Ce Rogue One n'est définitivement pas pour nous...
Allez, maintenant que l'esprit de Noël s'est évaporé avec la visite du grand bonhomme à la barbe blanche, on peut jouer un peu les oiseaux de mauvais augure et dire du mal d'un film que tout le monde- ou presque- est allé voir dès sa sortie le 14 décembre si on en croit tous les chiffres d'entrées les plus ahurissants qui soient..
Et moi même je suis allé voir ce "Rogue One", puisque c'est évidemment de lui dont il s'agit- dès le premier jour de sortie, pas forcément par gout- vous pouvez vous en douter vu les film que je défend sur baz'art- mais parce que j'avais été invité par Orange à une projection privée au Pathé Vaise dudit film.
Hélas trois fois hélas, on ne peut vraiment pas aller voir Rogue One si on n'a jamais vu auparavant une seule image de la saga - ce qui est mon cas, comme j'avais pu vous en parler lors de l'expo Star Wars Identites -je l'ai vérifié à mes dépens au cours de ces 2h 18 d'un ennui tellement profond que j'ai cru qu'elles n'allaient jamais avoir de fin...
Mais comme je n'ai pas compris un traitre mot de qui se tramait sur l'écran- quelle étoile noire? quelle planète crypton? et surtout qui sont ces bonhommes à tête de poisson?- je me suis dit que je ne pourrais décemment pas écrire une chronique un tant soit peu argumentée et construite de ce film..
Heureusement mon comparse Pablo lui a également vu le film et contrairement à moi il connait par coeur cette saga.. Je pensais donc qu'il allait défendre allégrement ce nouveau long métrage qui visiblement plait beaucoup aux fans.. malheureusement, je me suis trompé..et dans les grandes largeurs, la preuve..
"Avec de l'espoir, la rébellion est possible": cette réplique, prononcée par Jyn Erso, l'héroïne, au moment de la concertation d'attaquer ou non Scarif (base où sont entreposés les plans de l'Etoile de la mort), sans saveur ni profondeur, sinon minimaliste, sonne comme un abus de faiblesse révélateur de ce spin-off, qui n'a jamais aussi bien porté son sens de traduction littérale (c'est-à-dire "sous-produit"...).
Sorte d'O.V.N.I galactique cinématographique venu de nulle part, à plusieurs étages et vitesses, ce prequel, situé entre l'épisode III et IV (qui raconte comment les rebelles ont réussi à récupérer les plans de l'arme de destruction), n'est que l'ombre des premiers opus de la saga.
Cela dit, ce dernier ne souhaite en aucun cas marcher sur les gigantesques traces de pas qu'avait laissées George Lucas, mais plutôt de s'en servir pour tirer un film plus sombre, plus nihiliste, plus violent, ressemblant à une peinture hypnotisante de notre société actuelle.
Aussi, le fantasmagorique court après la cadence infernale que prend le film dans sa dernière 1/2 heure: les combats sont époustouflants, l'espace-temps n'en est plus un, et les décors lunatiques de cette île (Scarif, ndrl), qui se transforme en une arène délimitée par des lices cosmiques, caractérisent l'essence mortel de l'empire Vador, ainsi que du dispositif d'Edwars (Monsters, Godzilla) lui-même.
Avec une mise en scène léchée, il essaye de donner un maximum d'envergure et de crédibilité à des personnages plats, coincés dans le concept même du "protagoniste", aux psychologies inexistantes et aux indentités, pour certaines, déjà oubliées. Outre la direction d'acteurs catastrophique, le scénario désuet de Tony Gilroy (déjà pas très à l'aise derrière la caméra avec Jason Bourne: L'Héritage) plombe ce long-métrage, au découpage pourtant énergétique.
Tout d'abord, le traitement du rapport à la paternité, dans une première partie ennuyeuse au possible, est d'une singularité trop déconcertante pour captiver. En effet, le père de Jyn, Galen Erso, est ingénieur de l'empire Vador et superviseur, sous la contrainte, de l'Etoile de la mort. Le "papa poule" qu'il était, il y a une quinzaine d'années, se retrouve, malgré lui et de façon indirecte, en opposition avec sa fille.
Malheureusement, la sincérité organique et charnelle entre ces deux corps familiaux, rongés par la culpabilité, s'évapore au fil des minutes, pour laisser place à des conflits internes de "l'Alliance Rebelle" ou de "l'Empire Galactique" sans grand intérêt. Ceci est dû, en partie, au jeu des acteurs, ridicules et fantomatiques.
Le metteur en scène anglo-saxon peut justifier la première partie de son schéma scénaristique en la présentant comme l'introduction (ou la situation initiale, au choix) de sa trame narrative. Mais le parti a été pris de nous informer entièrement, et de façon, hélas, un peu trop didactique, avant l'assaut final, qui ne dure qu'une quarantaine de minutes dans la temporalité du récit.
Pour un film de 2h13, ce n'est guère important, et on peut, au final, se réjouir du fait qu'Edwards, à l'aise avec les nouvelles technologies, arrive à composer quelque chose (en reprenant des procédés propres à la saga, comme des plans courts, la caméra à l'épaule, mais aussi la bande-son, pompeuse par moments...), avec du vide abyssal.
Ce script, pas très enrichissant pour le spectateur, peut même s'avérer douteux, quant à la véracité du sens des dialogues. Par exemple, quand l'aveugle (Chirrut Imwe, interprété par le chinois Donnie Yen) prononce, telle une prière, ces quelques mots: "Je suis avec la Force, et la Force est avec moi". Cette déclaration peut paraître confuse, et cache, peut-être un étrange côté prosélytique assumé, non loin du fanatisme. Ce qui nous confirme la dérive religieuse hiérarchisée du cinéma de genre international, après Tu ne tueras point de Mel Gibson.
Enfin, si vous vous réjouissez de l'humour décalé de K-2SO, le robot du vaisseau Rogue One, vous aurez sans doute un haut-le-coeur en apercevant le Grand Moff Tarkin, interprété par Peter Cushing, mort en 1994 et ressuscité par la réalité virtuelle.
Ainsi, ces montagnes russes émotionnelles nous cache, parfois, à tort ou à raison, la triste réalité de ce film anodin et évitable, et d'une saga en décadence.
Rogue One : A Star Wars Story - Bande-annonce finale - VO