Délicieux : le nouveau film d'Eric Besnard est vraiment un délice à savourer
Délicieux, c'est le nom de petits mets fait de pomme de terre et de truffe que l'excellent cuisinier Manceron propose à un grand noble et à sa tablée constituée de nobles puants et méprisants, à cette fin du 18e siècle, juste juste avant que vont exploser les oripaux de la monarchie française.
A la veille de la révolution, Manceron, fraîchement congédié par le duc en question (joué par le toujours formidable Benjamin Laverhne avec qui on a eu la chance de discuter longuement samedi soir) décide de s’extirper de sa condition de domestique.
Mais Délicieux, C’est aussi le titre de ce film d'Eric Besnard, qui après trois films de genre et trois chroniques familiales, tente son premier film d'époque avec cette comédie romantique et historique qui plante son décor en 1789.
Délicieux nous raconte de façon très intelligente et soignée l’histoire d’un cuisinier qui congédié par le dit noble, suite à cette initiative malheureuse va créer ce lieu de vie tel qu’on le connait aujourd’hui où l’on s’attable avec des gens de classe sociales différentes autour de nous..
Au XVIIIe siècle, le restaurant tel qu’on le connait n’existe pas. Seul la haute bourgeoisie française a accès aux plats cuisinés et raffinés;Les pauvres doivent se contenter d’une cuisine à base de terrines et de pain.
Dès les premières séquences du film, on comprend que l'art culinaire est réservé aux nobles et qu'eux seuls savent l’apprécier. Les pauvres, eux, doivent se contenter de se nourrir sans avoir l'accès à la gastronomie.
Mais plus qu'une chronique historique sur le fossé sans cesse croissant entre riches et pauvres, Délicieux est un récit de prise de confiance en soi qui prouve que seule l'aide d'un tiers peut aider celle ci à revenir.
Dans le récit co-écrit par Eric Besnard et le réalisateur Nicolas Boukhrief, c'est par l'entremise de Louise, apprentie de 50 ans et qui semble trainer des mystères derrière elles, que Manceron va reprendre goût à la cuisine et ainsi créer le premier restaurant de l’histoire.
Tourné en décor naturel, dans le Cantal, les fabuleux paysages évoluent au fil des saisons tout comme les délicieux plats préparés par le couple.
Le long métrage d'Eric Besnard rend un vibrant hommage au terroir et au savoir-faire (on peut y voir une métaphore du métier de metteur en scène comme le réalisateur Eric Besnard nous l'a confié lors de notre rencontre de samedi dernier ) et qui montre que les enjeux sociaux et gastronomiques n'ont pas évolué tant que cela en deux siècles.
Il est aussi question comme c'est le cas dans les débats d' aujourd'hui de retrouver le goût des aliments et de privilégier les circuits courts ou de la difficulté pour les femmes d'accéder aux fournaux dès qu'on sort de la sphère privée.
Le récit que Délicieux nous raconte est en effet parfait pour ouvrir l’appétit, tant il est soigné au niveau de l'image, le réalisateur et son chef opérateur ayant souhaité réaliser les plans de son films comme des natures mortes de Chardin ou les peintures de Delacour ou bien encore les peintres hollandais du 18e siècle.
Délicieux regorge de saveurs et met tous les sens en éveil, achévant d’amuser intelligemment l’esprit et de régaler les yeux et les papilles.
Ce Délicieux qui porte bien son nom tient toutes ses promesses de son casting également : évidemment Gregory Gadebois dans un rôle fait pour lui est flamboyant et Isabelle Carré dans un personnage plus complexe qu'attendu est vraiment impériale.
Beau, attachant, captivant, drôle, "Delicieux" est, à bien des égards, sans doute le plus beau film de son réalisateur et constitue un feel good qui remplit largement son rôle pour cette rentrée 2021 aussi singulière que celle de l'an passé.
Très bonne surprise que ce #delicieux d'Eric Besnard, assurément son meilleur film.. une belle histoire méconnue, un casting (premiers et second rôles) au top et un travail sur la lumière très soigné , faisant penser aux tableaux du 18e siècle... pic.twitter.com/Tf4nps3egF
— Baz'art (@blog_bazart) September 3, 2021