Le vertiges des falaises, Gilles Paris : un roman choral plein de mystères et de secrets de familles
"La petite m'inquiète. Pas une larme pour pleurer son père. Elle n'est heureuse qu'au bord des falaises. Aucun d'entre nous ne s'y risquerait, car à certains endroits, la terre s'effrite et la chute serait inévitable. Le chemin qui bifurque après nos maisons longe ces hauts escarpements sur des centaines de mètres. "
Après le best-seller Autobiographie d'une Courgette, et surtout une adaptation cinéma par Claude Barras qui a récolté des lauriers dans le monde entier, on attendait avec énormément d’impatience le nouveau roman de Gilles Paris.
Dans celui-ci qui porte le titre (qui fait très saga de l’été sur France 2) du "Vertige des falaises", Gilles Paris signe un roman choral qui se dévore comme une grande saga romanesque estivale, et dans lequel le tumulte des sentiments jaillit des plus sombres secrets familiaux.
"La Maison biscornue», qui est sans doute l’un des romans les moins connus d'Agatha Christie, aurait, selon les intentions de l'auteur, largement inspiré son nouveau roman, dans lequel l’ombre de Daphné du Maurier est également très présente.
Le nouveau roman de Gilles Paris se déroule en majeure partie sur une Île perdue au milieu de nulle part. Cette île, où tous ses habitants se connaissent, s'épient, une île très difficile à localiser géographiquement- on pense cependant aux iles bretonnes ou aux iles anglaises- est presque un personnage à part entière du livre ...
" Je suis sûre que là haut, c'est plus sympa qu'ici. J'y emmenerai Rose, Jane, Olivia et Vincy. Non pas lui, Jean n'a pas besoin d'un garçon là ou tout va bien. Et je sais que Rose, Jane et Olivia n'auront pas envie d'hommes non plus, on sera mieux entre femmes. Les hommes sont dégoutants. Les hommes sont violents. Les hommes sont stupides."
Sur cette Île mystérieuse y habitent notamment la famille Mortemer, et notamment les trois femmes de la famille dont la jeune Marnie ( les références à Hitchcock sont très présentes aussi et pas seulement avec le prénom du personnage principal) , sa mère Rose et sa grand-mère Olivia, qui ont trouvé refuge dans une grande maison de verre et d'acier du nom de "Glass".
On notera d'ailleurs que le choix du nom de cette maison n'est pas anodin : il signifie en effet "verre" en anglais. Le contraste est fort entre cette idée de transparence et l'opacité des relations entre les êtres.
Gilles Paris tisse ici un roman choral parfaitement maitrisé avec différentes narrations de personnages : Marnie (jeune adolescente espiègle, rebelle, très mature pour son âge) ; Olivia (la grand-mère de Marnie, femme riche et puissante qui règne sur l'île de Glass ; Prudence, la domestique ; Rose (la maman de Marnie, atteinte d'un cancer avancé). Le père (Luc) et le grand-père de Marnie (Aristide) sont tous deux décédés, dans des circonstances peu claires.
Le Vertige des falaises est avant tout un bel hommage aux femmes de toutes les générations : incontestablement, les personnages féminins sont plus intenses que les personnages masculins- sans doute un peu trop chargés- qui sont dépeints comme des êtres abjects, volages, joueurs et même violents. Ces femmes, magnifiées par l'auteur, ont toutes en commun le fait d'être victimes, chacune à leur manière, des hommes. Et comme dans Autobiographie d'une courgette, le roman décrit avant tout la capacité de résilience des êtres victimes des violences de la vie .
Comme dans tout bon roman choral, le puzzle narratif mis en place par Gilles Paris est parfaitement élaboré : les différentes voix brouillent les pistes, nous font sans arrêt changer de perspective. On revient sur le récit d'autres personnages pour confronter les versions, qui ont des similitudes mais ne coïncident jamais vraiment. Qui détient la vérité ? Qui ment ?
Seules les dernières pages de ce Vertige des Falaises dévoileront les secrets de cette famille, comme dans tout bon page turner qui se respecte.
La plume de Gilles Paris achève de donner supplément d’âme à ce probable futur bestseller de l’été : on sent en effet que rien n'est laissé au hasard. Chaque mot est en effet bien calibré, porté par des chapitres courts et un style qui va à l'essentiel.
Gilles Paris parvient à installer une atmosphère extrêmement pesante, tendue. L'omerta qui règne sur l'île, les intempéries qui la menacent, les relations étranges entre les personnages, les secrets de familles, les non-dits : tout concourt à créer une ambiance presque étouffante.
Un vrai roman d’ambiance, différent de ce à quoi nous avait habitué l’auteur, qu’on lit avec envie et parfois même une certaine stupeur , au fil des révélations familiales assez terrifiantes.
Et si tout va bien, l'auteur nous en dira très bientôt plus sur son nouveau roman dans une interview à venir...
En attendant sachez pour les lyonnais et habitants de la région que ce Samedi 20 mai à 16h, Gilles Paris à Decitre Confluence pour une rencontre et dédicace de ce roman "Le vertige des falaises".