Sorties poches juin 2017 spécial littérature française
Encore une revue de lectures en poches qui sont sortis ces derniers jours avec 4 romans français d'auteurs plus ou moins reconnus dans le milieu littéraire qui nous offrent chacun une de leur dernière production qui a attiré notre attention :
1. Romain Monnery, un jeune homme superflu ( Le Livre de Poche)
" Trop de gens présentent leurs condoléances comme s'il s'agissait de billets à composter pour se donner de bonne conscience. "
Que la vie n'est pas simple lorsque l'on n'et plus un tout jeune homme, sans responsabilité, et que l'on n'est guère tenté par une vie d'adultes aux obligations peu attirantes.
Notre héros se raconte à la deuxième personne du singulier, colocation avec le Merou et la Fille Cool, ses stages, ses sorties et ses dragues toutes ratées, toutes ces épreuves qui sonnent tellement justes sont racontées avec un humour savoureux.
Après le succès du Saut du requin et Libre et Assoupi, adapté il y a quelques années au cinéma avec Baptiste le Caplain, le romancier Romain Monnery prolonge sa veine légère autour d'un trentenaire un peu dilletant et largement adulescent.
Les chapitres, extrêmement courts et rythmés, rendent particulièrement agréable la lecture de ce livre et on pourra gager sans prendre trop de risques que jeunes et moins jeunes passeront un parfait moment de détente lors d'une bien agréable lecture qui est tout sauf superflue.
Toutes les informations liées à la parution poche ici même :
http://www.livredepoche.com/un-jeune-homme-superflu-romain-monnery-9782253069959
2- 7; Tristan Garcia ( Folio)
« D’après certains, il s’agissait d’une guerre du système contre tout le reste ; d’après d’autres, d’un conflit entre les puissances d’argent et les déshérités, ou bien entre la laïcité et la foi, entre le centre et la périphérie, entre Paris et la province. Ou, au contraire : de la liberté contre le fascisme, de l’autonomie de l’individu contre le patriarcat et l’ordre traditionnel, peut-être de la société contre la communauté. Ou l’inverse. Sans doute un peu des deux. »
Le titre de ce livre est-il « 7 » ou « 7 romans » ?Car c’est bien sept romans qui n’en font plus qu’un qui nous attend. 7 ce chiffre mystique et mythique: les 7 jours de la semaine, les 7 plaies d’Egypte, les 7 merveilles du monde, les 7 femmes de Barbe-Bleue, les 7 péchés capitaux…les bottes de 7 lieues du petit Poucet qui était d’une fratrie de 7… depuis l’enfance le chiffre 7 nous tient en éveil.
Le héros de « 7 romans » aura sept vies comme les chats et chaque vie posera une question philosophique ou métaphysique car Tristan Garcia avec l’audace de sa jeunesse et son savoir universitaire ne tente rien de moins que d’expliquer la condition humaine. Jusqu’où l’homme peut-il aller pour donner un sens à sa vie ?
Sept histoires, sept contes pour étancher notre soif de connaissance et pour nous rassurer, nous simple mortel. Une vie sans fin avec l’impression de lire sa vie dans une boule de cristal, (tiens ! qui étaient au nombre de sept chez Hergé) voilà ce qui attend l’immortel de Tristan Garcia, et pour le lecteur, un sacré voyage philosophique et littéraire.
Après avoir dévoré « 7 romans » de Tristan Garcia, on peut dire que je viens de lire certainement un des romans le plus étonnant, le plus ambitieux, le plus jouissif et le plus ébouriffant de cette année.
Vertigineuse mise en abime, ce récit gigogne a la force des grands romans fantastiques et philosophiques du XIXe et XXe siècle : l’ombre de H.G Wells, Oscar Wilde… Ray Bradbury, Isaac Asimov….plane sur « 7 romans » Surtout que les 570 pages ne vous effraient pas, on ne les sent pas passer.
