Autoportrait en chevreuil
"J'ai l'impression que c'est sur ce trampoline trempé, lors de cet hiver déguelasse que j'ai vécu les plus belles heures de mon enfance."
Ce livre est né d’une rencontre fortuite avec un homme étrange, comme le raconte Victor Pouchet : «L’idée m’en est venue un jour d’août 2017. À l’occasion d’une étape d’un “tour de France à pieds” entrepris avec deux amis, le hasard nous a conduits dans une forêt bretonne. Aux pieds de menhirs et de dolmens, un homme était occupé à brancher des appareils électriques. Il se présenta comme magnétiseur et nous expliqua qu’il cherchait à capter des forces et présences invisibles et à “enregistrer les ondes scalaires”. J’étais fasciné par son discours si étrange sous des apparences scientifiques. Nous avons passé deux heures avec lui, puis nous sommes repartis. «Je me suis alors demandé ce que ça ferait d’avoir un père comme lui. À quoi ressemblerait une enfance baignée dans ce type de discours et de croyances. C’est là que le roman a commencé à naître dans mon esprit: j’avais envie de raconter l’histoire du fils du magnétiseur.»
Le fils du magnétiseur, c’est Élias, avec qui le récit commence. Il a trente ans et nous livre les souvenirs de son enfance abîmée. Il subit la démence de son père et ses discours délirants. Mais il raconte aussi son quotidien, son enfance «normale» dans laquelle chaque lecteur peut se reconnaître. Au cœur de ce récit, un conte familial se dessine, un secret tragique affleure. «Je voulais regarder comment l’enfance contamine une existence et comment on peut s’en détacher, imaginer une sorte de manuel d’évasion à usage unique», précise Victor Pouchet.
Puis, un jour, Élias rencontre Avril, une jeune femme flottante mais, par contraste avec lui, lumineuse et reliée à la vie. Dans la deuxième partie du livre, c’est son journal intime qui fait le récit. Un portrait en creux se dessine. Par des anecdotes en apparence anodines naissent les questions essentielles. «L’amour d’Avril va transformer la vie d’Elias, et c’est ce moment de basculement que je voulais capter.»
Dans une troisième partie, c’est la parole du père d’Élias qui dénoue l’intrigue et clôt le récit. «La croyance dans les ondes de cet homme m’a servi de prétexte pour évoquer la présence de l’invisible dans nos existences, invisible du passé qui pèse sur nos vies, invisible des sentiments qui nous unissent aux autres.»
Après Pourquoi les oiseaux meurent (Finitude, 2017) Victor Pouchet revient avec un second livre Autoportrait en chevreuil aux éditions Finitude, un roman à trois voix, habile et émouvant, qui confirme tout le talent de l'auteur.
A travers ces trois narrations, toutes les pièces du puzzle vont se rassembler.
Après pourquoi les oiseaux meurent, ou l'on assistait à la naissance d'un romancier, on peut dire qu'avec ce roman, Prix Blù Jean-Marc Roberts Victor Pouchet confirme tout son talent