Actu littérature février 2019 : 5 poches à vous conseiller !
Cinq lectures à petit prix à vous conseiller :
1 Ma reine; Jean Baptiste Andréa ( Folio)
"J'avais un plan. À la guerre, je me battrais, on me donnerait des médailles, je reviendrais, et là, tout le monde serait bien forcé d'admettre que j'étais un adulte, ou tout comme."
Shell est un petit garçon "pas comme les autres", loin d'être un génie, encore moins unfoudre de guerre. Il vit dans la station service où travaillent ses parents, les aide de temps à autre à servir les clients et ne manque pas une occasion d'arborer le blouson de la marque au petit coquillage jaune et rouge qui a inspiré son nom. Lorsqu'il manque de mettre le feu à la garrigue en fumant sa première cigarette, ses parents décident de l'envoyer en institut. Shell n'a alors qu'une issue : la guerre. Le lendemain, sa décision est prise : il endosse sa tenue de combat - son blouson au coquillage -, emporte son sac-à-dos avec son pyjama de velours vert et quelques victuailles, et part à la guerre, cet endroit inconnu dont il a entendu parler à la télé et qui semble, selon lui, le seul moyen de le faire grandir.
Nous voilà plongés en plein conte de fées, un genre dont on s'amuse à identifier les codes. Les repères spatio-temporels sont brouillés : on ne sait pas exactement où se situe l'intrigue, seulement qu'elle a lieu quelque part, en Provence. Une furtive allusion à l'année 1965 est faite. On y retrouve des personnages comme la Reine aux pouvoirs magiques, capable de disparaître d'un coup de baguette, laissant derrière elle et dans le coeur de Shell de la poussière d'étoile, et le Prince, plutôt gauche, mais néanmoins charmant.
Ce roman nous a enchanté. La personnalité de Shell est irrésistible, terriblement touchante. Chacun de ses mots vont droit au coeur, résonnait en nous avec une infinie justesse. Son apparente naïveté cachait à une grande lucidité, celle de l'enfant qui sait, car il est doté de la plus belle des intelligences : l'intelligence émotionnelle.
En refermant le livre, on sent que nous aussi, comme Shell, nous sommes tombés sous le charme de "Ma Reine".
2. Tout est brisé, William Boyle (Gallmeister )
"Rien ne lui avait été épargné. Ça avait commencé par Jimmy qui avait déménagé au Texas et ne l’appelait jamais.Puis Eddie était mort d’une tumeur au cerveau à l’hospicede l’hôpital Lutheran, et elle avait englouti toutes ses économies dans les funérailles. Lorsque sa mère s’était cassé lahanche en se rendant chez Augie’s pour faire un loto, Erica s’était demandé pourquoi Dieu tenait tant à la punir."
Noir c'est vraiment noir , dans ce second roman de William Boyle ou l'on suit les affres quinquagnéaire, secrétaire médicale un peu à la dérive et de son fils homosexuel triste qui noie son chagrin et sa déprime dans l'alcool dont les retrouvailles après une longue absence seront assez douloureuses et rongés par les non dits et les regrets.
Roman sur l'apreté de l'existence, à la fois sombre mais plein de douceur "Tout est brisé" est un très beau roman, car Boyle n'a pas son pareil pour décrire ces êtres abîmés par la vie avec sensibilité et une belle leçon de combativité , loin des standards littéraires américains trop bien formatés.
" On s'en fiche de savoir de quoi tu es les roi. Peut-être que tu es le roi de paumés. Dresse toi et annonce le à l'univers ! "
3. Les chemins de la haine; Eva Dolan ( Points)
« Zigic remarqua quelques hommes en costume parmi les habitués, des anglais sans doute, qui s’arrêtaient un instant boire un verre et se faire tailler une pipe avant de rentrer à la maison. Mais dans le brouhaha des conversations dominait un mélange de polonais, de lituanien et de letton, et les autochtones semblaient savoir qu’ici, ils n’étaient pas vraiment chez eux. »
Un corps calciné dans l’abri de jardin d’un pavillon d’une triste banlieue, peut-être le cadavre d’un travailleur clandestin, esclave moderne, travailleur pauvre qui ne peuvent pas se payer un logement. Insécurité, chômage, peur de l’autre, fracture sociale, la récession économique n’en finit pas dans cette ville ouvrière de l’Est du pays.
Marchands de travail, marchands de sommeil, marchands de survie, bétail humain, nationalisme rampant, Zigic et Ferreira les deux policiers chargés de l’affaire le savent, l’Angleterre promise n’existe pas et les chemins de la haine mènent au pire de la condition humaine.
Autopsie du travail au noir, de ses dérives, et de l’exploitation des travailleurs précaires venus de l’Est de l’Europe, « Les chemins de la haine » est une enquête minutieuse et chirurgicale.
Qu’au commissariat de Peterborough soit ouvert une section des crimes de haine est un marqueur, cette région du Nord-Est de Londres a pris de plein fouet toutes les crises successives depuis que le terme crise économique existe. Ecriture froide, style implacable, le premier roman d’Eva Dolan redonne au polar social ses lettres de noblesse.
4/ L'instinct de vie; Patrick Pelloux ( J'ai Lu)
" Par rapport à des morts dites naturelles, le traumatisme de l'accident du choc de l'attentat est encore plus sidérant parce que toutes les bases sont bousculées. Le corps comme l'esprit n'étaient pas préparées à la séparation et au drame".
Patrick Pelloux, l'urgentiste le plus célèbre du PAF a vécu dans sa chair les attentats de Charlie Hebdo où il a vu ses amis périr. Il raconte son vécu de victime et son expérience de médecin pour montrer comment reprendre gout aux choses patiemment car " il ne faut pas être préssé avec les personnes qui ont victimes d'un drame."
Il tente de guider le lecteur vers une méthode d'apaisement et un peu de douceur aux victimes qui subissent des psychotraumatismes.
Il nous montre, sans didactisme comment faire des gestes simples, à espérer dans l'humain, quand on a été touché par un acte terrifiant tels que ces attentats terroristes.
5. La journaliste, Christina Kovac ( Pocket)
"Ce ne serait pas la première fois que nous passerions des images filmées à travers les fenêtres- un jeu d'enfant pour Nelson, en réalité-, mais jamais nous n'avions dû filmer d'aussi loin. Il fallait trouver une combine."
Christina Kovac a travaillé pour la télévision américaine à Washington et adopte pour son premier roma,e point de vue d’une journaliste qui enquête sur la disparition de Evelyn, une jeune avocate très prometteuse.
On sent que l'auteur connait bien le monde des journalistes car on est plongé dans les coulisses de la télévision., au sein de ce journal télévisé avec les ragots, les ( difficiles) relations entre collègues, avec un vrai climat de paranoïa qui s'instaure peu à peu au sein de la chaîne TV.
On a également ses entrées dans le monde du droit politique et des affaires. bref dans les arcanes du pouvoir !
"Alors je tentais ma bonne vieille méthode, qui consiste à ranger les déceptions, les erreurs et les remords dans une boîte sur laquelle est écrit PARASITES. Mais ce remords-là avait du mal à rentrer dans la boîte."
Si la galerie de personnages secondaires parait parfois un peu stéréotypés on appréciera la force du personnage principale dont l'abnégation,et la determination sans faille crève l'écra....la page!!