3. Celle que vous croyez, Camille Laurens ( Folio)
"Toute la construction sociale se dissout dans le rapprochement des corps ou, si elle se maintient, c'est qu'il n'y avait qu'elle : l'obsession de la maîtrise, la peur ou la négation de l'autre, la volonté de pouvoir. "
Dans Celle que vous croyez publié en ce début 2016 où elle prolonge l'auto fiction développée dans ces bras là, et certaines de ses thématiques, notamment celle de la condition féminine, mais en choississsant comme toile de fond les relations virtuelles, et notamment sur Facebook, un sujet qui ne peut que passionner l'habitué de la toile que je suis.
Comme pour Dans ces bras là, on devine que la dijonnaise a puisé dans son versant autobiographique pour construire ce roman aussi vertigineux que le quatrième de couverture le laisse entendre.
Roman intense, ingénieux , et toujours parfaitement maitrîsé, multipliant les surprises et les rebondissements, ce jeu de miroir proposé par l'auteur est aussi et surtout une belle reflexion sur les relations sentimentales et sur la sexualité des femmes passé un certain âge est extrêmement brillante et percutante.
En effet, dans son nouveau roman, Camille Laurens ne nous cache rien de la difficulté pour les femmes d'être désirables après la cinquantaine, et si l'image des hommes, tous ou presque goujats et pas bien finauds, s'en trouve quelque peu amochée, cet état des lieux des femmes et de leur désirs à l'approche de la cinquantaine n'en est pas moins pertinente et assez proche de la réalité.
Et la façon dont Camille Laurens entremêle le réel et la fiction ne peut qu'épater et laisser béat d'admiration .
Exercice délicat s'il en est pour le lecteur de démeler le vrai du faux, d'autant plus que l'irruption dans une surprenante troisème partie d'une narratrice Camille, écrivain de son état ne fait qu'ajouter au trouble de la lecture.
Reflexion inventive et jubilatoire sur les faux semblants et le dictat des apparences "Celle que vous croyez" est incontestablement un des très grands romans(?) de cette rentrée de janvier 2016...
4.Dispersez vous, Ralliez vous Philippe Djian ( Folio)
"Un matin elle a traversé le couloir qui séparait nos appartements pour m'annoncer l'anniversaire de Yann, j'étais en tablier l'aspirateur à la main.Je n'étais pas au courant bien sur. Je suis restée muette j'ai baissé les yeux sur l'aspirateur, je l'ai arreté. Il avait le même age que mon père, ca m'a frappée sur le coup, 25 années d'écart le sol s'est dérobé sous mes pieds ,ca n'a duré qu'une seconde, mais au coup je m'en fichais. Je ne m'en plaignais pas."
Ce qui est pas mal avec les récits de Djian qui publie avec une régularité de métronome ( ou d'une Amélie Nothomb) c'est qu'ils sont immuables, et c'est même assez rassurant de voir que dès les prmières pages, on retrouve des
thématiques et un ton qui n'a pas bougé d'un iota.
Ici, on suit Myriam, la narratrice, de son adolescence à ses trente ans.
Timide, presque introvertie, elle vit chez son père que sa femme a quitté il y a bien longtemps et qui a viré son fils du foyer familial, ce dernier ayant provoqué le suicide des voisins. Myriam va se marier avec un voisin bien plus âge qu'elle et sans éprouver beaucoup d'émotions et de sentiments s'adapter petit à petit à la vie superficielle que lui offre son mari.
Relations toxiques, sexualité borderline, formules choc, style précis et à l'arrache : on n'est pas dans un roman de Philippe Djian, qui s'il n'atteint pas les hauteurs de ses meilleurs romans ( Impardonnables ou Oh pour prendre des récents exemples), laisse toujours admiratif par l'attrait qu'il présente au lecteur qui, même sans le vouloir vraiment se retrouve toujours pris dans ses filets...