laurent-, d'autant plus que cette enquête possède un rythme souvent trop lent et manque de force.
Il n'en reste pas moins que le propos du film est passionnant, et le dénouement assez poignant.
A cela, il faut reconnaitre que les décors froids et glacés d'un Canada polaire- la province de Winipeg (rendu célèbre en France grâce à une chanson de Julien Doré) sont vraiment majestueux et parfaitement mis en valeur pour la caméra aérienne de Llosa, offrant à la fois le mystère inhérent à ces secrets de famille enfouis, et, en même temps, la lumière nécessaire pour approcher un éventuel pardon.
Un pardon qui est la clé de voute de ce film certes inégal mais qui offre quelques scènes profondément émouvantes, ainsi qu'une belle réflexion sur l'incapacité de se délester de son passé et la faculté à atteindre ou non la rédemption chez ceux qu'on a blessé....